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Affaire lampadaires, RDC : Jules Alingete a boudé les instructions de Félix Tshisekedi en bloquant un projet salutaire pour les Congolais

Par La Prospérité
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(Enquête réalisée par Belhar Mbuyi et Olivier Kaforo)

Août 2023. Jules Alingete bloque la sortie des milliers de lampadaires et leurs accessoires des entrepôts de la Direction générale des douanes et accises (DGDA). A moins de quatre mois des élections, Félix Tshisekedi tient à l’installation de ces lampadaires à Kinshasa, qui feront partie de son discours bilan pour la capitale.

Devant plusieurs de ses proches depuis le Brésil, le Chef de l’Etat ordonne à Nicolas Kazadi d’instruire de sa part l’IGF-Chef de Service (Jules Alingete) de lever sa mesure immédiatement pour ne pas entraver le projet. Jules Alingete refuse de s’exécuter. Le projet prendra donc un grand retard. Comme le chef de l’Etat laisse faire, M. Alingete se croit tout permis.

Il va donc entraver la réalisation des pans du programme du chef de l’Etat, ou encore détruire l’image des proches du président de la République dans l’opinion, en orchestrant des puissantes campagnes médiatiques.

Et ce sont les fidèles du Président de la République qui ont fait preuve d’abnégation et de compétence dans la conduite de leurs charges qui se retrouvent sacrifiés. Le cas de Nicolas Kazadi, alors Ministre des Finances, est révélateur de ce lâchage par le numéro un congolais à la suite des dossiers dans lesquels, pourtant, aucune incrimination n’a été retenue à son encontre.

Notre consortium de médias économiques congolais constitué du Groupe de presse Chronik’Eco et du site d’informations économiques Finance-cd.com, a décidé de mener une enquête sur l’affaire dite de lampadaires, qui avait fait l’objet de dénonciations de la part de l’Inspection générale des Finances (IGF). Le consortium a travaillé selon les règles de l’art, pour démêler la vérité de la clameur publique instillée par des puissantes campagnes médiatiques menée en sous-main par l’Inspecteur Général des Finances (IGF).

Il nous apparaît clairement que la démarche de l’IGF n’a réussi qu’une chose : entraver durablement l’implémentation du programme du chef de l’Etat. Etait-ce l’objectif poursuivi ? Ceux qui ont ainsi contrarié l’exécution du programme du président de la République l’ont fait dans quel dessein ? Nuire à l’action du chef de l’Etat ? Se taper une popularité à peu de frais en surfant sur le populisme ? Ou les deux à la fois ? A l’opinion de juger.

Deuxième partie : l’affaire des lampadaires

Mi-2021, peu après sa nomination au ministère des Finances dans le gouvernement Sama Lukonde, Nicolas Kazadi reçoit le gouverneur de Kinshasa, Gentiny Ngobila, accompagné du PDG de SOLEKTRA, l’homme d’affaires Samba Bathily. Dans leur gibecière, un projet d’implantation de l’éclairage public à Kinshasa, projet que le Chef de l’Exécutif de la capitale a déjà fait valider à tous les niveaux. Il s’agit d’implanter 2.594 au coût total de 13,6 millions de dollars américains.

Encore une fois, Nicolas Kazadi pose des questions sur les prix, expliquant qu’il a déjà payé des lampadaires avec Modern Construction à 1.500 USD, et demande comment justifier un prix aussi élevé. Mais ses deux interlocuteurs donnent tous les détails au centime près : leurs lampadaires sont différents sur le plan de la qualité ; la société prestataire va les commander de France au prix de 1.700 euros dans le cadre d’une opération pilote visant à déclencher le financement par le trésor français de 30.000 lampadaires au bénéfice de la RDC pour un prix total de 50 millions d’euros.

Ensuite : avec les mâts qui seront commandés du Maroc, la construction de massifs de candélabre en béton – dispositifs de fixation en forme de socle béton destiné à servir d’appui aux poteaux d’éclairage public – et d’autres accessoires, le kit complet par lampadaires revient à 4.936,62 USD. Il faut ajouter 13 lots 693complets d’équipements d’entretien au coût unitaire de 68.289,75 USD, soit un coût total de 887.766,75 USD. Ce qui donne le total marché de 13.693.370,62 USD.

Dans ces conditions, le ministre des Finances accepte donc de signer l’ordonnancement de la dépense. Mais, pour veiller à ce que ce soit bien le modèle présenté qui sera acheté, il prend des mesures de précaution : il demande à Gentiny Ngobila (Gouverneur de Kinshasa) d’ouvrir un compte dans une banque dont ils vont surveiller ensemble les transactions. C’est ainsi qu’un compte est ouvert à la SOFIBANQUE par le gouverneur de Kinshasa. Nicolas Kazadi y transfère les 13 millions USD, mais prend soin d’aviser par écrit le PDG de la banque que tout paiement ne pourra se faire que sur base de sa non-objection. Il est convenu que 30% de la somme seront versés au prestataire, la société Solektra de Samba Bathily, et 70% directement au fournisseur, une société française.

