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Mémo à la Commission Défense et Sécurité de l’Assemblée Nationale, RDC : Les Banyamulenges dénoncent la haine ethnique et la stigmatisation 

Par La Prospérité
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Hon Enock RUBERANGABO SEBINEZA, l’un des membres  influents des Banyamulenge

MEMO DE LA TRIBU BANYAMULENGE EN RAPPORT AVEC LA HAINE ETHNIQUE ET LA STIGMATISATION DONT ELLE EST VICTIME : UN FREIN

MAJEUR A LA COHESION SOCIALE ET DU DEVELOPPEMENT DU SUD-KIVU ADRESSE A LA COMMISSION DEFENSE ET SECURITE A L’ASSEMBLEE NATIONALE

Copie :

-Honorable président de la Commission des Droits de l’Homme à l’Assemblée Nationale, Lingwala/Kinshasa ;

-Excellence Madame la Ministre d’Etat et Ministre de la Justice et garde des sceaux, Kinshasa/Gombe ;

-Monsieur le Ministre des Droits humains, Kinshasa/Gombe

Honorable Président,

A la suite de notre réunion de consultation dans le cadre de la table ronde sur la paix et le développement tenu à Bukavu par la Lipade sous le Haut patronage du Président de la République dans laquelle la Commission Défense et Sécurité a pris une part active et sur notre demande, il a été convenu de vous faire ce MEMORANDUM dont l’objet est repris dans son titre.

Honorable Président,

La tribu Banyamulenge vient, par le présent mémorandum, auprès de votre  Commission, présenter ses préoccupations face à la discrimination dont elle est victime depuis plusieurs décennies.

Elle demande l’implication sans réserve, de l’Assemblée Nationale à travers les commissions Défense et sécurité et des Droits de l’homme qui nous lit en copie, en vue de mettre fin aux discours de haine qui ne cessent de s’intensifier ces dernières années dans toute impunité.

La RDC, notre pays, regorge plusieurs composantes sociales qui forment ensemble, ce qu’on appelle aujourd’hui « la nation congolaise ». Parmi ces composantes, nous retrouvons les Nilotiques qui sont historiquement et géographiquement localisés dans les provinces du Nord-Kivu, d’Ituri et du Sud-Kivu.

Nul n’ignore que toutes les peuplades de l’Est de la RDC, sont les produits des mouvements migratoires qui ont peuplé cette partie de l’Afrique, devenue plus tard la RDC en 1885, délimitée définitivement dans les frontières de 1910, où les Banyamulenge se sont retrouvés comme tous leurs voisins directs sur des terres définies entant que telles, fixées par la colonisation.

Ce mémo ne retrace pas l’historique sur cette question de la haine tribale et de la stigmatisation dans tous ses aspects complexes, mais il donne une brève photographie de l’état des lieux actuel des faits les plus saillants ainsi que les conséquences sur la cohésion sociale et la cohabitation pacifique entre les tribus voisines directes dont les (Babembe, les Banyindu, Bafulero et les Bavira) voire même les plus éloignés.

Précisons que pour nous, la haine ethnique et la stigmatisation tirent leurs origines de l’administration coloniale qui a délibérément déstructuré  l’organisation sociale de la tribu Banyamulenge, en désintégrant son pouvoir coutumier.

Cela a été traduit par ce qu’on a appelé à l’époque de l’administration coloniale la suppression des petites chefferies. Pour référence la plus récente, signalons que sous la direction du professeurs Filip  Reyntjens de l’Université d’Anvers, un groupe de chercheurs ( C.André, P.Dupont, Lubanda Lunanga,Mafikiri Tsongo,V.Parqué) du Centre d’étude de la région des grands lacs d’Afrique a publié un document intitulé , Conflits au Kivu : enjeux et antécédents, en décembre 1896  et à la page quinze(15) on précise que trois chefferies des Banyamulenge avaient successivement  été créées les 06 octobre 1891, le 03 juin 1906 et 02 mai 1910 par certains décrets dans le passé mais le décret du 05 décembre 1933 supprima cette autonomie. Cette décision est apparemment administratif,  puisqu’elle se situe dans le cadre de la politique de suppression des petites chefferies inaugurée par la circulaire du 08 novembre 1920 du Ministre de colonie L. Franck, précise-t-il.

