(Par Rhodes Masamba, journaliste indépendant)
Sous d’autres latitudes, un lanceur d’alerte se reconnaît à la rigueur de son travail, à la solidité des preuves qu’il avance, à la force tranquille des faits qui résistent au moindre examen. En RDC, certains se sont autoproclamé « gardiens de la transparence », mais se transforment en fabricants de rumeurs. Ils dégainent des accusations sans la moindre pièce à conviction, jonglent avec les approximations, et confondent diffamation avec vigilance citoyenne. Ce ne sont pas des chiens de garde de l’intérêt général, mais des aboyeurs au service d’agendas inavoués. En s’enivrant de leurs propres excès, ils sapent la crédibilité d’un secteur vital, salissent la noble cause de la bonne gouvernance, et piétinent le travail acharné des ONG qui, elles, œuvrent réellement à la transparence et au contrôle citoyen.
Un tandem qui confond vigilance et calomnies
Deux figures illustrent la dérive des faux « lanceurs d’alerte » : Ernest Mpararo et Florimond Muteba, Présidents respectifs de la LICOCO et de l’ODEP. Toujours promptes à brandir la calomnie comme arme politique, ils se sont depuis longtemps érigés en procureurs autoproclamés, sans jamais apporter la moindre preuve de leurs accusations.
Florimond Muteba en est l’illustration parfaite : poursuivi pour diffamation par la DG adjointe de l’ARPTC, Lydie Omanga, qu’il accusait de percevoir des centaines de milliers de dollars par mois, il s’est présenté devant les juges les mains vides, incapable de produire le moindre document crédible sous-tendant ses affirmations.
Loin d’en tirer une leçon, le tandem récidive. En octobre 2024, ils publient une brochure accusant plusieurs responsables politiques de détournement. Le 5 septembre 2025, Mpararo en rajoute une couche sur les réseaux sociaux : il accuse l’ex-ministre du Développement rural, François Rubota, et l’ancien ministre des Finances, Nicolas Kazadi, d’un détournement fictif de 400 millions USD liés aux forages et à l’éclairage public.
Cette accusation trahit deux choses : leur ignorancedes mécanismes institutionnels et leur volonté obsessionnelle de nuire. Ce n’est plus de l’alerte citoyenne, c’est de la mise à mort politique. « Ces gens ne condamnent pas la corruption, ils en vivent », accuse un activiste de la société civile.
Accusations fantaisistes sur les forages, lampadaires et l’Aréna
Imaginer qu’un Ministre des Finances puisse contrôler, à lui seul, des dizaines de milliers de projets sectoriels chaque année, pour un budget de plus de 14 milliards USD, relève de la folie pure. Son rôle est celui d’agent payeur, pas de superviseur de chantiers. Cette évidence n’empêche pourtant pas le duo Mpararo–Muteba de construire leurs fables.
La farce des chiffres sur l’Aréna
Le 16 septembre 2025, Mpararo s’illustre encore : sur les réseaux sociaux, il brandit un tableau bricolé, accusant la société turque Milvest d’avoir déjà encaissé 104 millions USD pour Kinshasa Aréna et de réclamer 80 millions de plus. Dans un théâtre grotesque, il interpelle Nicolas Kazadi par un « Ya Nico, tosala yo nini ? », insinuant un détournement, en prétendant même tenir ses chiffres du ministre actuel des Finances.
La vérité est tout autre. Dans leur brochure, ils parlaient de 126 millions USD « détournés » par Kazadi. Faux. Le coût réel de l’Aréna est de 104 millions USD, négociés par Kazadi avec Milvest sur instruction du Chef de l’État. Avant cette renégociation, un contrat signé par Alexis Gisaro avec Summa fixait la facture à… 175 millions USD ! Kazadi a donc fait économiser plus de 70 millions au pays.
Et que dire des « paiements encaissés » ? Au moment où le Ministre Kazadi quittait le gouvernement en juin 2024, Milvest n’avait touché que 31,1 millions USD, soit 29,9 % du contrat, alors que 60 % des travaux étaient déjà réalisés grâce à ses préfinancements. Les accusations de Mpararo ne sont pas des révélations : ce sont des contes.
Si par la suite d’autres paiements ont été effectués pour atteindre ou s’approcher des 104 millions, c’est à Doudou Fwamba qu’il faut demander à quoi ont servi ces paiements. Et si détournement il y a, c’est à ce dernier de s’en expliquer.
