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Interview /Antony Blinken: «L’Amérique ne s’engage pas en Afrique à cause d’un autre pays»

Par La Prospérité
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Le Secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, en tournée en Afrique pour redessiner la stratégie américaine sur le continent, a accordé à RFI une interview à Pretoria, en Afrique du Sud. Antony Blinken évoque la guerre en Ukraine, l’influence américaine en Afrique, mais aussi les tensions en cours entre le Rwanda et la République démocratique du Congo. Il est arrivé  ce mardi 9 août en RDC pour la suite de sa tournée, avant de rejoindre le Rwanda.

Votre visite en Afrique du Sud touche à sa fin. Vous êtes maintenant attendu en République démocratique du Congo puis au Rwanda. Vous avez pris connaissance du rapport des Nations unies qui documente la participation de soldats rwandais dans des attaques contre des soldats congolais au Congo, en soutien aux rebelles du M23 dans la province du Nord-Kivu. Le Rwanda rejette les conclusions de ce rapport. Est-ce que vous confirmez les conclusions du rapport de l’ONU ?

Je vais surtout m’entretenir avec le leadership, à la fois en RDC et au Rwanda, pour essayer d’aider ceux qui veulent mettre fin au conflit et à la violence. Et surtout, soutenir des initiatives et des efforts africains, y compris l’effort du président sortant du Kenya, Kenyatta, dans un processus à Nairobi, pour essayer justement de trouver un avenir pacifique au Congo, à l’est. Pour nous, il s’agit de savoir comment être utile pour éviter que ces violences, non seulement continuent, mais s’accentuent de façon très regrettable.  

Sur notre antenne, le ministre congolais des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, a déclaré que les États-Unis ont un rôle à jouer dans la résolution de ce conflit. Il appelle également à des sanctions de la communauté internationale. Êtes-vous prêt à des sanctions, ou en tout cas à appeler la communauté internationale à des sanctions ? Et sinon, quel rôle précis peuvent jouer les États-Unis ?

Dans un premier temps, c’est surtout à notre diplomatie d’essayer de soutenir les efforts qui sont déjà en cours, y compris par la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), y compris par l’initiative de Nairobi, et à nous de voir comment nous pouvons soutenir ces efforts, les aider à trouver une solution diplomatique pour éviter que la violence continue, et de façon soutenable. Parce que c’est une crise qui se répète, et je pense qu’il faut trouver une solution qui est vraiment durable.  

Lors de la conférence de presse avec la ministre sud-africaine des Relations internationales, Naledi Pandor, il a été question du manque de constance des États-Unis, capables à la fois de condamner, de demander des sanctions dans certains conflits, puis dans d’autres, de rester silencieux. Est-ce que le cas du Congo et du Rwanda illustre le deux poids, deux mesures des États-Unis 

Je pense qu’il faut voir chaque défi dans ses propres détails. On essaie d’utiliser, selon le défi, les outils que nous jugeons les plus appropriés, les plus efficaces. Ce n’est pas toujours la même chose dans un cas ou dans l’autre, mais effectivement, il faut essayer quand même de rester fidèle à ses principes et de rester fidèle au but que nous avons. C’est d’essayer de trouver la paix où il y a conflit, d’éviter le conflit où il y a la paix.

Après la République démocratique du Congo, vous allez vous rendre au Rwanda. Est-ce que le soutien du Rwanda aux rebelles du M23 sera au menu des discussions avec le président Paul Kagame ?

Je pense qu’il faut qu’il y ait une cessation de tout soutien aux groupes armés quels qu’ils soient. Ce n’est pas un moyen de faire avancer la paix, la sécurité, la stabilité, c’est tout le contraire. Donc nous allons de toute manière en parler avec le président.

Au Rwanda, il y a un résident américain qui est détenu, qui a été condamné à 25 ans de prison, c’est Paul Rusesabagina. Il est connu pour avoir inspiré le film Hôtel Rwanda, mais aussi pour être un opposant au président Paul Kagame. Allez-vous demander sa libération ?  

Oui, de toute manière, dans hélas pas mal de pays à travers le monde, il y a des Américains ou des résidents américains qui sont détenus de façon injuste. Pour moi, c’est une priorité, où que ce soit, d’essayer d’œuvrer à leur retour, chez nous, aux États-Unis.  

Votre tournée en Afrique intervient après celle du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Est-ce que les États-Unis redoutent une perte d’influence sur le continent africain ?