Ces attitudes et actes des dirigeants coloniaux plantaient déjà le décor d’une marginalisation qui prendra forme dans les décennies qui ont suivi, en mettant en cause les droits de Banyamulenge  au Congo colonial, en les livrant à l’indexation, à l’exclusion,  aux frustrations et à l’arbitraire. Désormais les voisins les traitent des « sans terre » puisqu’ils n’ont pas de chefferies propres à eux. Par ailleurs, notons qu’il n’en est resté que les Villages(Localités) qui, selon la loi sur la décentralisation, sont reconnues avec statut des entités coutumières  au même titre que les groupements et les chefferies. Ainsi, croyons-nous que, qualifier les Banyamulenge d’un peuple sans terres est injuste et impossible.

A l’indépendance et par la suite, contrairement aux attentes des Banyamulenge, les choses se sont dégradées davantage, d’autant plus que la marginalisation a pris forme.

En 1964, toutes les tribus voisines aux Banyamulenge adhérèrent à la rébellion muleliste, avec pour principal objectif le pillage de nos vaches, comme c’est le cas aujourd’hui où, les hauts plateaux à cheval des territoires de Fizi, Mwenga/Itombwe et Uvira, ont été complétement rasées, des villages entiers complétement  détruits et plus de trois cents milles vaches razziées et vendues sur les marchés locaux avec  complicité avérée des services de sécurité et de l’administration locale. 

La loyauté des Banyamulenge vis-à-vis du pouvoir ne date pas d’aujourd’hui. Ils ont noué une fidélité face au régime de Mobutu pour constituer des groupes d’autodéfense, afin de protéger les villages, la population et ses biens et plus tard, fer de lance pour mater totalement la rébellion muleliste vers les années (1965-1970). Ces actes patriotiques des Banyamulenge aux côtés des autres compatriotes, ont marqué l’histoire du Sud-Kivu et inaugurer une aire de paix de la décennie 1970-1980 que la République se doit de reconnaitre.

Par contre, certains  leaders de nos voisins nourrirent une rancœur suite à l’échec des mouvements mayi mayi, pour lequel les Banyamulenge payent le prix aujourd’hui.

Vers les années 1980, la haine contre les Banyamulenges monte en puissance. Le conflit devient politique. Les voisins se coalisèrent pour traiter les Banyamulenge  des « étrangers », et donc, des rwandais tout court qu’il faut chasser de la RDC. Sous l’instigation des politiciens du Kivu, des décisions sont prises par les instances du MPR (mouvement populaire de la révolution, parti Etat) pour refuser aux Banyamulenge le droit de vote et d’être éligibles aux élections de 1982 et 1987. De même à la CNS (conférence nationale souveraine) censée réunir tous les représentants des couches sociales congolaises, les Banyamulenge seront totalement exclus.

1994, la campagne s’intensifie au  parlement issu de la CNS, le HCR-PT( haut conseil de la République- Parlement de Transition) qui sombra dans la dérive  et initia une enquête donna lieu au Rapport Vangu de triste mémoire  commandité par certains acteurs politiques et ceux de la Société civile de l’espace grand Kivu , d’une part, et les dernières guerres qu’a connu notre pays, imputées abusivement aux Banyamulenge, d’autre part, ont été déterminant pour mobiliser toute la population contre les Banyamulenge et les  tutsi du Nord-Kivu .

 La mobilisation de masse menée par des extrémistes, a été à la base des tortures morales, psychologiques et physiques à travers des discours inoculant un venin de haine dans le mental de nos compatriotes congolais que chaque membre de notre tribu porte à jamais dans sa chair.

Désormais,  certains leaders politiques nous traitent des vermines.

Ceci a  donné lieu au déni des droits politiques et administratifs et aux attaques à l’intégrité physique sur base de faciès. Des discours appelant à l’extermination des Banyamulenges, étaient devenus des thèmes populistes des politiciens qui le déclarent au grand jour et dans l’impunité totale.

Les Banyamulenge  sont injustement assimilés à toutes les guerres survenues particulièrement à  l’Est de la RDC, et sont présentés comme des ennemis de la République à effacer. Un discours génocidaire qui génère  des actes de génocide.

A ce jour, les drames contre les Banyamulenge ont gagné du terrain dans plusieurs autres coins de la République éloignés du Kivu, notamment à Kinshasa, le siège des Institutions nationales, où les discours et actes du type racial contre les Banyamulenge sont suivis à longueur des journées à travers toute sorte de médias( chaines de TV, les réseaux sociaux, la presse écrite etc….), toutes les autorités nationales en sont témoins.

Cette situation est à la base des vindictes populaires et lynchages publics, des tracasseries par les services de sécurité, des arrestations et emprisonnements arbitraires, des procès iniques, pour couronner tout, le cannibalisme. Bref notre deshumanisation et ce, sur base du délit de faciès.

Comment la République peut-elle tolérer de tels actes contre une partie de ses citoyens ?

