«Je peux prendre le risque de vous dire qu’enfin, on y est ! Nous avons en nos mains un instrument qui sera l’une des meilleures lois types de notre parlement parce qu’elle n’a pas été formatée dans des bureaux climatisés. Elle est le résultat d’un travail participatif commun. Et comme vous le savez, son élaboration a commencé il y a dix ans par le Centre de recherche sud-africain appelé Programme pour le développement de l’Etat de droit (DROP) avec l’appui de la coopération allemande. Ces recherches ont permis de consulter une vingtaine de pays couvrant ainsi l’ensemble du continent en ce compris les pays insulaires. »
C’est le contentement exprimé par le Député national congolais Garry Sakata Tawab sur la tribune du Parlement Panafricain (PAP) lors de la séance plénière du mercredi 6 novembre 2025 qui était conduite par le Quatrième Vice-président, le Tchadien Djidda Mamar Mahamat. Il a aussi fait un clin d’œil à la coopération allemande pour son accompagnement. C’est dans sa casquette de Président de la Commission permanente de l’économie rurale et de l’agriculture, des ressources naturelles et de l’environnement au PAP que ce parlementaire congolais a piloté l’architecture du projet de loi sur la gestion des sols en Afrique.
Dans son intervention, l’honorable Sakata a souligné que certains pays ont fait l’objet d’une analyse plus approfondie. Il s’agit de : en Afrique de l’Est : Kenya, Ouganda ; en Afrique australe : Afrique du sud, Zambie, Namibie, Mozambique ; en Afrique Centrale : Cameroun ; en Afrique de l’Ouest : Ghana, Burkina Faso ; en Afrique du Nord : Maroc ; Pays insulaires : Madagascar. Mais au préalable, autrement dit avant les consultations régionales, la Commission Sakata avait déjà rencontré les parlementaires kenyans à Nairobi, les chercheurs ougandais, sud-africains, égyptiens pour requérir leurs expériences sur la question. Ces consultations sont consécutives à l’adoption par le PAP, en date du 30 juillet 2025, du projet de loi type sur la gestion des sols en Afrique en première lecture. C’était au cours de la cinquième session ordinaire.
Pourquoi la loi type sur la gestion des sols ?
Le Président de la Commission considère la loi type sur la gestion du sol comme une soupape de sécurité en faveur des populations pauvres souvent paysannes contre les politiques actuelles d’accaparement de terre.
«Le projet de loi instaure un équilibre et prône la durabilité. L’élaboration de cette loi type part du constat selon lequel en Afrique, la gestion du sol se fait sans affectation préalable dans la plupart des pays. A cet effet, les affectations se superposent et se contredisent annihilant ainsi tout effet de développement durable. Par exemple, tout peut être érigé en zone d’habitat. Parfois ce sont les mines ou les hydrocarbures qui chassent les espaces réservées à l’agriculture ou à toute autre activité. », explique-t-il à ses collègues du PAP.
Et de poursuivre : « Comme la gestion du sol est intersectorielle et multifactorielle, cette loi :
– établit d’une part, un cadre qui favorise la gestion durable des sols, en reconnaissant leur rôle essentiel pour assurer la sécurité alimentaire et la résilience face au changement climatique. Notre parlement a donc compris la nécessité d’adopter dans un même package le tryptique : sécurité alimentaire et nutritionnelle (2022) ; changements climatiques et la gestion durable du sol.
– dans un second temps, facilite les stratégies de conservation, de restauration, d’amélioration de la fertilité et de la productivité des sols. Elle vise également à lutter contre la dégradation des sols.
Parmi les spécificités africaines, le projet de loi type reconnaît les valeurs des connaissances locales, des pratiques traditionnelles et du rôle essentiel des chefs coutumiers dans la gestion durable des sols.
Dans la même optique, le projet de loi reflète la diversité juridique de l’Afrique en intégrant les systèmes de connaissances scientifiques et traditionnelles africaines sans rejeter forcément les systèmes juridiques issues des cultures swahiliphones, arabophones, lusophones, francophones et anglophones. Il s’agit ici d’un projet de loi équilibré. »
Adoption à l’unanimité
Ce projet de loi type qui comporte 9 parties subdivisées en 42 articles a été adopté à l’unanimité lors de l’assemblée plénière du novembre dernier. Lors du débat, plusieurs intervenants ont salué la qualité du travail réalisé sous la houlette du Congolais Garry Sakata Tawab. C’était le premier point inscrit à l’ordre du jour. Cette séance plénière s’est poursuivie par le débat sur le second point relatif au projet de loi-type sur la mise en œuvre des décisions rendues par les organes africains de droit de l’homme.
Il sied de rappeler que le chef de la délégation congolaise à ces assises, le Rapporteur de l’Assemblée nationale, Jacques Djoli Eseng’Ekeli, s’attelant aux préparatifs de l’élection tant attendue des deux membres du Bureau (Président et Rapporteur adjoint), a été précédé au pays de Mandela par les autres membres de la délégation parlementaire panafricaine pour le compte de la RDC dont les députés nationaux Garry Sakata Tawab et Marie-Thérèse Wangoie Mukalay.
Dans cette même délégation congolaise, il y avait les Sénateurs Alphonse Ngoyi Kasanji et Christine Mwando. La délégation a été assistée par les personnels administratifs et politiques, notamment Le Conseiller Principal au Bureau d’études de l’Assemblée nationale de la RD Congo et Secrétaire administratif auprès du Parlement Panafricain, Paul Ngendjabolo Wooto et Aaron Djengo, secrétaire particulier de l’honorable Rapporteur, qui ont marqué leurs présences. Dans son interview accordée à l’envoyé spécial de l’Assemblée nationale de la RDC, Garry Sakata a placé un mot sur l’agenda de son chef de délégation, le Professeur Jacques Djoli, dont l’arrivée en Afrique du Sud serait imminente.
Chaque année, le PAP tient quatre sessions ordinaires. Pour celle-ci, la rentrée parlementaire, la cérémonie inaugurale, avait eu lieu le lundi 3 novembre 2025 et la clôture de cette sixième session ordinaire du PAP interviendra le vendredi 14 novembre prochain toujours ici à Midrand, magnifique ville située entre Johannesburg et Pretoria.
James Mpunga Yende / Envoyé spécial à Midrand – South Africa