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Suspendre les exportations de cobalt en RDC : Quelles analyses, quels impacts ? - Laprosperite
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Suspendre les exportations de cobalt en RDC : Quelles analyses, quels impacts ?

Par La Prospérité
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(Par Jacques Mwanga Nzumbu depuis le Canada)

PhD candidat, UQAM, en minerais stratégiques et transition énergétique)

L’ARECOMS (Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales stratégiques) a annoncé, ces derniers jours, le processus de suspension des exportations de cobalt congolais pour trois à quatre mois. Le Cobalt est l’un des minerais, avec le coltan et le germanium, déclarés minerais stratégiques en RDC, depuis 2018. La RDC regorge d’un large éventail des minerais stratégiques, en plus des terres rares, mais qui ne sont pas déclarés « minerais stratégiques » en RDC. Seuls ces trois minerais sont jusque-là déclarés stratégiques.

D’aucuns s’étonnent de ce minimalisme minier stratégique alors que nous sommes entrés dans l’ère de la diplomatie, de la géopolitique, de la géo économie, de la géostratégie des minerais stratégiques. Nous sommes entrés dans l’ère de la militarisation des matériaux miniers indispensables aux industries de défense, de sécurité et des systèmes d’armes modernes, de la conquête de l’espace et de la transition énergétique, entraînant ainsi une exorable entrée dans l’ère de la guerre des minerais stratégiques et des terres rares.

Les minerais stratégiques sont des minerais indispensables aux technologies modernes, aux batteries rechargeables, à la transition énergétique, à l’économie numérique et digitale, aux systèmes d’armes et de défense modernes, hypersoniques et de longue portée, aux applications à trois dimensions (3D), à l’aéronautique et à la conquête de l’espace ainsi qu’à la technologie des semi-conducteurs et de l’intelligence artificielle. Ce sont les matériaux de l’économie, de la transition écologique et de la défense et sécurité du futur.

L’ARECOMS est dans ses missions statutaires, tentant de réguler le marché du cobalt, comme minerais stratégique. Mais comment réagit ce marché ? Comment réagissent les acteurs du marché du cobalt ? Quels impacts pourraient avoir une telle décision au Congo et à l’international ? Quel crédit et quelle chance accordée à un tel projet ? Surtout quelle est la pertinence et l’efficacité d’un tel projet ? Peut-il atteindre ses objectifs de rééquilibrage du marché du cobalt ?

La mesure de l’ARECOMS fait bouger les lignes pour certains et fait sursauter, pour d’autres. Je livre ici quelques pistes de réflexions pouvant contribuer à mieux cerner la complexité d’un tel projet, ses chances et ses risques. L’hypothèse centrale de travail sur laquelle semble s’appuyer l’ARECOMS est l’effondrement du marché du cobalt, nécessitant un redressement, le Congo étant le premier producteur mondial de ce minerai.

Pour affronter une telle hypothèse, quelques éléments analytiques sont nécessaires pour espérer proposer un redressement équilibré du marché du cobalt : les technologies des matériaux cathodiques et anodiques des batteries ; la demande et l’offre en cobalt ; la production ; les exportations ; la transformation ; la géopolitique et la géostratégie des minerais critiques ; le protectionnisme des industries stratégiques et des minerais critiques.

  1. Technologie des cathodes et des anodes des batteries

Habituellement, quand on parle du marché, on aborde en premier lieu la loi de l’offre et de la demande. Ce qui est compréhensible. Dans le cas du marché du cobalt, il faudrait partir plutôt en premier des technologies des cathodes et des anodes des batteries. C’est cette technologie qui structure le marché du cobalt et des autres minerais stratégiques avec la loi de la demande et de l’offre.

L’ARECOMS semble avoir placé la loi de l’offre et de la demande au premier plan avant les technologies. Pourtant, la technologie des batteries est essentielle sur le marché du cobalt et des batteries ainsi que sur leurs diverses applications. En proposant la suspension des exportations du cobalt congolais, pour trois à quatre mois, l’ARECOMS semble affirmer que l’effondrement du marché du cobalt est principalement lié à l’abondance de l’offre, de la production du cobalt au Congo, premier exportateur mondial. Ce qui est en partie vrai. Mais ce n’est pas la cause première. Ce n’est pas la raison fondamentale.

