Pour la première fois, la République démocratique du Congo a pris part à la Journée internationale de la femme pêcheuse, célébrée désormais le 5 novembre de chaque année à travers le monde, à la suite de son officialisation lors du Forum mondial des peuples pêcheurs tenu au Brésil sous l’égide de la coopération des Nations Unies.
A cette occasion, le Réseau pour le Développement Intégral du Congo (REDIC-AWFISHNET-RDC), structure d’encadrement des acteurs non étatiques du secteur halieutique, a organisé une cérémonie nationale marquant l’entrée officielle du pays dans cette célébration mondiale.
Au cours de cette cérémonie, une déclaration solennelle des Femmes Pêcheuses, Mareyeuses et Transformatrices de la RDC a été lue par Madame Patricia Maisha, présidente et coordinatrice nationale du REDIC, le samedi 8 novembre 2025.
Cette déclaration marque le lancement officiel d’une campagne de cinq semaines de célébration des droits des acteurs de la pêche artisanale.
Une déclaration pour la reconnaissance et la dignité des femmes du secteur halieutique
Dans cette déclaration, les femmes pêcheuses de la RDC ont exprimé leur fierté, mais aussi leur détermination à poursuivre le combat pour la reconnaissance de leurs droits. Elles ont dénoncé les menaces croissantes qui pèsent sur leurs milieux de vie : accaparement des rivières et lacs, exploitation minière dans les zones aquatiques, aquaculture industrielle incontrôlée et crise climatique qui fragilisent les écosystèmes.
«Les femmes pêcheuses ne sont pas des contributrices marginales, mais des actrices essentielles dans la vie, la culture et l’économie des pêcheries », souligne la déclaration.
Selon la FAO, près de 90% du travail post-capture (transformation, conservation, commercialisation) est assuré par des femmes, mais leur contribution reste largement invisible dans les statistiques, les politiques publiques et les instances décisionnelles.
Les femmes au cœur de la pêche artisanale
Les femmes pêcheuses, mareyeuses et transformatrices sont décrites comme les “mains invisibles” de la pêche artisanale : elles gèrent les marchés, préservent les savoirs traditionnels, réparent les filets, transmettent les connaissances écologiques et soutiennent l’économie familiale.
Pourtant, le modèle de développement patriarcal continue de les marginaliser, limitant leur participation à la gouvernance du secteur.
La déclaration propose ainsi une perspective féministe et inclusive de la pêche, fondée sur la justice de genre, la souveraineté alimentaire et la protection des écosystèmes aquatiques.
Des revendications claires et structurées
Parmi les principales revendications portées par les femmes pêcheuses de la RDC figurent :
Une représentation et un leadership égal des femmes dans les institutions et coopératives de pêche ;
La reconnaissance juridique des femmes comme titulaires de droits à part entière dans les lois et politiques halieutiques ;
La protection des eaux intérieures, côtières et fluviales contre l’accaparement ou la privatisation ;
L’inclusion des femmes dans les mécanismes d’indemnisation post-catastrophes ;
L’accès à une protection sociale, à des crédits équitables et à des marchés justes ;
L’interdiction de l’aquaculture destructrice et de l’exploitation minière dans les zones de pêche artisanale ;
La reconnaissance des savoirs traditionnels et du contrôle communautaire des ressources aquatiques.
Une campagne nationale de cinq semaines pour unir les voix du secteur
La campagne de cinq semaines de célébration des droits des acteurs de la pêche, lancée le 6 novembre, s’articule autour de trois grandes dates :
5 novembre : Journée internationale des femmes pêcheuses ;
21 novembre : Journée mondiale des peuples pêcheurs et de la pêche artisanale ;
10 décembre : Journée internationale des droits de l’homme.
Cette campagne se déroule sous le thème : « Des rivières vers l’océan : Notre travail, Nos droits »
Elle vise à rendre visible le rôle vital des femmes, promouvoir la pêche artisanale durable, et lier les droits des communautés riveraines aux droits humains universels.
La clôture de cette campagne, prévue pour le 10 décembre 2025, coïncidera avec la Journée internationale des droits de l’homme, renforçant le message d’unité entre droits humains, justice climatique et égalité des genres.
Cette première édition marque un tournant historique pour la RDC, qui s’affirme désormais comme un acteur engagé dans la défense des droits des femmes du secteur halieutique à l’échelle internationale.
« Nous sommes les océans, nous sommes les rivières, nous sommes les lacs… Quand l’eau respire, nous respirons. Sa vie est notre vie », conclut la déclaration, dans une formule poétique symbolisant la symbiose entre les femmes et la nature.
Sous le leadership de Madame Patricia Maisha et du REDIC-AWFISHNET-RDC, cette mobilisation nationale ouvre la voie à une nouvelle ère de reconnaissance, de plaidoyer et de solidarité pour les femmes pêcheuses congolaises, piliers de la sécurité alimentaire et gardiennes des eaux du pays.
Bosco Kiaka
