(Le rappeur belgo-congolais, William Kalubi Mwamba ‘‘Damso’’)
Une lettre ouverte décryptant la situation socio-économique-politique, le système judiciaire, éducatif et la jeunesse en République démocratique du Congo (RDC) a été adressée au président Félix Antoine Tshisekedi par un artiste congolais de Belgique qui l’a publié sur son compte officiel consulté dimanche par votre journal. « Excellence Monsieur le Président, je vous écris non pas en adversaire, ni en opposant par posture mais en fils de la République, en témoin du désastre, en membre d’une diaspora qui porte dans sa chair la honte, la colère et la douleur de voir son pays trahi non par ses ennemis mais par ceux qui avaient juré de le servir », a précisé le célèbre rappeur William Mwamba connu sous le nom de Damso.
« Je vous écris au nom de cette jeunesse dispersée, éparpillée, qui aime encore le Congo malgré la distance, qui rêve encore d’un pays digne, debout, souverain mais qui se réveille chaque jour dans la désillusion d’une nation riche mais pillée, vaste mais abandonnée, béni par Dieu mais maudit par la corruption des hommes », a-t-il ajouté.
Etat de droit : où en sommes-nous ?
Concernant la justice, Damso est revenu sur les différentes promesses faites par le chef de l’Etat Félix Tshisekedi pour redresser le fonctionnement de l’appareil judiciaire.
« Vous aviez promis un État de droit mais la justice est devenue un marché. Elle ne juge plus, elle négocie. Elle protège les puissants et écrase les pauvres. Nos prisons sont pleines de voleurs de pain, tandis que les voleurs du pays écrivent les lois », a-t-il constaté.
Et de poursuivre : « Vous aviez promis la fin de la corruption. Mais elle n’a jamais été aussi visible et aussi arrogante. Elle a changé de costume mais pas de visage. Elle siège dans les ministères, signe les décrets et se cache derrière les alliances politiques. Pendant ce temps, le peuple crie et personne ne répond ».
Dans son message, cet artiste de 33 ans a dénoncé aussi l’agression injuste de la RDC par le Rwanda et ses supplétifs terroristes du M 23 qui continue à semer la désolation dans la partie Est du pays. « Pendant que les discours se multiplient à Kinshasa, les bombes tombent sur Goma, Beni et Ituri. Des familles entières disparaissent, des femmes enterrent leurs enfants dans le silence. Nos frontières sont ouvertes comme nos plaies. Le sang de l’Est est devenu une marchandise et la souffrance un fonds de commerce », a-t-on lu.
Gratuité de l’école : Damso salue la vision du président
Sur le plan éducatif, Damso a salué l’engagement de Félix Tshisekedi pour l’effectivité de la gratuité de l’enseignement, tout en interpellant sur la motivation des enseignants et des infrastructures scolaires.
« La gratuité de l’école fut un bel espoir mais sans enseignants payés, sans encadrement ni respect du corps enseignant, elle n’a produit qu’illusions et désordre. Nos enfants apprennent dans des conditions indignes. Un État qui méprise l’éducation compromet son avenir et celui de son peuple », a-t-il dit.
Parlant de la situation économique, le rappeur a mis un accent sur les différents indicateurs qui parlent de croissance alors que le peuple Congolais survit avec moins de deux dollars par jour. « Les rapports parlent de la croissance pendant que les ressources nationales enrichissent d’autres nations. Le pays est riche mais l’État est pauvre. L’État, c’est le peuple », a-t-il martelé.
Et de renchérir : « Le Congo n’a plus besoin de promesses. Il a besoin d’une gouvernance honnête, juste et déterminée. Il est encore temps de redonner foi au peuple avant que l’espoir ne se taise à jamais ».
Quid de la gestion de la santé publique ?
Au sujet de la santé, la star d’origine congolaise a déploré le fonctionnement archaïque du système sanitaire dans un pays où certains hôpitaux publics fonctionnent encore à la bougie à cause du manque de l’électricité malgré ses potentialités hydrauliques et sous-sol inestimables.
« Le Congo fait avancer le monde par ses richesses mais n’a pas les moyens de soigner ses propres enfants. Les budgets de santé disparaissent dans des poches sans conscience. Celui qui vole l’argent des malades ne trahit pas seulement l’État, il trahit la vie elle-même », a-t-il regretté.
« Ce message n’est pas une insulte, bien au contraire. Je n’écris pas avec haine mais avec la douleur de celui qui a trop cru et qui espère encore voir son pays natal se relever », a conclu le rappeur Damso.
Né le 10 mai 1992 à Kinshasa, capitale de la RDC des parents congolais, Damso, de son vrai nom, William Kalubi Mwamba, est arrivé à l’âge de dix ans en Belgique où il a commencé sa carrière musicale en 2006.
Avec son style du rap français et urbain, l’artiste est classé parmi les cinq meilleures voix du rap francophone venue de la diaspora congolaise qui contrôle la scène européenne et africaine.Jordache Diala