Le problème qu’affronte le marché du cobalt est avant tout un combat scientifique, un combat technologique. C’est la question des cathodes des batteries avec ou sans cobalt. Quelle est la technologie de l’avenir ? Quels sont les matériaux des cathodes de l’avenir ?

Le cobalt est une composante de la cathode de la batterie (matériau cathodique). C’est dans la batterie rechargeable classique MNC (Manganèse, Nickel, Cobalt), avec ses multiples variantes, qu’il a fait ses preuves. Le manganèse, le nickel, le cobalt, le lithium, le zinc… sont des matériaux cathodiques classiques de la batterie. Le graphite, le silicone…sont des matériaux des anodes de la batterie. Une batterie, – qui est une pile, est composée de trois éléments dans sa structure : les cathodes, les anodes et l’électrolyte. L’électrolyte est la composante qui sépare les cathodes des anodes, facilitant la circulation harmonieuse des ions. La cathode formant le pôle positif de la batterie et l’anode, le pôle négatif.

Le cobalt est essentiel dans la stabilité et la densité de la cathode de la batterie. Il est également essentiel dans la stabilité de toute la structure de la batterie. Une batterie à cathode cobalt classique (MNC), c’est environs 40% du cobalt. Et le prix d’une voiture électrique dépend à 40% du prix de la batterie. Du prix de la cathode, dépend le prix de la voiture. Or le cobalt était la cathode la plus chère entre le manganèse et le nickel en 2016, quand les prix du cobalt ont atteint 91.000$ /t.

C’est à ce moment-là que commencent les spéculations et les recherches scientifiques sur les batteries sans cobalt. Le fer est trouvé comme alternative au cobalt. Les batteries LFP (lithium, fer, phosphate) sont lancées sur le chantier de la concurrence avec les MNC et leurs variantes. Ce sont ces batteries et leur technologie qui ont bousculé le marché du cobalt.

Leur succès est dû au marché chinois, privilégiant le transport urbain de distance moyenne. Les voitures LFP ne sont pas adaptées pour le marché de longue distance comme aux USA, au CANADA, à cause de leur problème de densité. C’est pour les villes. Cela limite leurs capacités à percer le marché mondial de longue distance. C’est pourquoi le cobalt résiste dans l’automobile classique électrique et de haute qualité. Mais les LFP sont surement les cathodes de l’avenir et les batteries du futur, surtout pour le transport urbain. La ruée vers les LFP est indéniable.

Les recherches sur la substitution du cobalt se sont accompagnées de la technologie de la réduction de la quantité du cobalt dans les batteries MNC classiques.  Certains types de batteries à cobalt ont vu la quantité du cobalt baisser de 20 à 5%, voire à 1% dans les batteries TELSA, par exemple, au profit de l’augmentation du nickel. Ce sont les meilleures batteries actuellement sur le marché de longue distance et de luxe. Les MNC classiques ont bien évolué avec plusieurs variantes.

Mais paradoxalement, le nickel qui coutait moins cher que le cobalt avait vu les prix de ce matériau s’envoler, rendant plus complexe la substitution ou la réduction du cobalt. En réduisant le cobalt à 1% et en augmentant le nickel à 80% les batteries à nickel renforcé ont gagné le marché, tout en augmentant les prix du nickel sur le marché, partant, de la batterie. Cette situation n’a pas modifié solidement l’hypothèse de réduction du cobalt pour des meilleurs prix de la batterie. Mais elle a permis au moins de diminuer l’influence du cobalt dans la batterie, sans l’évacuer. Car les propriétés du cobalt restent solides pour les batteries de haute qualité et de haut niveau.

Depuis, se sont multipliées les recherches sur la chimie et la physique des matériaux cathodiques des batteries de l’avenir en remplacement des classiques comme le lithium, le cobalt, le nickel, le manganèse, le zinc. Même le lithium dont la substitution est très difficile, semble trouver des modestes alternatives avec les batteries à Sodium.

Le marché des technologies de chimie et de physique des matériaux cathodiques et anodiques des batteries est le plus prospère actuellement pour tenter de gagner des parts des marchés aux cathodes et anodes habituelles. C’est ainsi qu’on est lancé non seulement sur les batteries sans cobalt, avec des LFP, sur des batteries à cobalt réduit, sur des batteries à Sodium, mais aussi sir des batteries en membrane à l’état solide, contrairement aux classiques à électrolyte liquide. A propos de l’électrolyte, le débat scientifique se focalise actuellement sur la question de savoir si les batteries du futur seront-elles des batteries à électrolyte liquide ou solide ?

