(Par Omer Nsongo die Lema)
Se parler, c’est cela même le dialogue. Terme devenu si effrayant en RDC qu’à sa moindre évocation, on est vite catégorisé pro-ceci, anti-cela. Pourtant, selon le dictionnaire, dialogue veut simplement dire « Conversation entre deux ou plusieurs personnes sur un sujet défini ». Ou encore « contenu de cette conversation ». Dans la pratique, quand on veut réellement vider un contentieux pour établir ou rétablir la vérité, on s’assoit autour d’une table et on se parle. Question tout ce qu’il y a d’ordinaire : y a-t-il, oui ou non, un contentieux entre les Congolais ? Ou y a-t-il, oui ou non, un différend entre le Congo et l’un ou l’autre de ses 9 Etats voisins ?
Le désistement fait partie des techniques et tactiques des négociations
Ce qui compte, c’est plus la capacité que la volonté de répondre à ces questions, capacité qui décide soit du rejet, soit de l’acceptation du dialogue en fonction du terrain, des enjeux et du jeu.
Évidemment, chacun a ses raisons. Tel est le cas de l’initiative Lourenço, terme désignant les négociations prévues à Luanda dès lors que celles-ci s’organisent en dehors du Processus de Nairobi (réservé aux groupes armés congolais) et de la Résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations Unies.
Comme pour toutes les assises semblables, il y a des pour et des contre, chacun y allant avec ses convictions forgées par sa perception des réalités, voire des vérités.
Prévue pour le 18 mars 2025 à Luanda pour 4 jours (invitation de l’organisateur faisant foi), la première réunion de prise de contact n’a pas eu lieu en raison du désistement du M23 en dernières minutes. Pour ceux qui ne le savent pas, le désistement fait partie des techniques et tactiques des négociations qui, elles, prennent le temps qu’elles prennent : une minute, une heure, un jour, une semaine, un mois, un trimestre, un semestre, une année, voire plusieurs années !
L’essentiel reste l’atteinte des objectifs. A l’annonce du rendez-vous de Luanda, deux des candidats à la présidentielle de 2023 se sont prononcés pour : Moïse Katumbi et Martin Fayulu. Un s’y est opposé : Denis Mukwege.
Un futur candidat, en la personne de Jean-Marc Kabund, s’est dit contre.
Bon nombre de pro-Tshisekedi n’en veulent pas aux motifs, pour certains, du brassage et du mixage dans l’Appareil sécuritaire, pour d’autres, du partage du pouvoir. Ils font valoir l’échec des dialogues organisés jusque-là !
Récuser le dialogue aura alors une signification. Une seule : cacher des vérités aux congolais !
Serions-nous pour, nous « BALISES » ? Réponse spontanée et sincère : Oui ! Oui parce que, nous y croyons : chaque dialogue a sa dynamique. Oui parce que le fait de disqualifier les fora précédents signifie que tout n’y a pas été, tout n’y a pas été fait, cela de la Conférence de Coquilathville (Mbandaka) en 1960 à la Consultation présidentielle à Kinshasa en 2021, en passant par la Conférence constitutionnelle de Luluabourg (Kananga) en 1964, la Conférence nationale souveraine en 1991-1992 et le Dialogue Intercongolais en 2001-2003, pour ne citer que ces rendez-vous.
A partir de cet instant, pour conjurer le sort, la condition unique pour un vrai Dialogue est de jouer carte sur table. Ce qui nécessite la re-visitation de tous les engagements pris par la RDC depuis 1960. C’est de cela qu’il est question lorsqu’on parle de re-fondation, de re-création du Congo.
Par conséquent, récuser le Dialogue a pour signification « cacher des vérités aux Congolais !
Dans les deux dernières livraisons de « BALISES », est annoncé l’avènement de 3 Dialogues :
-le premier est celui du Processus de Nairobi réservé aux groupes armés congolais. Il va falloir s’attendre à ce que les 252 groupes armés recensés officiellement par le P-DDRCS réclament eux aussi leur participation. (Il faut s’y préparer) ;
-le deuxième avec le Rwanda. Il serait souhaitable de l’étendre à l’Ouganda et au Burundi. Au cours de ces 30 dernières années, ces trois voisins n’ont pas été « gentils » avec la RDC ;
-le troisième concerne les forces politiques et sociales congolaises. Il est inéluctable, car rien ne saura expliquer ni justifier dans le chef du Pouvoir l’acceptation de dialoguer avec les groupes armés congolais et d’échanger avec les États voisins belligérants tout en disant niet aux protagonistes congolais « non armés ».
Botter en touche devant le poteau de l’équipe adverse !
C’est l’occasion de le redire puisque nous y croyons fermement, nous « BALISES » : en 65 ans d’indépendance, « jamais RDC n’a été aussi en bonne position qu’aujourd’hui pour faire valoir ses revendications du reste fondées.
Notamment en obtenant respectivement des groupes armés congolais, des États voisins ainsi que de l’Opposition politique et de la Société civile congolaises des réponses à leurs préoccupations.
Pour l’anecdote, après Sun City II, révoltée par ce qu’elle avait considéré comme un sabotage de l’Opposition politique alors que se menaient des pourparlers pour la mise en place des institutions de la Transition 1+4, une grande dame de la politique zaïroise avait eu le courage de s’interroger sur la volonté d’un certain Étienne Tshisekedi, pourtant mieux positionné pour être le Vice-président de la République pour leur composante. Elle s’était étonnée de voir le lider maximo ou Sphinx de Limite réussir à dribbler sur le terrain toute l’équipe adverse, gardien compris, puis botter en touche devant le poteau dégarni ! Elle y avait vu le refus de marquer le but de la victoire.
Nous y sommes. Ou presque !
A « Balises », nous avons été pour les négociations directes RDC-M23.
Figurons-nous seulement que le contraire se soit produit à Luanda au travers de l’absence de la délégation du Gouvernement mais la présence de la délégation du tandem M23-AFC ! On en serait pas à l’exubérance en cours dans les médias. Heureusement que la voix de la raison l’a emporté. Faut-il encore faire preuve de prudence et de vigilance.
A « Balises », nous continuons de croire dans les vertus du Dialogue fondé sur la vérité et non sur le mensonge. Dialogue avec les trois entités identifiées ci-dessus, bien entendu.
A « Balises », nous rappelons la phrase forte de l’américain Lee Iacocca : »Toute bonne décision prise trop tard devient une mauvaise décision ».