Judith Suminwa Tuluka, Première Ministre, a prononcé un discours percutant hier, lundi 24 février 2025, à l’occasion de la 58ème Session du Conseil des Droits de l’Homme tenue à Genève, en Suisse. L’évolution inquiétante de la crise sécuritaire dans l’Est de la République Démocratique du Congo a constitué l’essentiel de son message apporté aux participants à cette rencontre importante. Le Première Ministre Judith Suminwa a dénoncé les massacres des populations occasionnés par l’invasion de l’armée rwandaise en RDC, des cas de violations flagrantes des droits humains, appelant à une réponse internationale renforcée et coordonnée pour contribuer au rétablissement de l’ordre et de la sécurité dans toutes les zones occupées par le Rwanda et ses supplétifs du M23.
Kinshasa exige des actes concrets
‘’Il m’est impossible de vous décrire les cris et les larmes de millions de victimes de ce conflit, femmes, filles violées, enfants enrôlés de force, déplacés et orphelins. En outre, les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes, les artistes, témoins de cette tragédie dans l’Est, n’ont pas le droit de la raconter. Ceci nécessite une réponse internationale renforcée et coordonnée. Nous appelons donc la Communauté internationale à renforcer son soutien humanitaire, à fournir des ressources pour permettre une bonne prise en charge des milliers de blessés, des déplacés et de s’assurer du respect du droit international humanitaire, car ses principes sont essentiels sauver des vies et alléger la souffrance des congolais… La situation de conflit à travers le monde exacerbe les violations de droits humains et empêche des milliers de citoyens à accéder aux droits fondamentaux tels que l’accès à l’eau, à l’électricité et à l’alimentation. Ceci n’est pas seulement le cas en République démocratique du Congo, mais notamment au Soudan, en Haïti et en Ukraine. Pour y faire face, mon pays soutient la nécessité de lutter contre les causes de conflits et imposer la paix dans le monde par des mécanismes de justice transitionnelle et de lutte contre l’impunité. L’histoire nous jugera implacablement si nous ne faisons rien pour mettre fin au conflit en République démocratique du Congo et dans d’autres parties du monde… Nous pouvons changer le cours de l’histoire et nous en avons le devoir moral pour les générations futures’’, a souligné Judith Suminwa.
Bilan interpellateur
Dans son intervention, elle a présenté un bilan assez interpellateur pour une mobilisation urgente contre l’agression en RDC. La Première Ministre Suminwa a indiqué que, selon les chiffres du Ministère de la Santé de la RDC, plus de 7000 congolais ont été tués par l’armée rwandaise, de janvier à ce jour, sous les regards de la Communauté internationale.
‘’C’est avec gravité que je m’adresse à vous aujourd’hui, au nom de Son Excellence Monsieur le Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, ainsi qu’au nom du peuple congolais… Je voudrais exprimer la gratitude de la RDC à cette Assemblée au regard de la diligence avec laquelle vous avez accepté à notre demande, la tenue d’une session spéciale et l’adoption, à l’unanimité de la Résolution, le 7 février 2025, ouvrant la voie à la mise en place de la Mission d’établissement des faits et de la Commission d’enquête indépendante. Ceci augure un espoir pour des millions de congolais qui sont encore aujourd’hui victimes des agressions répétées du Rwanda. Le Gouvernement de la RDC s’engage à contribuer à la mise en œuvre de cette résolution adoptée le 7 février dernier, notamment en facilitant le travail de la Commission d’enquête indépendante qui sera mise sur pied pour documenter les violations de droits de l’homme et du droit international humanitaire dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. C’est dans ce même élan que nous voulons saluer l’adoption à l’unanimité de la Résolution du Conseil de sécurité du 21 février 2025, enjoignant clairement le Rwanda de quitter le territoire congolais et de cesser tout soutien au mouvement terroriste du M23. Il en est de même de la Résolution adoptée le 13 février 2025 par le Parlement européen qui a mis en lumière l’exploitation illégale des ressources naturelles par le Rwanda. Nous voulons saluer également la Résolution prise par le Conseil de Paix et Sécurité de l’Union Africaine et espérons des mesures coercitives pour la mise en œuvre de toutes ces recommandations en faveur de la paix. Ainsi, au regard des massacres et des exécutions sommaires qui continuent de perpétrer sur notre sol, nous en appelons à des sanctions dissuasives pour permettre de restaurer l’ordre et la sécurité et protéger ainsi des millions de congolais à Goma, Bukavu et dans d’autres localités sous occupation. Nous continuons à ce jour d’enterrer des morts que nous n’avons cessé de dénombrer et compter. Des millions des déplacés sans abri dans la plupart de camps ont été détruits par les forces d’occupation. La situation sécuritaire et humanitaire dans l’Est de la République démocratique du Congo a atteint des niveaux alarmants. Selon les chiffres du Ministère de la Santé, depuis le mois de janvier 2025, le conflit a provoqué entre autres la mort de plus de 7000 compatriotes dont plus de 2500 corps enterrés sans être identifiés et plus de 1500 corps trainent encore dans les morgues. Plus de 215 cas de choléra identifiés et plusieurs cas de Mpox non pris en charge avec risque d’expansion. La destruction de plus de 90 sites d’accueil des déplacés internes, des attaques contre des hôpitaux et entrepôts humanitaires. Plus de 450 mille personnes, selon l’ONU, sont sans abri, nourriture et eau’’, a expliqué le Première Ministre de la RDC.
La RDC engagée au respect des principes universels
‘’La RDC en tant que membre de ce Conseil réitère son engagement à continuer à œuvrer pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Par ailleurs, suite au récent passage de notre pays au quatrième cycle de l’examen périodique universel et devant le comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, nous nous engageons à développer un plan d’action de mise en œuvre des recommandations de l’examen périodique universel et comptons sur l’appui du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme pour sa finalisation et l’échange de bonnes pratiques. Faisant suite au discours du Président de la République devant cette auguste assemblée, lors de la 52ème Session, nous continuons de travailler dans d’autres domaines clés, notamment la Justice transitionnelle, l’amélioration de la situation des femmes et des enfants ainsi que celle des conditions des détenus selon les priorités fixées par mon Gouvernement. Concernant le Droit à un environnement sain, la République démocratique du Congo, conformément à ses engagements en tant que pays-solution, avec ses minerais stratégiques, ses forêts et sa biodiversité, continue de jouer son rôle pour la préservation de l’équilibre environnemental mondial. Protégeons ensemble cet équilibre’’, a, toujours dans son intervention, indiqué Judith Suminwa, devant le Conseil des Droits De l’Homme, à Genève.

La Pros.