Toutes ces technologies nouvelles essaient de marginaliser le cobalt, au regard de sa géopolitique et de sa géostratégie, étant détenu à 80% (production de la RDC) par la RDC en termes de production, un pays dont la stabilité et les défis sécuritaires restent encore une réelle préoccupation. Ces efforts scientifiques, réels ou supposés, cette campagne scientifique sur les alternatives au cobalt des batteries, n’a pas prouvé une efficacité à 100% des alternatives au cobalt. Mais elle a au moins eu le mérite de bousculer et de faire basculer le marché du cobalt, d’un produit hautement stratégique pour les batteries, à un produit dont la substitution est possible. Cette campagne n’a pas fait disparaître le cobalt du marché des batteries, mais l’a maitrisé aux profits des consommateurs finaux mais au détriment des producteurs.

C’est cette question qui a occasionné l’effondrement du marché. L’avenir des batteries étant suspendu à ce débat, les recherches sur les batteries sans cobalt ont vertigineusement ébloui les investisseurs de l’automobile, nécessitant une sorte de réalignement nouveau.

Si l’ARECOMS veut exercer une influence sur le marché du cobalt, sur les marchés des batteries, des véhicules électriques, il doit s’attaquer à la question de la chimie et de la physique des cathodes des batteries. Les technologies des batteries du futur sont essentielles dans les choix des cathodes de l’avenir et, partant, de leurs prix. Comment reprogrammer le cobalt comme cathode de l’avenir ? C’est un grand défi.

C’est par des études scientifiques, de même niveau que celles menées par l’industrie automobile et l’industrie des cathodes et des anodes de l’avenir, que l’on démontrera que le cobalt est sérieux comme élément cathodique de l’avenir ; que le cobalt ne disparaitra pas de batteries de qualité supérieure ; que le cobalt comme cathode améliorée peut être la meilleure des solutions à la transition énergétique propre. C’est par des études scientifiques de nos laboratoires, de nos chercheurs que cela doit être prouvé.

L’ARECOMS ne devrait pas attendre que les autres nous disent quelles sont les cathodes de l’avenir, quelles sont les batteries de l’avenir. Car l’orientation de l’exploitation minière devrait s’aligner sur les cathodes de l’avenir et non pas sur le volume, les prix, ni sur les taxes.

En raison d’un grand éventail des minerais stratégiques en RDC, l’ARECOMS devrait préparer une liste plus large des minerais stratégiques, mettre en place des laboratoires de chimie et de physique des anodes et des cathodes des batteries, à côté des cabinets d’analyses stratégiques, géopolitiques des minerais critiques. Car les retombées de recherches scientifiques n’ont des réels succès que si elles sont accompagnées aussi des succès diplomatiques économiques dans la manière de les présenter et de les vendre.

En conclusion, pour peser sur la structure des prix du cobalt, l’ARECOMS devrait remettre sur l’arène scientifique le cobalt comme cathode de l’avenir, et le prouver de manière scientifique, géostratégique et géopolitique. Vaste chantier qui aura des incidences sur la demande et l’offre en cobalt.

  • La demande et l’offre en cobalt

Le marché du cobalt est structuré comme tout marché selon la loi de la demande et d l’offre. La demande en cobalt est stimulée par plusieurs facteurs. Principalement, elle est actuellement menée par le secteur de l’automobile électrique, avec les batteries. Une autre part est détenue par l’électromobilité, les énergies renouvelables, le numérique et le digital, l’économie digitale 3D et l’intelligence artificielle, l’aéronautique, la conquête de l’espace, et surtout les industries de défense et les systèmes d’armes modernes, hypersoniques, de précision et de longue portée, ainsi que des drones militaires. 

De tous ces secteurs, c’est l’automobile et l’électromobilité qui tirent vers le haut la demande en cobalt. Or la batterie est essentielle pour tous ces systèmes. Et le débat scientifique sur les batteries de l’avenir, et surtout sur les batteries sans cobalt, réduit l’impact du cobalt dans l’automobile et dans l’électromobilité, principaux leviers du marché du cobalt.