En réalité, Mpararo et Muteba semblent être les seuls Congolais à ignorer que les travaux de l’Aréna touchent à leur fin, bloqués uniquement par la rétention de plusieurs centaines de conteneurs de matériels au port de Matadi, à la suite du refus du Ministère des Finances d’honorer ses engagements contractuels.
Le dossier lampadaires : vérité étouffée
L’affaire des lampadaires relevait du Gouvernorat de Kinshasa, pas du ministère des Finances. Pourtant, là encore, Kazadi a imposé la transparence : ouverture d’un compte séquestre dédié au projet, décaissements surveillés et paiements directs aux fournisseurs.
Les chiffres eux-mêmes trahissent les manipulations :
- Solektra : meilleure offre technique, meilleure luminosité, batteries plus puissantes, et prix plus bas (4 936 USD par kit).
- Proton : offre plus faible et plus chère (6 147 USD par kit).
Rappelons que Proton est lié au groupe Rawji et donc protégé par Jules Alingete. Voilà la réalité que Mpararo et Muteba passent soigneusement sous silence.
Le verdict : les nouveaux marchands de rumeur
Ignorance volontaire, manipulation assumée et mensonges répétés : voilà la recette de ce duo. Ils ne cherchent pas la vérité, ils fabriquent le soupçon. Et ils osent appeler cela « alerte citoyenne ».
En réalité, leurs accusations ne sont que des accusations fantaisistes, conçues pour salir, jamais pour informer.
Le rôle du groupe Rawji et l’ombre d’Alingete
Tout devient clair : Proton appartient au groupe Rawji, client majeur du cabinet privé DA Consulting Office (DACO Sarl), propriété de Jules Alingete, inspecteur général des finances à l’époque des faits. Pour camoufler ce conflit d’intérêts flagrant, ce dernier n’a pas hésité à jouer sur les lettres, transformant son nom en « Alingeti » dans les documents officiels. Une astuce de faussaire, indigne d’un haut fonctionnaire censé incarner la probité.
Les révélations du média LSI en 2024 sont accablantes : documents à l’appui, elles exposent l’implication d’Alingete dans un vaste scandale de fraude fiscale et douanière impliquant les fleurons du groupe Rawji — Prodimpex, Beltexco, Rawbank, Proton, Park Land, Rafi, Congo Infra, Marsavco. Des flux financiers suspects, chiffrés à près de 30 millions USD, auraient transité vers des comptes liés directement ou indirectement aux opérations de fraude pilotées par le patron de l’IGF.
Face à de tels éléments explosifs, silence radio du tandem Mpararo–Muteba. Pire : ils se transforment en boucliers humains et médiatiques de leur protecteur. En avril 2024, Mpararo l’avouait sans détour : « La société civile doit défendre ses partenaires », avait-il déclaré en volant au secours d’un IGF convoqué par la Cour des comptes pour malversations dans le dossier d’un audit à la Gécamines illégalement transformé en contrat de consultance. Une confession publique de dépendance, qui révèle la soumission intéressée de ces « activistes ».
Car il y a plus grave encore : Mpararo et Muteba n’étaient pas seulement solidaires par idéologie, mais par intérêt sonnant et trébuchant. Ils ont été bénéficiaires de jetons de présence indus prélevés sur les fonds d’infrastructures de Sicomines. Entre 50 000 et 100 000 dollars, selon des sources concordantes. De quoi expliquer leur zèle à relayer les campagnes de boue de leur bienfaiteur, en ciblant systématiquement ses adversaires politiques.
Où est la faute de Nicolas Kazadi ?
Dans le dossier des lampadaires, la gestion des fonds ne révèle pas une faute, mais au contraire une prudence exemplaire. Le 23 juin 2022, Nicolas Kazadi refuse que l’argent soit versé sur le compte général de fonctionnement de la Ville de Kinshasa. Il exige un compte séquestre dédié, afin que chaque dollar soit traçable. Deux jours plus tard, la Sofibanque ouvre deux comptes distincts, dont un en dollars, réservé exclusivement au contrat Solektra.
Les décaissements suivent une procédure transparente et contrôlée.
- Juillet 2022 : 4,1 millions USD, validés par Kazadi et surveillés par l’IGF.
