(Par Eugène Diomi Ndongala, Président de la Démocratie Chrétienne, ‘’DC’’)
Horrifié par un rapport accablant du Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU, documentant le massacre de 319 civils – dont 48 femmes et 19 enfants – perpétré entre le 9 et le 21 juillet dans le territoire de Rutshuru au Nord-Kivu, je dénonce une violence féroce qui continue de frapper le peuple congolais, en plein processus de paix !
Attribués aux rebelles de l’Alliance Fleuve Congo/M23, soutenus par le Rwanda, et aux Forces de Défense Rwandaises, ces actes odieux ne sont pas des anomalies isolées, mais le symptôme d’un conflit qui défie toutes les tentatives de résolution. Et tandis que les accords de Washington et de Doha, que nous avions salués comme « un espoir pour la paix », peinent à masquer leur impuissance, la violence reprend de plus belle, semant la mort et la désolation au Sud-Kivu, où plus de 80 civils ont été fauchés ces dernières semaines.
L’accord de Washington, signé le 27 juin 2025 entre Kinshasa et Kigali sous médiation américaine, promettait une coordination sécuritaire pour enrayer les hostilités.
Une réunion inaugurale du comité de supervision conjoint a même eu lieu début août, avec des engagements formels à implémenter la résolution 2773 du Conseil de Sécurité de l’ONU. De son côté, la Déclaration de principes de Doha, conclue le 19 juillet entre la RDC et l’AFC/M23, fixait un calendrier ambitieux : reprise des pourparlers au plus tard le 8 août, en vue d’un accord global le 17 août. Pourtant, au 12 août 2025, ces dates butoirs sont passées comme des mirages dans le désert sécuritaire congolais.
La diplomatie quant à elle, se tait, alors que les dernières nouvelles sur l’intense coopération militaire entre le Qatar (médiateur dans le conflit RDC-Rwanda) et le Rwanda, nous étonnent et nous inquiètent.
Aucune reprise significative des négociations n’a été rapportée, et les « mesures de confiance » – cessez-le-feu permanent, désengagement des forces – restent lettre morte.
Kinshasa refuse des concessions à l’M23 (dont la libération des prisonniers), qui contrôle de facto des pans entiers de l’est, tandis que Kigali nie farouchement toute implication, se cachant derrière son négationnisme habituel et réduisant les graves accusations de l’ONU contenues dans son dernier rapport des experts sur la RDC ainsi que celles sur les récents massacres, à des « allégations sensationnelles », sabotant, de facto, les processus de paix en cours. Sur le terrain, la réalité est un affront cinglant aux promesses des diplomates.
Malgré les engagements de Doha, les combats ont repris avec fureur depuis le 9 août au Sud-Kivu, dans les territoires de Walungu et Mwenga. L’M23, loin de se retirer, avance inexorablement : affrontements intenses autour de Mulamba, où les rebelles s’opposent aux milices Wazalendo alliées à Kinshasa, et dans le secteur d’Itombwe. Ces clashes ont déjà coûté la vie à des dizaines de civils, portant le bilan à plus de 80 morts dans des attaques liées depuis début août.
Au Nord-Kivu, les échos du massacre de juillet résonnent encore, avec 319 vies arrachées en à peine deux semaines – un des bilans les plus effroyables documentés par l’ONU depuis l’escalade du conflit.
Ces atrocités ne sont pas des accidents ; elles illustrent l’expansion méthodique de l’M23, qui défie ouvertement les accords en alertant sur des « violations du cessez-le-feu » par les forces gouvernementales.
Les espoirs placés dans les cessez-le-feu de Washington et Doha se révèlent n’être qu’un somnifère pour la vigilance internationale, laissant le champ libre aux agresseurs pendant que Kinshasa s’embourbe dans des « tâtonnements sans fin », aussi bien en politique intérieur qu’en diplomatie.
La RDC, paralysée par des intérêts partisans, semble incapable de transcender ses divisions pour contrer ce projet d’extermination et de balkanisation. Plus de 100 groupes armés pullulent dans l’est, et les efforts d’intégration militaire prévus par l’accord de Washington – désarmement, réintégration – butent sur un refus catégorique de concessions. L’ONU, quant à elle, est pointée du doigt pour son échec chronique à protéger les civils, avec la MONUSCO accusée de passivité face à une crise humanitaire qui a déplacé plus de 7 millions de personnes, abandonnées à leur triste sort.
Ces évolutions récentes – une réunion symbolique par ici, un délai dépassé par là – ne font que souligner l’abîme entre les salons diplomatiques et les charniers du Kivu.
Combien de Congolais devront encore être tués, en plein processus de paix ?
Il est temps pour la classe politique de Kinshasa de se dresser en rempart, au risque de voir le pays sombrer dans une fragmentation irrémédiable. Sinon, les accords de Washington et Doha ne seront qu’un chapitre de plus dans l’histoire tragique d’une paix promise et jamais gagnée, par manque d’unité, stratégie et de volonté politique.