Ce débat entraîne des conséquences sur le marché du cobalt : le rétrécissement des parts du cobalt sur le marché des batteries. Avec un marché rétréci, diversifiant les cathodes des batteries, le cobalt se trouve coincé et piégé. Pour le sauver, il faut évacuer avant tout les premiers défis liés à la technologie des cathodes de cobalt de la batterie.

La demande en cobalt se rétrécie, non seulement à cause du débat sur la technologie des batteries du futur, mais également à cause de la politique du stockage. Les industries de transformation des matériaux de cathodes des batteries appliquant une politique à outrance de stockage des minerais bruts ou faiblement transformés, importés essentiellement du Congo.

Le stockage rassure le marché et fait disparaitre le doute sur les difficultés d’approvisionnements. L’on comprend pourquoi toutes les lois et diligences imposées sur les minerais du Congo sont marquées du sceau de « approvisionnements responsables ». Ce qui compte pour ces industries et leurs pays, c’est « l’approvisionnement » pour stocker.  On ne parle jamais du stockage responsable en revanche. Le stockage inonde le marché virtuel, le sature et le rassure au profit des consommateurs finaux.

Actuellement, la Chine possède le plus grand lot de stockage de cobalt et de cuivre pouvant résister à trois mois de suspension des exportations du cobalt congolais. Elle s’approvisionne essentiellement en RDC. Une fois le choc de cette suspension a atteint son niveau le plus haut, les stocks en cobalt seront surement libérés en Chine pour rééquilibrer le marché.

Le Congo et l’ARECOMS n’ont pas de réserves stratégiques stockées. Nous avons cru, au Congo, que nos stocks sont sous le sol : mais nous avons oublié que cela n’est pas vraiment stratégique tant que nous n’avons pas les moyens de les sortir du sous- sol par nous-mêmes, de manière autonome et indépendante. L’ARECOMS ferait mieux de penser à se constituer, pour le pays, des réserves physiques en cobalt pour contrebalancer les systèmes de stockage étrangers. Ces réserves stratégiques serviraient de moyen de dialogue stratégique comme dans le cadre de l’OPEP, avec des partenaires clés du marché.

Au lieu d’exporter pour stocker en Chine, une stratégie devrait être mise en place pour exploiter, et ce qui ne peut pas être exporter selon les lois nouvelles du Congo, en stocker une large partie, au Congo. L’artisanat minier du cobalt et du cuivre ainsi que des autres minerais stratégiques, devrait bénéficier de cette politique. Cette politique permettrait de mieux tenir des leviers efficaces sur les prix. En même temps elle permettrait de ne pas perturber le marché interne du cobalt, du cuivre et des autres minerais stratégiques en RDC quand les prix chutent ou amorcent une tendance baissière vertigineuse.

La politique du stockage permettrait de racheter ce que les entreprises et l’artisanat minier ne peuvent pas écouler pendant le resserrement de la demande. Il faut éviter à tout prix que le stockage soit fait, par défaut, par les entreprises elles-mêmes, le cobalt congolais étant un sous-produit du cuivre. Etant un sous-produit du cuivre, la suspension des exportations du cobalt entraîne deux conséquences liées au cuivre. Soit elle entraîne la baisse de la production du cuivre, soit elle maintient le rythme de la production du cuivre en entrainant dans ce cas le stockage commercial, par défaut, du cobalt par les entreprises minières en RDC.

Une telle contrainte commerciale ne saurait corriger le marché du cobalt. C’est le stockage stratégique et non le stockage commercial qui pourrait être une mesure efficace sur le marché et sur les prix. Le stockage stratégique est le fait souverain d’un Etat.

Mais quand on court d’abord pour les taxes et les droits de douane afin de remplir les caisses de l’Etat, le stockage comme vision stratégique serait difficile à envisager pour la RDC. Avec le niveau de stockage du cobalt et du cuivre actuel en Chine, l’arrêt des exportations congolaises aura un impact moindre et très limité. Car le stockage de la Chine est avant tout stratégique avant d’être commercial.

