La déclaration du Président de la République, Félix Tshisekedi, à l’occasion du Forum Global Gateway à Bruxelles, où il a publiquement tendu la main à son homologue rwandais Paul Kagame pour une « paix des braves », continue de faire l’objet d’analyses approfondies. L’émission Kiosqu’Eco diffusée le lundi 13 octobre 2025, a réuni des professionnels de médias experts en la matière, pour décortiquer ce geste qui, loin d’être un signe de faiblesse, est perçu comme une manœuvre stratégique majeure, dictée par l’impératif économique et le repositionnement géopolitique de la RDC.
Pour les analystes, la démarche du Chef de l’Etat s’inscrit dans une logique implacable : toute guerre, même la plus longue, se termine par des négociations. Bienvenu-Marie Bakumanya a souligné que le Président Tshisekedi a pris de l’avance en proposant cette issue.
« Même si on sait faire la guerre, ça se termine toujours autour d’une table de négociation, » a-t-il affirmé. Selon lui, la proposition de coopération du Président à l’endroit du Rwanda a toujours été « purement économique. » L’objectif est de mettre fin à la prédation et au pillage qui s’accompagne des massacres des populations qui durent depuis trois décennies. En proposant de se mettre dans les affaires ensemble et d’exploiter les matières premières conjointement, la main tendue prend une « connotation éminemment économique. »
Le choix du lieu pour cette déclaration, le Forum Global Gateway, initiative européenne visant à mobiliser plus de 300 milliards de dollars d’investissements mondiaux, dont 150 milliards pour l’Afrique, n’est pas anodin. Amédée Mwarabu a insisté sur le contexte stratégique.
« Global Gateway est un forum où le Président était devant les partenaires économiques stratégiques. Or, pour faire les affaires, la RDC doit être en paix, » a-t-il expliqué. C’est dans ce cadre que se justifie la déclaration faite en présence de Paul Kagame. Dès son avènement, le Président Tshisekedi avait proposé des partenariats économiques au Rwanda, opportunités que Kigali avait préférées ignorer au profit de la poursuite du pillage.
Eric Izami a renchéri sur cette nécessité économique : « Il y a présenté la condition sine qua non pour que les investisseurs viennent faire des affaires en RDC. Ce n’est pas une faiblesse, car personne ne peut accepter venir investir dans un pays où les balles résonnent à longueur des journées. » La paix est donc la porte d’entrée vers la prospérité attendue par la RDC.
La posture diplomatique comme monnaie d’échange
L’argument selon lequel cette main tendue pourrait être interprétée comme une faiblesse a été fermement réfuté par les experts, notamment par Gardy Diana, qui y voit plutôt une démonstration de sérénité et de force diplomatique.
Le Président Tshisekedi, en se présentant à Bruxelles, était sur un terrain de prédilection après avoir réussi à obtenir des sanctions européennes contre le Rwanda, lesquelles ont déjà affecté l’économie de Kigali.
« Je ne sais pas à quel moment cette main tendue est devenue une faiblesse, » a déclaré Gardy Diana. « Il était prêt à ne pas faire un lobbying pour d’autres sanctions à condition que le Rwanda manifeste sa bonne foi. »
La déclaration de paix devient ainsi une monnaie d’échange. » Tshisekedi offre une porte de sortie à Kagame, lui permettant d’éviter une escalade de pressions internationales tout en exigeant l’arrêt immédiat de l’agression. La sérénité du Chef de l’État congolais réside dans le fait qu’il détient la capacité d’obtenir davantage de sanctions, mais choisit de s’arrêter pour privilégier une paix de braves’’, a-t-il affirmé.
‘’Les experts ont également fait la distinction entre des déclarations belliqueuses et des positions belliqueuses. Le Président n’a jamais convoqué le Parlement pour une déclaration de guerre, ce qui démontre que sa démarche est fondamentalement orientée vers une résolution politique et économique, et non militaire’’.
Nathan Mundele