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La crise de gouvernance locale dans la commune de Gombe : éclairages sur la destitution du bourgmestre et ses implications

Par La Prospérité
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(Par le Docteur David Menge, Conseiller municipal honoraire, Ivry-France)

Dans son édition du 6 juin 2025, le journal « La Prospérité » a rapporté que les conseillers communaux de la commune de la Gombe ont décidé d’intenter une action en justice contre leur bourgmestre, Monsieur Léopold Manzabi, car il aurait refusé de se conformer à la décision du conseil communal l’enjoignant de démissionner de ses fonctions pour un motif non communiqué.

En contexte de cette crise politique opposant l’organe délibérant élu à l’exécutif nommé, je vais essayer d’apporter un éclairage sur la procédure engagée par le conseil communal pour destituer le bourgmestre. Je tiens à rappeler d’emblée que je ne connais personne au sein de cet organe délibérant, ni le Chef de l’exécutif démis de ses fonctions, et que je ne prends donc pas position dans cette affaire.

Je me baserai uniquement sur l’analyse des faits rapportés dans le journal « La Prospérité », étant donné que je ne dispose pas, par ailleurs, d’éléments me permettant de me prononcer sur le fond du dossier.

Depuis les élections du 20 décembre 2023, les villes et communes sont dotées de conseils urbains et communaux. Cependant, leurs exécutifs n’ont pas encore été élus, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) n’ayant pas finalisé le cycle électoral. En conséquence, dans ces entités territoriales décentralisées (ETD), coexistent des organes délibérants élus et un collège exécutif nommé, dont le chef est un bourgmestre désigné par l’autorité provinciale, conformément au statut des villes et communes établi en 1957, qui reste en vigueur aujourd’hui.

Un problème majeur qui complique la gouvernance locale démocratique réside dans la coexistence d’un organe délibérant élu et d’un exécutif nommé. En effet, les conseillers municipaux tirent leur légitimité du vote populaire, tandis que le bourgmestre est nommé par une autorité extérieure. Ce dernier n’a aucune obligation de rendre compte devant le conseil municipal, mais uniquement à l’autorité qui l’a nommé. D’où mon incompréhension concernant la procédure engagée par le conseil communal.

 L’absence d’un cadre juridique clair et le manque d’organisation des élections locales par la CENI ont conduit le conseil à engager une procédure complexe pour destituer le bourgmestre nommé, dans l’espoir de le remplacer par un bourgmestre élu par le conseil lui-même, dont la légitimité ne ferait aucun doute, conformément à la loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008, qui régit la composition et le fonctionnement des entités territoriales décentralisées. Malheureusement, cette décision de l’organe délibérant est illégale, car il n’a pas les prérogatives d’organiser les élections de l’exécutif communal sans la présence de la CENI ni de destituer un exécutif nommé.

Face à cette situation, cette initiative semble peu réaliste, notamment en raison du problème de hiérarchisation des pouvoirs. Pour que cette démarche puisse aboutir, je recommande aux conseillers élus de faire pression sur leur ministère de tutelle afin d’obtenir l’autorisation d’organiser l’élection de leur exécutif sans passer par la CENI, en dérogeant à certains articles de la loi organique (Art. 12, 30 et 31).

Il serait également crucial que tout candidat au poste de maire ou de bourgmestre provienne du sein du conseil, ce qui nécessite une majorité au sein du gouvernement local. Par ailleurs, les échevins, actuellement nommés par le maire ou le bourgmestre, devraient être élus directement par le conseil communal ou urbain. C’est la seule manière d’assurer une gouvernance locale plus stable et démocratique.

Enfin, j’appelle les élus locaux, qui ont reçu un mandat des citoyens, à faire preuve de plus de responsabilité dans la gestion de leurs communes. Les espaces de débat, tels que le conseil communal ou urbain, doivent être des lieux d’échanges constructifs, au service de l’intérêt de leurs concitoyens, et non des terrains de règlements de comptes.

Qu’ils soient issus de la majorité ou de l’opposition, les élus doivent faire preuve de respect lors des discussions afin de favoriser un dialogue productif. Le débat permet d’échanger des points de vue, d’écouter différentes opinions, et de faire émerger des idées nouvelles pour le bien de la collectivité.

Ce différend soulève également une autre question majeure : devient-on élu uniquement pour faire une carrière politique ? Je pense que la vocation politique doit avant tout être motivée par le désir de servir la communauté, de défendre des valeurs contribuant à un meilleur « vivre-ensemble » et d’apporter des changements positifs dans la société pour laquelle on s’engage.

La politique ne devrait pas être simplement une voie vers le pouvoir pour le pouvoir ou pour faire carrière, mais un engagement sincère en faveur du bien commun. Si certains y voient une opportunité d’évolution professionnelle et d’accomplissement social, il est essentiel de rappeler que l’engagement politique doit avant tout viser à faire une différence pour la société.

Par ailleurs, la démarche de destitution du bourgmestre de la commune de la Gombe illustre l’impérieuse nécessité pour l’Etat congolais voire les partis politiques d’où les candidats sont issus de mieux former tous les élus communaux ou urbains aux spécificités de la gestion d’une ville ou d’une commune, ainsi qu’à la connaissance des lois.

Dans cette optique, un livre sera publié dans les semaines à venir pour accompagner cette démarche.

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