Paradoxalement, c’est au niveau du marché du cuivre, qui est devenu actuellement le pétrole du XXIe siècle, avec des prix records à plus de 11.000$t, à cause de ses enjeux stratégiques liés à la transition énergétique, que la mesure de l’ARECOMS pourrait avoir un gros impact sur les prix. Si la suspension des exportations du cobalt -qui est un sous-produit du cuivre- entraîne la baisse de la production du cuivre au Congo, les prix du cuivre s’envoleront de manière vertigineuse au niveau global. Car la RDC est parmi les cinq premiers producteurs mondiaux du cuivre, et le premier au niveau africain. Se serait alors le phénomène des effets inattendus d’une politique publique. En voulant tirer profit du cobalt, on tirerait plutôt profit du cuivre. Voilà pourquoi il est plus que temps de déclarer le cuivre comme minerai stratégique en RDC.

Un autre facteur qui contribue au rétrécissement du marché du cobalt est l’offre. L’offre en cobalt est abondante ces dernières années. Alors que le marché se rétrécie, l’offre sur- abonde. C’est une aubaine pour les politiques de stockage et les consommateurs finaux. Mais c’est une perte pour les producteurs et exportateurs bruts.

La RDC, premier producteur mondial a, avec sa production en nette augmentation, inondé le marché, le saturant ; ce marché qui s’était déjà rétrécie par les débats scientifiques. Avec des prix actuellement autour de 27.000$, en comparaison de 91.000$ en 2016 et 81.000$ en 2022, la surproduction congolaise travaille en perte pour le Congo : surproduction, faibles prix, et moins des recettes. Pour gagner davantage, le Congo est obligé de pousser les entreprises à produire plus en termes de volume. Car si les prix s’effondrent, le seul moyen de gagner c’est de miser sur le volume. Or en misant sur le volume, la RDC vide et épuise de manière accélérée ses réserves et son cobalt, qui seront stockés ailleurs, en Chine. C’est du gaspillage et du pillage !

Si les mesures d’ARECOMS portaient sur cette considération de l’épuisement accéléré du sous-sol congolais pour peu des retombées, – un argument politique plus que commercial, sa mesure serait plus compréhensible. Mais du moment où cette mesure est d’abord commerciale, avec un impact peu probable au regard du stock en Chine, une telle mesure questionne sur son efficacité et sa pertinence.

En termes d’offre, il ne s’agit pas tant de mener une politique commerciale d’interdiction ou de suspension des exportations du cobalt que de repenser la politique de production, d’exportation et de transformation du cobalt congolais. Quand le marché des minerais stratégiques se rétrécie, nous devrions repenser notre politique : qu’exploiter ? Pourquoi exploiter ?

Qu’exploiter ? il ne s’agit pas de tout exploiter. Il ne s’agit pas de volume. Il ne s’agit pas d’épuisement du sous-sol congolais. Il faut plutôt miser sur les exploitations stratégiques, exploitations de niches, en petites quantité mais à très forte valeur ajoutée, alignées sur les marchés des technologies du futur.

Par exemple, il faudrait identifier quelles sont les batteries du futur ; comment seront structurés les véhicules électriques du futur et leurs matériaux des batteries ; quelles sont les cathodes du futur ; quels sont les systèmes d’armes et de défense du futur ; quelles sont les enjeux de la conquête de l’espace du futur et leurs minerais stratégiques ? L’exploitation minière stratégique doit être orientée vers les enjeux stratégiques, économiques, écologiques et géopolitiques du futur. Anticiper et exploiter en petite quantité ces produits à très haute valeur, c’est à la fois préserver notre sous-sol mais en gagnant davantage. Bref, produire peu (en volume) mais gagner plus, en qualité et prix.

Il est regrettable que tout le monde au Congo ne se lance qu’à la production de masse de mêmes matières premières minières ! Bifurquons vers les niches en diversifiant ; et réduisons les volumes en misant sur la qualité et la valeur ajoutée.

Pourquoi exploiter ?

Généralement nous avons exploité pour exporter et tirer profit des dividendes en termes fiscaux, douaniers, et de redevances…Mais aussi pour la création des emplois. Nous n’avons pas suffisamment investi, en revanche, dans la transformation locale ni surtout dans la consommation locale de nos minerais. Exploitons, non pas pour exporter, mais pour consommer nos minerais. Véritable défi ! Car nos structures et bases industrielles ne sont pas préparées à une telle révolution.  Et pourtant, le marché interne congolais, avec ses plus au moins 120 millions des consommateurs, bien structuré, industrialisé, diversifié, soutenu par des infrastructures modernes et de qualité ainsi que par un environnement sécuritaire et une gouvernance de qualité, peut contenir une grande part de la consommation minière au niveau local en RDC. Le Congo est un vaste marché qui importe presque tout !