La MONUSCO est témoin depuis plus de 20 ans de tout ce qui se passe dans les hauts plateaux, complétement détruits, et en a fait une communication au conseil de sécurité des Nations Unies le 05 octobre 2021, Mme Bintou Keita RSSG de Cheffe de la MONUSCO, elle a parlé d’un « nettoyage ethnique » dans ces hauts plateaux du Sud du Sud-Kivu.

Depuis avril 2017, le Red Tabara, un groupe burundais soutenu par le Rwanda s’est allié aux mayi mayi et ont réussi, non seulement à déstabiliser les Banyamulenge, mais aussi à les dépouiller de leurs biens  sous l’œil complice et de fois avec collaboration avérée des certains éléments FARDC.

Quand nous alertons les voisins, la nation et le monde, les extrémistes auteurs de ces exactes nous accusent de nous « victimiser » pour nous faire taire. Comme qui dirait, nous vous tuons et taisez-vous, vous êtes destinés à cela.

Ci-dessous, quelques tueries sauvages qui illustrent la tragédie que connaissent les membres de la tribu Banyamulenge :

1. Major Joseph Kaminzobe, officier des FARDC qui a été extrait d’une ambulance qui transportait son titulaire du B2, l’emmenant à l’hôpital à Uvira, en décembre 2021. Il a été lynchée, brulé vif à Lueba par la population qui a mangé sa chair en pleine journée et ce, en présence des autorités locales ;

2. Monsieur Ntayoberwa, un commerçant qui a été tué en juin 2022 à Kalima. Son corps a, aussi, été brulé et mangé par la population ;

3. Mesdames Nyamutarutwa et Nyamwiza, tuées en date du 18 avril 2020, par les Mai-Mai en complicité avec certains éléments militaires FARDC postées à Minembwe centre, après les avoir violé, dénudés et mutilés. Au même moment, Monsieur Adoni, compagnon d’infortune des victimes, a été abattu par balles afin de dissimiler les traces du carnage.

4. Assassinat d’un élève et de quatre femmes tous Banyamulenge, respectivement Mr Mugaza Ngenganyi, le 09/10/2022 par un militaire FARDC à Minembwe, son corps ayant été mutilé, les organes génitaux découpés et sa main emportée comme trophée et présentée aux militaires de la 12ème brigade par le tueur, et mesdames Nyirantabara, Nyiramuhoza Bibiane, Royi Mituzo et Nyirantonesha, le 30 juin 2021, par les éléments de la 12ème Brigade d’intervention rapide/FARDC, à l’aérodrome de Minembwe, en présence du Général Philémon Yav, ex-Commandant de la 3ème Zone de Défense, alors en mission sur place.

5. les tueries des militaires Banyamulenge servant sous le drapeau de la RDC, sont régulièrement enregistrés, ils sont à tort, qualifiés d’infiltrés suscitant ainsi la méfiance de leurs compagnons d’armes sur différents fronts militaires ;

7. Arrestations arbitraires des jeunes civils Banyamulenge sur base du délit de faciès en les associant aux mouvements insurrectionnels.

8. Destruction méchante de trois églises à Goma en février 2023, pour la simple raison qu’elles sont dirigées par des pasteurs Banyamulenge. Cet événement désobligeant s’est passé en pleine journée sans aucune intervention des agents de l’ordre, mais aussi sous un silence coupable des organisations de la société civile et des élus du peuple.

Eu égard à cette situation et dans le but de décourager les personnes qui s’évertuent dans ces actes qui détruisent le pays, tels que décrits ci-dessus, les Banyamulenge recommandent ce qui suit :

1. voter une loi qui renforce la criminalisation, la répression du tribalisme et la propagation de la haine ethnique contre tout congolais ;

2. Lister et interpeler les personnalités et les médias qui distillent des discours d’incitation à la haine et de stigmatisation, en des poursuites judiciaires. Il est non moins important de signifier que cette période pré-électorale les discours de haine contre les Banyamulenge constituent une marchandise vendable par les politiciens en mal de positionnement et à court d’électorats, où les politiciens se positionnent pour les élections de 2023.