Je ne suis pas là parce qu’il y a une compétition avec qui que ce soit d’autre. Ce n’est pas un voyage, non seulement un voyage, ce n’est pas un engagement américain en Afrique à cause d’un autre pays, mais au contraire,  parce que l’avenir du monde sera défini de façon très importante en Afrique.

Et donc,  ce que nous faisons ici, c’est que nous établissons des partenariats, nous essayons de travailler en commun sur les défis qui ont un vrai impact sur la vie de nos concitoyens, que ce soit le défi du Covid-19, que ce soit le climat, que ce soit l’impact des nouvelles technologies sur la vie de nos citoyens. Et donc pour nous, ce n’est pas du tout une question d’imposer un choix, mais d’offrir le choix pour les pays en Afrique.

Et nous avons un agenda très positif pour cet avenir. J’ai eu l’occasion, ici, en Afrique du Sud, d’élaborer un peu notre stratégie pour l’Afrique et j’en parlerai lors des autres voyages à l’avenir.

C’est un voyage où il est beaucoup question de la guerre en Ukraine. Vous êtes dans un pays qui refuse de parler d’invasion russe de l’Ukraine. Est-ce que vous avez eu cette discussion franche avec Naledi Pandor, la ministre sud-africaine des Relations internationales ? Est-ce que vous avez essayé de faire bouger les lignes ?  

 Nous en parlons souvent. Ce n’est pas la première fois, et nous sommes, je pense, ensemble sur les principes les plus importants. Ce qui se passe en Ukraine, c’est non seulement une agression contre le peuple ukrainien, c’est aussi une agression contre les principes qui sont à la base du système international, qui sont à la base de la charte des Nations Unies, qui sont très importants pour l’Afrique du Sud, y compris pour des pays à travers l’Afrique. L’idée qu’un pays n’a pas le droit de changer les frontières d’un autre par la force, l’idée qu’un pays n’a pas le droit de prendre le territoire d’un autre pays, c’est quelque chose qui résonne en Afrique, vue l’histoire de l’Afrique. Cette agression impérialiste de Vladimir Poutine en Ukraine, c’est quelque chose qui a un lien avec l’histoire de beaucoup de pays en Afrique. Et en plus, il y a des conséquences en Afrique et à travers le monde, surtout au niveau alimentaire, où il y a une crise qui existait déjà à travers le monde, à cause du climat, puis le Covid-19, et maintenant le conflit.

Pour moi, il est très important de montrer tout ce que nous faisons pour essayer, justement, de faire face à cette crise avec les pays africains. Une aide humanitaire très importante depuis l’agression russe, 6 milliards de dollars ou presque depuis février, mais surtout un investissement dans l’avenir agricole en Afrique, pour qu’il y ait une autosuffisance de production, pour que, s’il y a une autre crise à l’avenir, l’Afrique puisse faire face plus facilement.  

Cela faisait sept ans que les relations avec l’Afrique du Sud n’avaient pas été ainsi renouées, c’est ce qu’a dit la ministre des Relations internationales. Est-ce que la politique africaine de l’ancienne administration, les propos injurieux de Donald Trump ont fait du mal à votre administration, pour essayer de retisser des liens sur le continent africain 

Moi, je me concentre sur le présent et sur l’avenir. Le passé n’a pas d’importance. Ce qui est important, c’est ce que nous faisons aujourd’hui, ce que nous ferons demain ensemble. Nous avons eu, aujourd’hui, avec l’Afrique du Sud, le redémarrage d’un dialogue stratégique très important parce qu’il se concentre sur des sujets qui ont un vrai impact sur la vie des Sud-Africains et des Américains : des questions de santé, des questions de climat, l’investissement dans l’infrastructure, l’investissement plus global. Donc pour nous, c’est aujourd’hui, c’est demain, hier, c’est hier.  

Un dernier mot. Les Kényans sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président. Est-ce que c’est une élection présidentielle que les États-Unis suivent particulièrement ?

Nous suivons ça de près, comme beaucoup de monde à travers l’Afrique et à travers le monde. Jusqu’ici, je crois que ça se présente de façon très positive pour avoir une élection qui est libre, avec une participation importante et sans violence. C’est ce qu’attend le monde, c’est ce qu’attend l’Afrique de cette élection et nous suivrons ça de près. 

Rfi

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