L’IGF Bloque et bloque encore

Par la suite, c’est Nicolas Kazadi lui-même qui invite l’inspecteur général des finances – chef de service et lui confie la surveillance du dossier. Jules Alingete Key lui explique que cela tombe bien parce que son service a justement une mission à l’hôtel de ville. Le premier paiement a lieu sans problème. Pour le deuxième, M. Ngobila écrit à la SofiBanque pour exiger que le paiement soit fait en faveur du prestataire.

Inquiet, le PDG de la SofiBanque, M. Henry Wazni, écrit à Nicolas Kazadi (ministre des Finances) pour lui rappeler que les versements au prestataire devraient se limiter aux premiers 30% selon ses instructions. Sur quoi le Ministre des Finances ordonne que l’argent soit payé directement au fournisseur.

Pour les 30% derniers, M. Ngobila écrit à la SofiBanque pour qu’ils soient versés dans le compte fonctionnement de l’hôtel de ville. Mais, la banque est restée sur les instructions de M. Kazadi, et a plutôt payé au fournisseur.

Tous les conteneurs arrivent ainsi au port de Matadi, mais il se pose un problème : les régies financières exigent à la Solektra de payer la TVA et la douane. Les deux font 56% du montant. « Si je paie une telle somme, je subis une perte qui ne me permettra pas de mener à bien le projet », explique M. Samba Bathily au Ministre des Finances.

Nicolas Kazadi lui rétorque qu’il aurait dû négocier une exonération en amont. « C’est vrai que je n’y avais pas pensé avant, mais partout en Afrique où je fais de tels projets, ce genre de matériels sont toujours exonérés », répond M. Bathily. Il reste que Solektra écrive au Ministre des Finances pour solliciter l’exonération après coup.

M. Kazadi confie le dossier à sa cellule fiscale dont le responsable, le conseiller Chiribagula lui dit qu’il existe en ce moment-même, un décret en préparation qui exonère les produits solaires, mais qui n’est pas encore finalisé. Il propose au ministre d’autoriser la levée d’urgence de sorte que Solektra ne paie pas les frais, en attendant que le Premier ministre signe son décret. C’est ainsi que Nicolas Kazadi écrit à la DGDA pour solliciter la levée d’urgence, ce que la DGDA autorise.

Mais, au moment où les lampadaires allaient être sortis de la douane, Jules Alingete Key, qui se trouve à Matadi, s’interpose et bloque l’opération. Il va y avoir un échange entre lui, les dirigeants de Solektra et les responsables de la DGDA. En conclusion, ils décident ensemble de revenir vers le ministre des Finances. Nicolas Kazadi reconfirme son autorisation de levée d’urgence. Mais au moment de sortir les lampadaires de la douane, Jules Alingete Key bloque encore.

L’IGF boude les instructions du Président

Conséquence : alors que Félix Tshisekedi souhaitait les voir installés pour éclairer les Kinois la nuit comme une des actions à brandir dans son discours en cette année électorale, les lampadaires se retrouvent bloqués dans les entrepôts de la DGDA par la seule volonté d’un homme, Jules Alingete.

En août 2023, le Chef de l’Etat congolais est à Belém au Brésil pour participer à un sommet sur le bassin de l’Amazonie. Dans son entourage il y a le Ministre des Finances, Nicolas Kazadi et l’homme d’affaires Samba Bathily.

Au cours d’un intermède dans la suite présidentielle, ce dernier pose son problème au chef de l’Etat, disant qu’il n’a toujours pas achevé son projet d’installation des lampadaires à Kinshasa à cause de Jules Alingete qui bloque la sortie du matériel. Félix Tshisekedi s’en étonne, et se tourne vers son ministre des Finances. Ce dernier explique qu’il a fait ce qu’il pouvait, mais qu’il a buté sur l’intransigeance de l’IGF-chef de service.

Sur le champ, le président de la République ordonne à Nicolas Kazadi d’appeler l’IGF et de lui dire de lever son interdiction pour ne pas compromettre le projet. Le Représentant personnel du Chef de l’Etat, Joseph Thierry Luvuezo Bolimela, et le Directeur de Cabinet adjoint à la Présidence, Olivier Mondonge sont présents.

Nicolas Kazadi appelle donc Jules Alingete et lui donne les instructions reçues du président de la République, et ce dernier s’engage à exécuter l’ordre du chef de l’Etat. Mais rien ne se fera. Jules Alingete boude les instructions du président de la République. Les mois passent.