Nous sommes habitués à vendre le brut ou des produits faiblement transformés. Toutes sortes de raisons sont avancées pour justifier cette politique, en commençant par le déficit énergétique. Certains ne savent même pas à quoi servent les minerais dans une économie locale pour nombre de nos populations. Les exportations devraient être celles du plus, quand le marché interne ne peut pas tout absorber. Développons surtout le marché interne des minerais stratégiques, en l’occurrence du cobalt, du cuivre, du coltan, du germanium pour les semi-conducteurs, du nickel, du niobium, du zinc, de nos terres rares, du phosphate, du chrome ainsi que de tous les minerais congolais. Ici, on se demande, par exemple, pourquoi le cuivre traine à être déclaré minerai stratégique en RDC !

L’exploitation devrait s’accompagner des industries de la transformation et de la consommation du cobalt, du cuivre et de tous nos minerais au Congo. Consommons nos minerais au Congo. Consommons le cuivre, le cobalt, le germanium, le lithium, le coltan, le manganèse, le nickel, le phosphate, le chrome, le niobium, l’étain, le zinc, le gallium, le fer du Congo, au Congo. Cela suppose une base industrielle suffisante et des ressources humaines en compétences avérées. Une vision claire peut être capable de préparer tout cela.

Les industries minières gagneraient davantage dans une telle politique, car elles se rapprocheraient davantage de leurs consommateurs finaux, en réduisant la logistique, et profitant des infrastructures communes. Elles feraient plus du profit en collaborant avec la transformation et la consommation que de miser seulement sur les exportations et le trading.

Les exportations congolaises minières deviendraient ainsi des éléments à haute valeur ajoutée des produits et équipements transformés au Congo dans une base industrielle structurée. L’ARECOMS pourrait alors réussir à peser sur le marché du cobalt et des autres minerais stratégiques dont la RDC regorge, en position de force.

  • Géopolitique, géostratégie et protectionnisme des minerais stratégiques

Déjà avec l’IRA (Inflection Reduction Act) de Biden, les minerais stratégiques avaient atteint une dimension très géostratégique rare, une vision teintée de protectionnisme des technologies vertes, alimentées par les minerais stratégiques. Avec Trump, tout est clair : les minerais stratégiques font partie de la diplomatie de souveraineté, de la diplomatie militaire, de défense et de sécurité ; de la diplomatie économique ; des enjeux de paix et de guerre pour les USA et les grandes puissances mondiales. Le tout se jouant sur le protectionnisme minier des minerais critiques et des technologies stratégiques à l’interne.

Les droits de douane sont fixés à plus au moins 50% pour les véhicules électriques chinois et les composants des batteries importés de Chine. L’UE a fait de même avec des droits de douane de 30% pour les véhicules électriques chinois. Certains minerais stratégiques chinois ainsi que ses terres rares ont vu leurs quotas d’exportation rétrécir vers les Etats-Unis et vers l’Europe par une politique publique chinoise de protectionnisme, en réponse aux mesures américaines et européennes.

Comment l’ARECOMS et la RDC se situent-ils dans ce jeu ? Restent-ils spectateurs ou peuvent-ils être de vrais joueurs en tirant profit d’une pareille donne ? Que signifie pour ARECOMS et la RDC que les composants des batteries avec du cobalt congolais ou des véhicules électriques chinois avec du cobalt et du cuivre congolais, atterrissent aux USA avec des droits de douane à 50% ou en Europe à 30% alors que ce cobalt et les autres minerais stratégiques de la RDC sont taxés à seulement 10% ? Par ailleurs, comment comprendre que le cuivre n’entre pas toujours dans la catégorie des produits miniers stratégiques en RDC alors que ces enjeux sont de plus en plus stratégiques dans le monde ?

Pour garantir l’indépendance technologique, militaire, énergétique, et économique de grandes puissances, elles se sont lancées sur la conquête, mercantile, des approvisionnements en minerais stratégiques tout en pratiquant le protectionnisme technologique et miner à l’interne.

Pour que les mesures prises par ARECOMS aient une chance de succès, la suspension devait revêtir d’un caractère politique plutôt que commercial. La guerre économique ou commerciale que TRUMP mène aux autres pays, est un acte avant tout politique ; un levier de négociation, de diplomatie.

