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Une mise au point à propos de la naissance et du fondateur de la théologie chrétienne africaine

Par La Prospérité
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Qui peut établir l’acte de naissance de la théologie chrétienne africaine? Et qui pourrait légitimement revendiquer le titre de fondateur de cette théologie? La théologie chrétienne africaine ne saurait être dite née avec Alioune Diop, ni avec le débat kinois opposant Tharcisse Tshibangu Tshishiku à Alfred Vanneste, ni même avec le Discours théologique négro-africain d’Oscar Bimwenyi Kweshi, qui en constitue pourtant une étape décisive, selon Tharcisse Tshibangu qui a préfacé ce livre-phare. En réalité, la théologie chrétienne africaine naît avec l’apparition même de la première communauté chrétienne africaine. Comme le souligne Oscar Bimwenyi Kweshi, toute communauté chrétienne, dès son surgissement, porte déjà en elle une réflexion théologique implicite. Le théologien formé n’est alors qu’une accoucheuse: il explicite, structure et organise un discours latent dont sa communauté est déjà enceinte. Ainsi, le premier théologien chrétien africain coïncide avec le premier baptisé africain et la première communauté chrétienne africaine.

Les théologiens tels qu’Alioune Diop, Tharcisse Tshibangu Tshishiku, Alphonse Ngindu Mushete, Oscar Bimwenyi Kweshi, Barthélémy Adoukonou, Ebga, Jean-Marc Ela,  pour ne citer que ceux-là, sont les héritiers et les continuateurs, chacun selon ses charismes intellectuels, de cette longue tradition chrétienne africaine remontant au premier baptême et à la naissance de la première communauté ecclésiale sur le sol africain.

Le théologien chrétien, dès lors, ne peut être tenu pour fondateur d’une théologie chrétienne. Il n’est qu’une bouche réquisitionnée par la Sainte Trinité afin de parler en son nom et en celui de l’Église. Selon Bimwenyi Kweshi, le théologien est un évangélisateur qualifié, animé par l’Esprit Saint, chargé de dire les choses de Dieu aux hommes de son temps, tout en présentant à Dieu les questions, détresses et espérances des hommes. Il est donc médiateur, prophète et mystique, toujours relié à Dieu et à sa communauté, dont il est la bouche autorisée, le porte-parole et l’interprète.

Le véritable fondateur de la théologie chrétienne africaine, c’est Dieu lui-même, qui communique sa volonté aux Africains à travers l’Église et ses théologiens. C’est au sein de la communauté chrétienne africaine que Dieu appelle certaines femmes et certains hommes à devenir théologiens, c’est-à-dire des intelligences éclairées par l’Esprit pour scruter, expliciter et communiquer la Révélation chrétienne, dont le cœur est le mystère du Dieu trinitaire.

La théologie chrétienne africaine appartient donc à l’Église chrétienne africaine, dont le fondateur est Dieu un et trine. Le théologien africain n’est, au fond, qu’un baptisé, fils de Dieu et enfant de l’Église, auquel a été confié le charisme de l’intelligence studieuse au service de Dieu et de la communauté humaine, appelée à la réconciliation avec son Créateur. Il faudrait rappeler que tout baptisé, à sa manière, est un théologien qui s’ignore, et que la théologie chrétienne africaine n’est jamais l’affaire d’un individu isolé, mais celle d’une communauté entière en marche vers l’Improbable.

N’étant pas propriétaire de ce qu’il élabore, comme discours, le théologien soumet au discernement ecclésial tout ce qu’il pense et écrit. D’où la nécessité de l’obéissance, parfois éprouvante, puisqu’elle se heurte à l’incompréhension, à la suspicion ou même à la calomnie, réalités communes à toute communauté humaine, y compris ecclésiale. Le théologien doit alors faire preuve de patience lorsqu’il dit la vérité, car celle-ci finit toujours par triompher. L’incompréhension du présent peut devenir la reconnaissance de demain. Telle est souvent la condition prophétique: “Il est dur d’être prophète, on te lapide”, a dit René Maran.

Il n’en demeure pas moins que la théologie chrétienne africaine contemporaine, en tant que discours scientifique et universitaire, émerge dans les années 1960. L’ouvrage collectif intitulé Des prêtres noirs s’interrogent (1956), publié dans le contexte de la négritude, en constitue le manifeste inaugural. Toutefois, ce moment appartient encore à la théologie de l’adaptation et des «pierres d’attente», c’est-à-dire à la tentative d’africaniser ou d’indigéniser l’Église et la théologie. Oscar Bimwenyi Kweshi s’opposera vigoureusement à cette perspective en affirmant: « la théologie, soit elle est africaine, soit elle ne l’est pas ». On ne peut africaniser une réalité qui l’est déjà dès son surgissement, puisqu’Église et théologie sont, selon lui, des réalités théandriques. Il suffit pour s’en convaincre de relire le chapitre VI du Discours théologique négro-africain.

Prof. Alain Mutela Kongo

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