L’Assemblée Nationale s’engage résolument à jouer son rôle crucial dans la réforme de la Police Nationale Congolaise (PNC). C’est dans cette optique que s’est ouvert le mardi 20 mai 2025, au salon Virunga de l’hôtel Memling à Kinshasa, un atelier de renforcement des capacités destiné aux parlementaires. L’enjeu est de les outiller pour légiférer et contrôler efficacement un secteur aussi vital que celui de la sécurité, avec un accent particulier sur la mue en profondeur de la PNC, dont la loi de programmation s’étalera de 2025 à 2029.
L’initiative, inaugurée par l’honorable Rubens Mikindo, président de la Commission Défense et Sécurité de l’Assemblée Nationale, a vu la participation notable du Vice-premier ministre en charge de l’Intérieur et Sécurité, Jacquemain Shabani Lukoo, soulignant l’importance accordée par l’exécutif à cette démarche. Pendant trois jours, les élus, notamment les nouveaux venus et les membres des commissions Défense et Sécurité ainsi que Politique, Administrative et Juridique (PAJ), vont se pencher sur les arcanes de la gouvernance sécuritaire.
Organisé conjointement par le Programme d’Appui à la Réforme de la Police (PARP) et le Centre Genevois pour la Gouvernance du Secteur de Sécurité (DCAF), cet atelier vise, selon Fatumata Diallo, cheffe d’équipe des deux entités, à mettre à niveau les connaissances et compétences des députés. Il s’agit de leur permettre d’appréhender pleinement leur mission législative, leur pouvoir de contrôle et leur capacité d’évaluation des réformes en cours, alors que le PARP entame la dernière ligne droite de sa troisième phase, prévue pour s’achever en décembre prochain.
Tourner la page d’une police militarisée
Au cœur des discussions, la vision d’une police nouvelle, résolument tournée vers le citoyen. Charles Winji Wire, expert au Comité de Suivi de la Réforme de la Police (CSRP), a dressé un tableau saisissant de cette ambition.
‘’Cette réforme a pour rôle de mettre fin à l’ancienne Police, où il y avait un méli-mélo avec les méthodes militaires, afin d’en faire une nouvelle Police voulue républicaine et de proximité avec la population civile’’, a-t-il déclaré.
Loin d’être une simple unité cosmétique, la « police de proximité incarne, selon l’expert, un changement de paradigme, un nouveau mode de fonctionnement au sein de la PNC. Cela implique de débarrasser la PNC de tous les signes de l’Armée, qu’il s’agisse des grades, des tenues ou des équipements qui semaient la confusion. Ceci pour avoir une police unique, intégrant en son sein une police administrative et une police judiciaire, cette dernière relevant autrefois du Parquet sous la houlette d’un Commissaire divisionnaire, épaulé par trois adjoints dédiés respectivement à l’administratif, au judiciaire et à la gestion des ressources humaines. Une architecture stratégique reposant sur 19 objectifs précis, dont l’atteinte signifiera, selon M. Wire, le succès de la réforme.
Des défis à la hauteur des ambitions
Cette vision, bien que porteuse d’espoir, se heurte à des défis considérables, comme l’a exposé le Commissaire divisionnaire adjoint Sebastien Ebua Gobula, Coordonnateur national de la Cellule de la Réforme de la Police. Difficultés financières et techniques, déficit de formation des agents, maintien en activité de policiers ayant atteint l’âge de la retraite et, surtout, une maîtrise encore parcellaire des effectifs à travers le vaste territoire national. A ce jour, a-t-il révélé, il n’y a que 4 provinces où les effectifs policiers sont maîtrisés, citant Kinshasa, le Kasaï, l’Equateur et l’Ituri.
Face à ce constat, un appel vibrant a été lancé aux parlementaires : celui de plaider pour que le gouvernement alloue les moyens nécessaires à la modernisation de la police et à l’amélioration des conditions de vie et de travail de ses agents. « La réforme de la Police n’est pas une affaire de la Police elle-même. C’est l’affaire de toute la population représentée par les constituants que vous êtes, » a martelé le Coordonnateur Ebua Gobula, implorant les élus de veiller scrupuleusement à l’exécution de la loi de programmation.
En écho, le Vice-premier ministre Jacquemain Shabani a exprimé son souhait ardent de voir la PNC se doter d’un cadre légal à la mesure des ambitions de la République Démocratique du Congo. Cet atelier marque ainsi une étape cruciale, où le pouvoir législatif s’approprie les outils pour accompagner et façonner une réforme essentielle à la consolidation de l’État de droit et à la sécurité de tous les Congolais.
La Pros.