La mesure de suspension des exportations du cobalt congolais devrait entrer dans une stratégie plus diplomatique et politique de la RDC en temps de guerre. Une vision stratégique qui serait plus large. Ce sont les autorités politiques qui devraient annoncer ces mesures au niveau international vis-à-vis des entités, des pays, des industriels qui bénéficient de produits finaux venant des chaines de cobalt, cuivre, manganèse, germanium, coltan du Congo, mais qui ne prennent pas fait et cause de la RDC dans cette guerre d’agression de manière claire. En revanche l’on ouvrirait le marché des minerais stratégiques en priorité aux pays soutenant la RDC. C’est la question du contenu congolais stratégique. Quelle est la part du Congo dans les industries mondiales stratégiques ?

Le Congo devrait, par ARECOMS, savoir l’impact réel du contenu congolais dans les industries stratégiques mondiales. Suspendre les exportations de cobalt ou des autres minerais congolais alimentant les composants des batteries, des systèmes d’armes et de défense, les véhicules électriques, les énergies renouvelables, l’espace digital et numérique, des pays ne soutenant pas la cause de la RDC dans la guerre d’agression rwandaise serait un acte politique de haute volée et d’un impact réel sur les prix. Cela s’appelle : défendre le contenu congolais. Le Congo doit avancer sur cette piste du contenu congolais stratégique. Vous ne pouvez pas, par exemple, utiliser le matériel militaire américain de pointe que vous avez acheté et le revendre à d’autres sans l’accord des Américains. C’est au nom du principe du contenu américain stratégique que ces contrats sont signés.

Il s’agirait ici pour l’ARECOMS de faire une étude démontrant l’influence et la présence du cobalt, du cuivre ou des autres minerais stratégiques congolais dans des produits stratégiques ou dans les économies stratégiques desdits pays. Avec le suivi des chaines de valeur tout est possible pour mener une telle vérification.  Ce travail serait plus facile à réaliser si la transformation des cathodes, des matériaux précurseurs des batteries, et la production de certains équipements stratégiques de défense et sécurité ainsi et les éléments entrant dans la composition de semi-conducteurs se produisaient en RDC.

Une simple annonce politique de suspension des exportations du cobalt aurait plus d’effets sur le marché que les annonces commerciales. En même temps, ces mesures politiques allaient pousser les puissances à négocier directement avec l’Etat congolais pour éviter la rupture des chaines d’approvisionnement (bottleneck).

En outre, au niveau diplomatique, pour que les mesures de l’ARECOMS aient du succès, l’ARECOMS ne peut pas travailler à une telle mesure sans associer les pays producteurs du cobalt. Ici, il faut suivre le modèle de l’OPEP et l’OPEP+ pour le pétrole. Il s’agit d’abord de former un cartel, une union des pays producteurs du cobalt, négocier les quotas, les volumes des exportations pour une ou deux ans. L’influence d’un tel cartel politique est plus grande que les annonces de la RDC, même s’il reste le seul grand jouer du cobalt, au niveau de la production, car la transformation est détenue par la Chine. La mesure d’ARECOMS, se limitant au niveau commercial, sans portée politique, risque de profiter davantage aux pays concurrents exploitant le cobalt.

En conclusion, il faut rester prudent sur les mesures d’ARECOMS. Le marché sera chauffé pour un temps, mais pas surchauffé. Faute d’inclusion des défis des éléments liés aux technologies des cathodes et des anodes des batteries, véritables moteurs du marché du cobalt. La faute également à la politique du stockage en Chine. En outre, limitée aux aspects commerciaux, sans intégrer la dimension politique et géopolitique du protectionnisme minier et des technologies stratégiques, la portée de ces mesures ARECOMS semble limitée. C’est le secteur du cuivre qui pourrait cependant, dans une moindre mesure, tirer profit de cette stratégie commerciale. Par ailleurs, le caractère solitaire, ignorant la force des cartels à l’image de l’OPEP+, ne peut pas favoriser l’épanouissement total d’une telle mesure.

La suspension devrait être intégrée plutôt à une vision minière politique plus large en termes de diplomatie, de commerce, de défense, de sécurité de la RDC, portée par les pouvoirs politiques et non pas par des techniciens de l’administration minière. Elle deviendrait ainsi une arme diplomatique garantissant le commerce et la paix.

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