- Janvier 2023 : 5,4 millions USD.
Intervient une tentative de détourner le second paiement vers le compte de fonctionnement de la Ville, avec la complicité de l’IGF qui avait autorisé l’opération par sa lettre du 13 janvier 2023. Celle-ci fut immédiatement bloquée par Kazadi, qui ordonna que le fournisseur soit payé directement afin d’éviter d’éventuelles opérations retour. Dès lors, la question s’impose : quelle faute peut-on reprocher à Nicolas Kazadi ?
Les faits, clairs et documentés, prouvent sa vigilance. Ils démontrent que loin de favoriser l’opacité, il a renforcé la transparence. Ce qui du reste a sauvé le projet.
Les accusations lancées contre lui ne résistent donc pas à l’épreuve de la vérité. Elles ne sont pas des révélations, mais des fabrications. Elles ne relèvent pas du contrôle citoyen, mais du tapage médiatique de quelques agitateurs remplis de haine et de jalousie face aux succès d’autrui.
Vers une action judiciaire contre Mpararo, Muteba et consort ?
En définitive, le projet des forages illustre bien la manière dont certaines accusations portées contre Nicolas Kazadi relèvent plus de la rumeur que de l’analyse factuelle. Comme pour les lampadaires ou l’Aréna, le rôle du ministre des Finances se limitait à assurer le paiement des fonds validés par les ministères techniques compétents, sans jamais se substituer à eux dans la gestion opérationnelle des projets. En l’absence de preuves tangibles de détournement, les insinuations répétées ne traduisent qu’une volonté de nuire, au détriment de la vérité et de la crédibilité même des prétendus lanceurs d’alerte.
Des sources proches de Nicolas Kazadi indiquent que ce dernier n’écarte pas la possibilité de saisir la justice contre MM. Mpararo, Muteba et consort, estimant que leurs accusations relèvent d’imputations dommageables répétitives, téméraires, vexatoires et sans fondement.
Ces propos, avancés sans aucune preuve, visent selon elles à ternir son honneur, sa considération d’ancien Haut fonctionnaire international, sa réputation de député national et sa dignité d’ancien ministre. Elles soulignent en outre que le procureur général, seul garant de l’ordre public, n’a retenu aucune infraction à sa charge, ce qui rend ces insinuations d’autant plus malveillantes.
Pour son entourage, les publications incriminées n’avaient pour but que de le livrer au mépris du public et de semer le doute auprès de ses électeurs. En agissant ainsi, poursuivent-elles, leurs auteurs se substituent abusivement au ministère public et contreviennent aux dispositions légales, notamment l’article 360 de la loi sur le numérique et l’article 74 du Code pénal, qui prohibent la diffusion de fausses informations et toute atteinte à l’honneur et à la réputation.
C’est fort de ces considérations que M. Kazadi envisagerait sérieusement de porter plainte, afin de mettre un terme à ce qu’il considère comme un préjudice grave et persistant.
Kazadi rétablit les faits et n’exclut pas la voie judiciaire
Nous avons interrogé l’ancien ministre des Finances sur la campagne nauséabonde lancée par deux « lanceurs d’alerte » autoproclamés et sur son intention d’ester en justice.
« De ma longue expérience de praticien du développement au Congo et à travers le monde, je n’ai jamais assisté à un tel acharnement bâti sur l’ignorance des règles juridiques et des réalités techniques des projets » a répliqué M. Kazadi. « On a précipité la pénalisation d’un contrat de cinq ans alors qu’il n’en était qu’à sa première année de mise en œuvre. Résultat : aujourd’hui, personne ne sait qui suit réellement ce projet qui, soit dit en passant, n’a pas été suspendu ni annulé par la justice. Je suis le premier à exiger qu’on dise clairement si les travaux continuent et où en est l’installation des stations de forages. Laisser un projet de cette ampleur dans le flou est inacceptable. »
Sur les attaques personnelles, il n’a pas mâché ses mots : « J’ai de quoi pulvériser devant la justice ceux qui ont fait de la calomnie contre ma personne leur gagne-pain » a-t-il déclaré. « Je n’ai pas encore pris de décision définitive à ce sujet, mais chaque jour qui passe, ils s’effondrent eux-mêmes par leurs propres contradictions. Et ce spectacle pathétique ne fait que me faciliter la tâche. »