Lors de son tout récent passage sur les antennes de TV5 Monde, dans la cadre du Journal Afrique, mardi 11 novembre 2025, Patrick Muyaya Katembwe, Ministre de la Communication et médias, est revenu sur la situation sécuritaire dans l’Est de la République Démocratique du Congo, le procès de Roger Lumbala à Paris et les avancées diplomatiques engagées à Washington et Doha.
Sur l’escalade de la violence dans l’Est, le ministre a rappelé que « tous ceux qui commettent des meurtres, tous ceux qui sont responsables des exactions… doivent savoir qu’il y a le temps de la justice qui va finir par arriver ». Il a mis en avant l’ouverture récente, selon lui rendue possible par les efforts du président Félix-Antoine Tshisekedi, d’une commission d’investigation internationale chargée d’établir les faits et d’identifier les responsabilités. Selon Patrick Muyaya, ces mécanismes doivent permettre d’éviter l’impunité et d’assurer que « ces choses ne se reproduisent plus ».
Interrogé sur le procès à venir de Roger Lumbala, jugé à Paris, malgré une demande d’extradition de Kinshasa, le ministre a estimé la situation « un affront », mais a renvoyé la gestion du dossier à son collègue de la Justice, précisant que « le moment venu, on pourra évidemment communiquer ». Il a, néanmoins, rappelé que la justice internationale doit suivre son cours pour les crimes imprescriptibles reprochés à certains acteurs de la crise congolaise.
Sur l’efficacité des processus de paix à Washington et Doha, Patrick Muyaya a tenu à dissocier le volet diplomatique du volet judiciaire : « La rénovation de la justice n’est pas à confondre avec les processus qui se tiennent au plan diplomatique. » Il a assuré que Kinshasa participe activement aux deux démarches, qualifiant les négociations ‘’d’en phase d’atterrissage’’ et exprimant l’espoir d’un aboutissement rapide pour permettre l’acheminement d’une aide humanitaire indispensable aux populations.
À propos des accusations rwandaises selon lesquelles les forces congolaises bombarderaient des positions du M23 et des civils, le porte-parole a répondu avec fermeté : « Ici, il est évident que c’est le Rwanda qui agresse…, nous avons été agressés et c’est établi par tout le rapport. » Il a réaffirmé la posture de Kinshasa en matière de légitime défense et appelé la communauté internationale à examiner « qui gouverne par le crime » sur le terrain avant de porter des accusations.
Enfin, sur les engagements pris, la neutralisation des FDLR, retrait des forces et matériels étrangers et cadre d’intégration économique régionale, Muyaya a souligné que beaucoup de ces avancées sont « sur le papier » mais que des conditions strictes (dont celles prévues dans l’accord du 27 juin) doivent être remplies avant toute mise en œuvre concrète. Il a insisté sur la nécessité d’un double suivi : sécuritaire et économique, pour que la stabilité devienne le socle du développement régional.
Le gouvernement de la République démocratique du Congo réaffirme sa détermination à restaurer l’intégrité territoriale du pays face à la persistance de l’agression dans l’Est, où les dispositifs rebelles demeurent concentrés dans les zones toujours sous occupation. Selon les autorités, la priorité reste de protéger les populations congolaises directement exposées aux violences. « Nous allons traiter cette menace parce que c’est d’abord une menace pour nos propres populations. Plus tard, conformément à l’esprit des accords, ceux qui se trouvent sur notre territoire retourneront au Rwanda, leur pays, afin que les Congolais vivent en paix chez eux », rappelle le porte-parole du gouvernement.
Aéroport de Goma : une réouverture ciblée pour l’aide humanitaire
Alors que des besoins humanitaires urgents se font sentir, la question de la réouverture de l’aéroport de Goma demeure au centre des discussions. Les autorités congolaises précisent que cette décision relève exclusivement de la RDC.
« Si cela ne dépendait pas du gouvernement, il aurait déjà été ouvert », souligne la même source. Un Notam est toujours en vigueur, interdisant les vols vers Goma et Bukavu. Toutefois, des mécanismes sont en préparation pour permettre, en coordination avec les organisations humanitaires, l’autorisation d’un certain nombre de vols afin d’acheminer de l’aide aux populations sinistrées. Les discussions engagées à Paris autour de corridors humanitaires se poursuivent.
Les réfugiés congolais et la lutte contre les discours de haine
Concernant le retour des réfugiés congolais installés au Rwanda, le gouvernement précise que tout sera fondé sur le volontariat et la sécurité retrouvée. « Vous n’allez pas demander à ceux qui sont partis pour des raisons de guerre de revenir dans une région encore sous bombardements », indique Kinshasa, qui affirme ne jamais avoir contesté la nationalité des intéressés. Le gouvernement fustige par ailleurs les prétextes de protection communautaire entretenus par Kigali. « C’est cela même la stigmatisation », dénonce le ministre, rappelant la diversité du pays, plus de 450 ethnies et l’harmonie nationale que Kinshasa entend préserver. Dans les zones sous occupation, les autorités congolaises alertent sur des actes visant à modifier illégalement la propriété foncière : destruction de documents, réattributions de terres et mouvements de populations orchestrés. Une ordonnance gouvernementale en préparation devrait déclarer « nuls et de nul effet » tous les actes posés par les occupants.
Dialogue et paix : la priorité demeure l’arrêt de l’agression
Alors que des voix s’élèvent pour un dialogue politique accéléré, notamment au sein de la société civile, le gouvernement rappelle que la crise est avant tout sécuritaire et trouve son origine dans l’agression venue du Rwanda.
« Le président de la République est un homme de paix », insiste-t-on, rappelant ses initiatives diplomatiques antérieures dans la région. Les discussions en cours dans les processus de Washington et de Doha visent à mettre fin à l’agression afin que les priorités internes, dialogue politique inclus, puissent s’aborder dans un climat apaisé.
Le chef de l’État a déjà manifesté son ouverture en recevant différents acteurs politiques. « Cette guerre n’est pas celle d’un homme. C’est une guerre faite à tous les congolais, et tous doivent se mobiliser », conclut le porte-parole du gouvernement.
La Pros.