A noter aussi que la tribu Banyamulenge, que les politiciens passent pour bouc émissaire, elle refuse et n’est pas responsables des différentes crises pour lesquelles elle est à tort et abusivement accusée jusqu’à celle de Kwamouth à plusde  2000 km de leur terroir des hauts plateaux du sud du Sud-Kivu, à  l’Ouest de notre pays dans le Maindombe et de celle de l’ex-province de l’Equateur ;

3. pour exemple, les Banyamulenge demande de poursuivre en justice et punir tous les crimes commis à l’encontre de leurs membres, notamment :

  • Les auteurs du cannibalisme du major Kaminzobe Joseph à Lueba/Fizi .  Le 09/12/2022 et de Ntayoberwa à Kalima au Maniema, le 18 Juin 2022 ;
  • Les responsables de l’assassinat de l’élève Mugaza Ngenganyi, à Minembwe, le 09/10/2022 ;
  • Interpeler Mr Bitakwira Justin Bihona-Hayi, ancien Ministre et Député national, président d’un parti politique, qui propage les discours d’incitation à la haine contre la tribu Banyamulenge ;
  • Traduire en justice et organiser des procès publics et pédagogiques contre les généraux (1) Philémon Yav, (2) Muhindo dit Mundos, et (3) Dieudonné Muhima.
  • Initie une interpellation judiciaire contre le député provincial du Sud-Kivu, hon. Homer Bulakali qui est actif dans la propagation des discours d’incitation à la haine et de stigmatisation jusqu’à nous traiter des réfugiés rwandais de 1959, ainsi qu’à l’encouragement des massacres des Banyamulenge par les mayi mayi en alliance avec le Red Tabara, dans les hauts hauts plateaux de Fizi, Mwenga/Itombwe et d’Uvira, province du Sud-Kivu ;

6. Libérer les jeunes civils Banyamulenge, arrêtés et détenus arbitrairement, à Kinshasa, à Bukavu, à Uvira et à Goma ;

7. La tribu Banyamulenge tient à préciser sans équivoque que, tout en étant victime de ces discours et des actes de haine, elle est toujours mobilisée à rester loyaliste aux institutions légalement établies et prêts à participer, en cas de nécessité, à la défense de la patrie comme elle l’a toujours fait en des moments difficile qu’a connu la République. 

En plus :

  • Les Banyamulenges ont noté les efforts fournis par le Gouvernement allant dans le sens de décourager et de condamner les instigateurs de ces discours de haine, mais elle attend impatiemment du Gouvernement la mise en œuvre de ces décisions pour réprimer ces actes infractionnels ;
  • Les Banyamulenges remarquent un décalage entre le discours du Président de la République, Chef de l’Etat en ce qui concerne les discours d’incitation à la haine ethnique mais elle regrette de ce que les services de sécurité et de la justice n’en font pas autant comme s’ils s’opposaient à l’instruction du Commandant Suprême des Services et Forces de Sécurité ;
  • Nonobstant les mauvais traitements que subissent les militaires issus de la tribu Banyamulenge à cause de leur faciès, ils continuent à être loyaux au drapeau national à exceller dans les opérations qui leur sont confiées pour la défense de la patrie ;
  • La tribu Banyamulenge s’engage à s’impliquer dans des dialogues sincères et constructifs avec toutes les tribus voisines et, elle les invite à faire de même en favorisant à construire le vivre ensemble, pour l’unité, la cohésion sociale, la cohabitation pacifique et éviter de falsifier l’histoire de peuplement du Sud-Kivu.

Les Banyamulenges condamnent sans réserve comme tous les compatriotes, toute tentative de déstabilisation de notre pays d’où qu’elle vienne et renouvellent leur soutien au Président de la République, Garant de la Nation, dans sa quête de recherche de la paix à l’Est de notre pays.

Fait à Bukavu, le 24 mars 2023 autres

Pour la tribu Banyamulenge,               

Les participants à la table ronde organisée par la Lipade pour la paix et le développement du Sud-Kivu à Bukavu :

  1. Hon Enock RUBERANGABO SEBINEZA
  2. Jean Scohier MUHAMIRIZA, président Comité SHIKAMA/Banyamulenge de Bukavu
  3. Pacifique MUSIRIMU, Notable
  4. Zébédée GASORE, Notable
  5. Zachée MUHAMIRIZA NTAYOBERWA, Chef coutumier
  6. Levis RUKEMA MAKAGURA, Notable
  7. Mme Ange KEGA wa KEGA, Notable
  8. Siméon MUKIZA NTWAYI, Notable
  9. Olivier RUMENGE, Notable
  10. Héritier MUHIMPUNDU, Notable
  11. Charles MUKIZA, président SHIKAMA/Banyamulenge, Kinshasa
  12. Alexis RUHANAGA, président Shikama /Banyamulenge, Uvira
  13. Hon DUGU wa MULENGE Esron
  14. Pasteur Fironi BIZIMANA
  15. Pasteur Théophile GAKUNZI
  16. Tharcisse KAYIRA, Notable
  17. RUBIBI Mporana, président éleveurs, Minembwe
  18. Rodrigue RUKUMBUZI, Notable
  19. James, membre
  20. Bienvenu IRANZI, membre

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