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Rentrée judiciaire 2025-2026 lancée devant Félix Tshisekedi, Conseil d’Etat : Brigitte Nsensele repositionne le recours administratif préalable au cœur de la sécurité juridique en RDC

Par La Prospérité
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Hier jeudi 13 novembre 2025, dans la salle abritant les plénières de l’Assemblée Nationale, la rentrée judiciaire du Conseil d’État pour l’exercice 2025-2026 s’est ouverte dans une solennité particulière, marquée par la présence du Président de la République, des membres du Gouvernement, des hauts magistrats, des corps constitués et des représentants diplomatiques. Une affluence institutionnelle qui témoigne de l’importance grandissante de la juridiction administrative dans l’architecture de l’Etat de droit en RDC. Au centre de cette cérémonie, un discours d’une grande profondeur doctrinale a été prononcé par la Première Présidente du Conseil d’Etat, Brigitte Nsensele wa Nsensele. Son intervention, entièrement consacrée au thème du recours administratif préalable, a posé les jalons d’une réflexion fondamentale sur les mécanismes de régulation des rapports entre l’administration et les administrés, dans un contexte national marqué par une judiciarisation croissante des actes publics.

Un mécanisme conçu comme filtre, régulation et outil de pacification administrative

La Première Présidente a rappelé que le recours administratif préalable n’est ni un simple préalable technique, ni une formalité administrative superflue. Il constitue le premier palier de régulation du contentieux administratif et un instrument majeur de résolution amiable des litiges.

Défini comme la procédure par laquelle une personne conteste un acte administratif directement auprès de l’autorité qui l’a pris avant toute saisine du juge, le recours préalable a pour finalité d’offrir à l’administration l’occasion de corriger, réformer ou retirer sa propre décision. Il s’agit d’un mécanisme extrajuridictionnel, ancré dans les principes de loyauté, de subsidiarité du juge administratif et de préservation de la bonne administration.

Ce mécanisme repose sur plusieurs fondements législatifs majeurs : la loi organique n°16/027 du 15 octobre 2016 sur les juridictions de l’ordre administratif, la loi n°16/013 du 15 juillet 2016 portant statut des agents de carrière des services publics de l’État, l’ordonnance-loi n°10/002 du 20 août 2010 portant Code des douanes, et la loi n°10/010 du 27 avril 2010 relative aux marchés publics.

Une obligation juridique dont l’inobservation entraîne l’irrecevabilité automatique des requêtes

Au fil des années, la jurisprudence du Conseil d’État a considérablement précisé les contours du recours préalable. La Première Présidente a souligné que ce recours est obligatoire dans la majorité des contentieux administratifs, sauf exceptions expressément prévues par la loi.

Il s’agit d’un recours personnel, qui ne peut être exercé que par l’intéressé lui-même ou par un mandataire dûment habilité. Introduire une action juridictionnelle sans avoir accompli ce recours ou sans en apporter la preuve constitue un vice substantiel pouvant conduire directement à l’irrecevabilité de la requête.

Plusieurs décisions récentes du Conseil d’État rappellent cette exigence en déclarant irrecevables des recours introduits sans preuve de dépôt, hors délai, ou dépourvus des éléments requis. Cette rigueur jurisprudentielle tend à renforcer la sécurité juridique, la prévisibilité des procédures et la discipline contentieuse dans le rapport administration-administré.

Des délais stricts, structurants et impératifs

La rentrée judiciaire a également été l’occasion pour la Première Présidente de clarifier les délais légaux attachés au recours administratif préalable, qui constituent l’un des aspects les plus techniques et les plus déterminants du mécanisme.

Sauf dérogations prévues par des textes sectoriels, quatre règles structurent ce régime :

  1. Le requérant dispose d’un délai de trois mois, à compter de la publicité ou de la notification de l’acte contesté, pour exercer son recours administratif.
  2. La juridiction administrative est saisie par voie de recours introduit dans les trois mois suivant la décision prise sur le recours administratif.
  3. En cas de rejet exprès, le requérant dispose d’un nouveau délai de trois mois pour saisir le juge administratif.
  4. Le silence de l’administration pendant trois mois vaut rejet implicite, ouvrant également un délai de trois mois pour saisir la juridiction compétente.

La preuve du dépôt — accusé de réception, envoi postal sécurisé ou dépôt par porteur — doit impérativement accompagner la requête juridictionnelle. L’absence de cette preuve conduit à considérer la requête comme prématurée ou forclose.

Une portée transversale dans l’ensemble du contentieux administratif

L’un des apports majeurs du discours réside dans l’analyse de l’étendue du recours administratif préalable, qui s’applique à plusieurs branches du contentieux administratif.

Sur le contentieux d’annulation pour excès de pouvoir : toute contestation dirigée contre un acte administratif unilatéral doit impérativement être précédée d’un recours préalable.

Sur le volet ‘’Plein contentieux ou recours de pleine juridiction’’ : bien que les pouvoirs du juge y soient étendus, le recours préalable demeure exigé pour la plupart des contestations relatives à l’exécution ou à la réparation de préjudices.

Sur le préjudice exceptionnel : les demandes d’indemnité pour préjudice exceptionnel ne sont recevables que si une réclamation préalable a été adressée à l’autorité compétente.

Sur les Référés : le régime congolais distingue dix types de référés, dont la majorité exige la preuve du recours préalable : référé-suspension, référé-liberté, référé-conservatoire, référé-constat, référé-instruction, référé-provision ou encore référés spécifiquement liés aux marchés publics, aux finances ou aux douanes.

Sur les agents de carrière des services publics : ils doivent impérativement épuiser les recours gracieux et hiérarchiques avant toute saisine du juge administratif.

Sur les douanes : le contentieux douanier suit une procédure stricte impliquant successivement le directeur général des douanes, la Commission de règlement des litiges douaniers et le ministre des Finances.

Sur les marchés publics : les délais de contestation y sont particulièrement resserrés : cinq à dix jours ouvrables pour les attributions, trente jours pour les litiges d’exécution.

Vers une justice administrative plus cohérente et plus efficace

La Première Présidente a également annoncé l’initiation de programmes de formation interne destinés aux juges du Conseil d’État afin de garantir une interprétation homogène des textes et de renforcer la sécurité juridique. Elle a souligné les progrès accomplis depuis l’installation de la juridiction, notamment en matière de référés, longtemps perçus comme complexes avant que la jurisprudence ne stabilise progressivement leur usage.

Cette rentrée judiciaire marque ainsi une étape déterminante dans la consolidation du Conseil d’État, qui s’impose de plus en plus comme un pilier central de l’État de droit, un arbitre essentiel des actes de l’administration et un garant solide des droits des administrés.

John Ngoyi

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