(Par le Docteur David Menge, Conseiller municipal honoraire de la ville d’Ivry-sur-Seine)
La République Démocratique du Congo (RDC) fait face à une occupation étrangère qui complique sa quête de paix et de stabilité. Dans ce contexte, le Pacte Social pour la Paix et le Bien-Vivre Ensemble, proposé par la CENCO et l’ECC, suscite de nombreuses interrogations. Peut-on réellement le considérer comme un engagement social authentique dans une période aussi troublée ? Quelles garanties offre-t-il face aux défis posés par cette situation d’occupation ? Explorons ensemble les nuances et incertitudes qui entourent cette initiative des églises.
Depuis la bataille de Goma, où la ville a été prise par les rebelles du M23/AFC soutenus par l’armée rwandaise, la CENCO et l’ECC ont engagé une diplomatie parallèle, les menant de Kigali à Paris en passant par Bruxelles, le Congo-Brazzaville et bien d’autres pays pour promouvoir leur pacte social. Cependant, ce dernier ne mentionne jamais l’agression rwandaise dans leur pacte, bien que l’ONU ait reconnu la présence de plus de 4 000 militaires rwandais lourdement armés à Goma, puis à Bukavu. J’invite les Congolais à lire ce document et à se forger leur propre opinion.
A la lecture du document de la CENCO et de l’ECC, on peut entendre que le problème actuel du pays est d’abord national et non externe. Elles préconisent un dialogue qui semble déconnecté des réalités, visant à rétablir des dignitaires déchus.
Leur approche diplomatique semble éclipser les efforts officiels du gouvernement, créant ainsi des doutes chez les pays envisageant des sanctions contre les agresseurs. Bien que le dialogue citoyen soit essentiel pour aborder des questions longtemps évitées, le moment choisi pour en faire un sujet de politique extérieure soulève des préoccupations.
Pour dissiper tout doute, j’appelle la CENCO et l’ECC, au nom du peuple congolais, à fournir un compte rendu détaillé et fidèle des entretiens qu’elles ont eus avec les dirigeants de tous les pays étrangers qui leur ont accordé une audience. De nombreux Congolais ont mal accueilli leur visite à Kigali et leur rencontre avec le M23/AFC, les rues de Goma étant encore jonchées de cadavres.
Cette demande inclut également un éclairage sur l’origine du financement de leurs déplacements. Une telle transparence permettrait aux deux organisations ecclésiastiques de se dédouaner de tout soupçon de collusion avec l’ennemi, alors que le conflit continue d’endeuiller la République.
Bien que la fusion des deux appels de la CENCO et de l’ECC, le 15 janvier 2025, pour créer la « Feuille de route du Pacte Social » ait du sens, cette initiative, qui se veut un outil inclusif pour engager les citoyens, les institutions et les organisations régionales dans un processus de gouvernance de paix, est mal interprétée tant par les Congolais de l’intérieur que de l’extérieur.
On aurait souhaité que les hommes de Dieu commencent par faire un véritable diagnostic de la situation qui endeuille notre peuple depuis plus de trois décennies, posent le ou les problèmes, mettent en exergue les causes de ce sang versé, nomment les responsables tant externes qu’internes, et condamnent fermement les agresseurs rwandais ainsi que l’occupation de notre pays pour renforcer leur action et afficher leur solidarité avec les victimes du Nord et du Sud Kivu.
Ce manque de clarté est ce qui nous pousse à réagir dans ce document. Je rappelle ce que vous connaissez : « A César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Cela signifie qu’il est essentiel de rendre à chacun ce qui lui revient.
En d’autres termes, cela souligne l’importance de reconnaître et de respecter les autorités terrestres tout en réservant les choses spirituelles ou divines à leur juste place. Cette phrase appelle à un équilibre et à la justice dans nos responsabilités envers les autres et envers nos croyances. Construisons l’unité dans la diversité pour ne pas regretter ce qui pourrait nous arriver !
Pour que le Pacte Social pour la Paix en RDC soit perçu comme un véritable espoir de réconciliation, il est judicieux qu’il adopte une transparence totale et clarifie ses positions sur les enjeux clés, notamment l’occupation étrangère. Cela inclut un compte rendu détaillé des négociations diplomatiques et une explication claire de l’origine de ses financements, afin de dissiper tout soupçon de collusion et renforcer la confiance du peuple congolais.
En agissant ainsi, le Pacte pourra véritablement unir les citoyens et les institutions dans une démarche de paix durable, plutôt que de susciter des controverses et des divisions.