(Par le Professeur Patience Kabamba)
Le sujet que nous abordons aujourd’hui dans ce MDW est très sensible. En effet, prendre position contre l’homosexualité peut rendre une personne homophobe, tandis que soutenir cette orientation sexuelle peut entraîner des critiques, notamment en Afrique. La loi ougandaise contre l’homosexualité, adoptée en 2023, prévoit des sévères sanctions, dont la possibilité de la peine de mort dans certains cas. Cette loi reste encore en vigueur. Au Congo, les relations homosexuelles ne sont pas nécessairement punies par la loi, mais des lois sur la morale peuvent être utilisées contre les personnes homosexuelles. On peut facilement penser que, pour beaucoup en Afrique, l’homosexualité est perçue comme étrangère à notre culture. En tant qu’anthropologue africain, je dois admettre que le comportement homosexuel existe bel et bien sur le continent.
Certaines écritures mentionnent le « jardin secret », un lieu où de l’homosexualité féminine pourrait être présente, notamment dans les internats ou les couvents. Le phénomène des « carines », une forme de parrainage féminin dans certains milieux scolaires, est en réalité une forme d’homosexualité que nombreux enseignants et supérieures religieuses connaissent sans le dire. Dans les milieux islamiques du Caire, l’homosexualité masculine est souvent cachée, même si elle existe. Bien qu’aucun verset du Coran n’aborde l’homosexualité, les écoles traditionnelles islamiques la condamnent clairement. Toutefois, il y a des gays et des lesbiennes dans le monde arabo-musulman.
Ce MDW ne vise pas à porter un jugement, mais à analyser ce phénomène de manière conceptuelle. Il est difficile de parler de l’homosexualité calmement, que ce soit à la maison, à l’école ou à l’église. L’onanisme est un phénomène historique qui exige une réflexion phénoménologique et conceptuelle. Les MDW sont des occasions pour inviter chacun à poursuivre ses recherches.
Histoire
La reproduction des espèces a toujours suivi la norme de l’hétérosexualité. Cependant, depuis longtemps, des comportements homosexuels ont existé en dehors de cette norme. On peut aussi observer cela chez les primates. L’homosexualité n’appartient pas naturellement au comportement lié à la reproduction dans un groupe.
Elle se développe surtout avec l’avancement de la civilisation, notamment grâce aux effets de l’accumulation spectaculaire des richesses dans les villes. L’homosexualité est un phénomène urbain, mais les villages n’en sont pas totalement exclus. La Grèce antique, avec son urbanisation et son mythe du guerrier narcissique, a connu non seulement une réalité homosexuelle, mais aussi une esthétique artistique profondément influencée par l’homosexualité.
La Rome de la décadence a aussi connu une homosexualité très présente. Aujourd’hui encore, il y a plus d’homosexuels en ville que dans les campagnes. Il y a une certaine relation entre le comportement homosexuel et l’organisation sociale et historique de cette manifestation. Plus la civilisation est urbaine, plus la grande ville, cette scène théâtrale du narcissisme triomphant, devient un spectacle de la démocratie en mouvement, montrant nos déchéances existentielles, nos angoisses et nos ruptures avec l’histoire, en nous faisant tourner en rond.
L’homosexualité se propage aussi en raison du manque de communication radicale avec l’hétérosexualité, cette dernière étant subversive, jouissive et radicale. Sur le plan historique, aujourd’hui l’homosexualité n’est pas seulement acceptée, mais exacerbée. Dans certains milieux, elle est même valorisée à un niveau supérieur, jusqu’à devenir une valeur suprême. Dans sa forme actuelle, industrielle et de diffusion de masse, l’homosexualité correspond à la forme la plus élevée du narcissisme de la marchandise. Comme le soulignait Marx, l’étape la plus avancée de la domination de la marchandise est la machinerie mécanique du narcissisme industriel infini et sans limites. Les transgenres et les autres marquent le degré le plus haut de ce narcissisme machinique.
En réalité, les homosexuels ne se sont pas revendiqués comme spécifiques avant que ne soit atteint le niveau supérieur de l’autonomisation du fétichisme de la marchandise, jusqu’à l’essence industrielle.
Les homosexuels étaient marginalisés et cachaient leur identité avant. Aujourd’hui, nous sommes arrivés à ce moment suprême où plus il n’y a plus de naturalité, il n’y a que l’essence individuelle narcissique. L’homosexualité est aujourd’hui devenue une norme dans la valorisation du spectacle qui désengage. Dans le domaine de la sexualité mécanique, l’homosexualité est valorisée car il existe un lien entre la logique capitaliste et l’accumulation du narcissisme.
Analyse conceptuelle de l’homosexualité
L’homosexuel est défini par sa manière de se rapporter à l’autre. Il se rapporte à l’autre qui est du même genre. Dans le Manuscrit de 1844, Marx explique que le rapport le plus naturel entre les humains est celui entre un homme et une femme (Cousin 2010). Une véritable altérité ne peut naître d’un rapport onaniste ou homosexuel. Une vraie altérité est un acte d’amour, une relation profonde ; c’est une altérité qui ne se réduit pas à soi-même. La relation sexuelle homosexuelle se base sur le fait que celui qui est en contact avec l’autre reste en contact avec lui-même. C’est par l’homosexualité que l’on devient un autre soi-même.
En revanche, la relation entre un homme et une femme est une relation d’altérité profonde, de complémentarité totale basée sur une différence fondamentale. En même temps que cette relation peut engendrer la reproduction de l’espèce, elle est aussi une forme d’harmonie supérieure ; une harmonie qui relie des différences.
La relation homosexuelle, quant à elle, est une relation entre deux êtres identiques. Ce qui fonde cette relation, c’est une relation narcissique avec soi-même, où l’autre n’est qu’un reflet de soi, une dérivation de soi-même. Nos deux sexes sont égaux : dans une relation homosexuelle, c’est le même qui se mêle à lui-même.
Conclusion
Le sexe, autrefois source de merveille, de tendresse et de complicité, se désillusionne sous l’emprise de la machinerie capitaliste du sexe mécanique. Le sexe mécanique de l’homosexualité est une forme de désespoir et d’abandon. Le taux de suicide dans les milieux transsexuels est très élevé. Par l’homosexualité, on construit une humanité déshumanisée, machinique ; c’est la victoire totale de l’absurdité du marché. Plus une société est touchée par cette détresse intérieure, cette pauvreté infinie causée par l’industrie de la sexualisation marchande, plus elle a besoin de s’afficher, de s’exhiber et de danser. La fête, disait Hegel, est le désespoir infini d’un aveu terrible. Dans cette sexualité mise en scène, on retrouve une sexualité triste, glauque, et sale, qui est en fait une nouvelle forme de médicament pour l’esprit. La lutte de classe radicale pour reprendre le sens de la communauté n’est pas une idée. C’est une évidence de nos liens subversifs pour abolir la marchandise. Le projet du capital est que l’homme doit devenir un produit désirant, parfait sur le marché du désir, une épave du grand marketing du profit. Le sexe doit retrouver son essence de sexe révolutionnaire, celui des orgasmes sans fin et pleins de joie qui résistent à la marchandisation de l’homme. L’homosexualité va dans l’autre sens. L’excès de sexualité des homosexuels est, en réalité, une forme de sexualité mécanique et destructrice du vrai sexe, celui qui apporte du plaisir et de la liberté.