Du 14 au 15 novembre 2025, la belle ville de Midrand confinée entre Johannesburg et Pretoria a accueilli la réunion parlementaire préparatoire au Sommet de l’Union africaine-Union européenne. Sous la co-présidence de Chief Fortune Charumbira, Président du Parlement panafricain, et de Younous Omarjee, Vice-président du Parlement européen, les parlementaires des deux continents ont, pendant quarante-huit heures, planché sur le thème : « Renouveler la coopération parlementaire Afrique-Europe dans un contexte mondial en mutation ».
Tout récemment, le Parlement Panafricain dont le siège se trouve à Midrand en Afrique du Sud a organisé une session de réflexion sur les 25 ans de partenariat entre l’Afrique et l’Europe, en amont du Sommet UA-UE qui se tiendra à Luanda, capitale de la République d’Angola. Cette rencontre a rassemblé aussi bien les représentants de l’Union européenne, de l’Union africaine que d’Open Society Foundation, entre autres. Dresser un bilan honnête des réalisations, identifier les échecs et définir une voie gagnant-gagnant pour l’avenir, bénéfique aux deux continents. C’était cela l’objectif principal de ces assises.
Lors de la cérémonie d’ouverture modérée par madame Lindiwe Khumalo, greffier du PAP, et après le mot de circonstance du Président du Parlement panafricain, s’est tenue la Session I intitulée : « Paix et sécurité en Afrique et en Europe : responsabilité partagée et action collective ». A ce propos, deux intervenants se sont succédés sur la tribune. Il s’agit de S.E. Javier Nino Pérez, ambassadeur de l’UE auprès de l’Union africaine ainsi que du Professeur Fonte Akum de l’Institut d’études de sécurité (ISS).
A l’issue de la pause-café, la Session II a pris le relais autour du thème : « Porte d’entrée mondiale : Aligner les investissements sur les priorités de l’Afrique ». 5 orateurs ont défilé sur la tribune pour partager leurs réflexions avec l’assemblée plénière. Il s’agit de madame Lerato D. Mataboge, Commissaire aux Infrastructures et à l’Energie (DIE) (par visioconférence) ; madame Marie-Antoinette Rose Quatre, directrice générale du Mécanisme africain d’examen ; monsieur Domenico Rosa, chef d’unité, Direction générale des partenariats internationaux, Commission européenne (par visioconférence) ; madame Geneviève Dehoux, chef d’équipe, Direction générale des partenariats internationaux ; et de madame Holy Ranaivozanany, directrice exécutive adjointe, Fondation Afrique-Europe (à distance).
Messages-clés
Primo, lors de la réunion de renouvellement du partenariat, les intervenants sont revenus sur les fondements de cette relation, bâtie sur la stratégie conjointe Afrique-UE de Lisbonne en 2007, qui visait à promouvoir la paix, la bonne gouvernance, l’égalité et le développement durable. Deux messages clairs en sont ressortis : « il est temps de repenser et de moderniser ce partenariat afin qu’il reflète l’évolution des priorités de l’Afrique et les réalités mondiales actuelles ; l’Afrique ne doit plus être un partenaire mineur, mais une voix à part entière pour façonner son propre avenir.
Secundo, le rôle croissant de l’Afrique dans le monde. En effet, l’Afrique représente aujourd’hui 17% de la population mondiale et se classe au neuvième rang des économies mondiales, mais ne contribue qu’à hauteur de 3 à 4% au PIB mondial. Ce paradoxe – une Afrique riche en ressources mais peu de retombées économiques – aura été au cœur des préoccupations. Les intervenants ont souligné que l’Agenda 2063, vision à long terme de l’Union africaine, offre une feuille de route pour un continent plus autonome, pacifique et prospère. Un renforcement du commerce intra-africain, de l’industrialisation et du développement humain a été présenté comme la voie à suivre.
Tertio, l’évolution de la position de l’Europe. Plusieurs participants ont reconnu que la domination traditionnelle de l’Europe en Afrique s’estompe. Avec l’arrivée des nouveaux acteurs comme la Chine, les Etats-Unis, la Turquie et d’autres qui renforcent leurs liens sur le continent, la nature des partenariats extérieurs se transforme. Les politiques européennes en matière de migration et de sécurité ont également fait l’objet de critiques ouvertes, beaucoup les jugeant déséquilibrées et opportunistes. L’appel était lancé en faveur d’un partenariat fondé sur la dignité, l’équité et le respect mutuel, et non sur la dépendance.
Quarto, lacunes institutionnelles et de gouvernance. L’influence limitée du Parlement panafricain dans la gestion et le contrôle des initiatives UA-UE a été perçue comme une occasion manquée. Les participants ont insisté sur le fait que la voix des citoyens africains, par le biais de la représentation parlementaire, devrait jouer un rôle beaucoup plus important dans la négociation, la mise en œuvre et l’évaluation du partenariat. La transparence et la responsabilité doivent être au cœur de tout futur cadre de coopération.
Recommandations-clés
Les participants à ce forum ont formulé quelques recommandations pour résoudre ces différentes problématiques. Les voici :
- Reconstruire le partenariat sur l’égalité : dépasser la mentalité donateur-bénéficiaire et créer un véritable partenariat de copropriété ;
- Renforcer les institutions africaines : Donner au Parlement panafricain un rôle officiel dans la supervision et le suivi des partenariats ;
- Promouvoir la transformation économique : privilégier la valeur ajoutée, la croissance industrielle et le développement du capital humain plutôt que les exportations des matières premières ;
- Adopter des politiques migratoires équitables : les migrations doivent être gérées de manière humaine et respectueuse, en reconnaissant les droits des Africains à la mobilité ;
- Reformer la coopération en matière de sécurité : accroitre la transparence du commerce des armes et réduire l’ingérence extérieure dans les questions de sécurité africaines ;
- S’aligner sur l’Agenda 2063 : veiller à ce que toutes les initiatives futures soient conformes à la vision et aux objectifs de développement à long terme de l’Afrique.
Lors de la journée de clôture, le samedi 15 novembre 2025, ont eu lieu la Session III – Jeunesse, mobilité et développement des compétences pour l’avenir de même que la Session IV – Renforcement du multilatéralisme et de la coopération parlementaire UE-UA. Cette cérémonie a été co-présidée par madame Hilde Vautmans, Présidente de la délégation du Parlement européen auprès de l’Assemblée parlementaire Afrique-UE, et Chief Fortune Charumbira, Président du Parlement panafricain.
C’est sur une note de satisfaction et d’espoir que les lampions se sont éteints à Midrand en fin d’après-midi. Pour la toute première fois dans l’histoire du continent, le Sommet du G20 de 2025 se tient à Johannesburg en Afrique du Sud du 22 au 23 novembre. Pour que le G20 puisse contribuer de manière significative à la résolution de la polycrise à laquelle le monde est confronté, le pays hôte a adopté le thème suivant : « Solidarité, Egalité, Durabilité ». Les grands de ce monde y sont attendus.
James Mpunga Yende, Envoyé spécial à Midrand, South Africa