En décembre, mois électoral, l’IGF-chef de service sort le dossier avec deux thèmes : surfacturation et non-exécution. Alors que, d’une part, l’IGF avait en charge la gestion du compte et, d’autre part, c’est lui qui bloque la sortie du matériel !

Comme d’habitude, une terrifiante campagne médiatique est lancée pour ravager l’image de Nicolas Kazadi, présenté comme le moteur d’un détournement monstre dans le dossier lampadaires.

« D’abord ce dossier n’était ni initié, ni négocié par Nicolas Kazadi. C’est un dossier qui vient de l’hôtel de ville, et qui était passé par toutes les étapes d’approbation. Si Nicolas Kazadi avait l’intention de s’enrichir sur ce dossier, il aurait payé au prestataire, de sorte que ce dernier lui rétrocède un pourcentage sur le montant payé. Or, il a exigé le paiement direct au fournisseur en France. Ce faisant, il a sécurisé le projet », explique un spécialiste des finances publiques.

Des projets de Félix Tshisekedi passés à la trappe

Inquiet, Félix Tshisekedi convoque Nicolas Kazadi et Jules Alingete pour une confrontation devant lui. Le ministre accuse l’IGF de mauvaise foi et d’ourdir une cabale politique, et ce dernier n’a qu’un seul argument : la surfacturation. Il affirme que le prestataire aurait acheté les lampadaires à 800 euros et non à 1.700 comme il l’affirme, et que par conséquent, le prestataire ne perdrait pas l’argent s’il payait la douane et la TVA. Il affirme détenir la lettre du fournisseur qu’il se refuse pourtant de brandir.

Vive réaction de Nicolas Kazadi qui rappelle que le fournisseur a été payé par lettre de crédit, et pose la question de savoir comment la banque peut tricher avec une lettre de crédit. Ensuite, poursuit-il, lorsqu’on regarde le crédit que la RDC a obtenu du trésor français de 50 millions d’euros pour 30.000 lampadaires, cela donne à l’unité le prix de 1.667 euros. Ce qui correspond au prix présenté par le prestataire si on arrondit. « Il n’y a donc pas tricherie sur le prix », insiste-t-il.

Curieusement, le Chef de l’Etat ne fait aucun reproche à Jules Alingete sur le fait qu’il n’a pas obéi à l’instruction qu’il lui a transmise par le biais de Nicolas Kazadi depuis le Brésil, celle de libérer les lampadaires pour qu’ils soient installés avant les élections. L’IGF-chef de service se croit donc pousser des ailes.

Le lendemain, le Ministre des Finances s’enquiert auprès de M. Bathily qui confirme le prix et lui envoie une lettre du fournisseur. A son tour, il transmet cette lettre en annexe d’un courrier qu’il adresse à Jules Alingete dans lequel il lui demande quel intérêt il a pour mentir de la sorte.

A propos de la supposée surfacturation, on peut se demander si l’affirmation de Jules Alingete tient la route. En épluchant les dossiers de l’Hôtel de Ville, il apparaît que ce sont au total quatre entreprises qui avaient gagné le marché d’éclairage public à Kinshasa. Nous allons comparer deux de ces soumissionnaires : Solektra et Proton.

Solektra présente une offre avec des panneaux de 80W, /13.120 lumens ; des panneaux solaires de 270 Wc ; des batteries de 26,6v/33Ah, soit 845 Wh ; le tout pour un éclairage maximal de 60 lux. Par contre, Proton fait une offre avec des panneaux de 74W/8000 lumens ; des panneaux solaires de 80Wc ; des batteries de 12,8v/24Ah, soit 307Wh ; le tout pour un éclairage maximal de 30 lux. Qualitativement parlant, l’offre de Solektra est de loin meilleure que celle de Proton, pour un rendement deux fois supérieur. Pourtant, le coût unitaire des lampadaires de Proton est de 6.147,99 USD, de loin supérieur à celui de Solektra qui n’est que de 4.936,62 USD.

Les Kinois peuvent donc apprécier le rendement des deux sociétés, avec les lampadaires de Solektra sur l’avenue Elengesa où la lumière est impeccable la nuit, avec les lampadaires de Proton sur l’avenue Shaba. Mais alors, pourquoi Jules Alingete n’a pas parlé de surfacturation à propos du marché accordé à Proton ? Bonne question ! Et pour cause : Proton appartient au groupe Rawji.

En violation de la loi qui régit le corps des inspecteurs des finances, Jules Alingete détient un cabinet fiduciaire privé, D.A. Consulting Office (D.A.C.O Sarl), qui est géré par son épouse, ce qui le met en position litigieuse au regard de sa fonction. Or, le groupe Rawji est le principal client de DACO Sarl pour ses travaux d’expertise comptable. Ceci explique donc cela.

Belhar Mbuyi (Finance-cd.com) et Olivier Kaforo (Chronik’ Eco)

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