
(Par Jean-Denis Kasese, Professeur des Universités et Chercheur)
Alors que la rhétorique et les théories magnifiant les démocraties occidentales et considérant la RD Congo comme une « jeune démocratie », perdurent, se raffermissent et écrasent, d’une part ; déroutent, désorientent, et recolonisent le mental des Congolais, d’autre part ; appuyées et véhiculées par intermittence, par des dirigeants politiques occidentaux et leurs relais, et cela, dès la fin de la colonisation, mais aussi, après la chute du mur de Berlin et le discours de La Baule, se concrétisent dans le fait par le fiasco de la tentative de l’occidentalisation de l’exercice démocratique du pouvoir en RD Congo et de l’espace politique congolais, à travers l’instauration des partis politiques importés dont le nombre exorbitant reflèterait leur inadaptation ; et l’instauration du parlementarisme importé…
En effet, faute de prise en compte des réalités propres à la RD Congo, de la dimension culturelle et de l’identité congolaises, dans l’Organisation et la répartition des pouvoirs, dans le fonctionnement des structures étatiques tels que stipulés dans plusieurs Constitutions de la RD Congo ; mais aussi, faute d’un nombre conséquent d’hommes et de femmes politiques intègres ; Ce serait ainsi que l’imposition, la transposition et l’inadaptation des partis politiques importés dans l’exercice du pouvoir en RD Congo, les transformèrent, dans la quasi-totalité de cas, en des tremplins, ascenseurs, passerelles, ou escaliers néo-patrimoniaux ayant pour missions d’accéder coûte que coûte au pouvoir afin de faire du business, de s’accaparer du contrôle des ressources financières et économiques pour se servir et s’en servir ; mais aussi, de placer les leurs aux leviers de commandement dans toutes les sphères du pouvoir et de la vie nationale ; pour s’en convaincre, la politisation à outrance de l’Administration publique en serait une belle illustration ; et cela se ferait très souvent, sur base des critères non objectifs, c’est-à-dire, autres que la compétence et l’intégrité, en clair, des critères centrés sur le militantisme, la reconnaissance, l’affinité, le copinage, le clientélisme, le népotisme, le provincialisme, le clanisme, le tribalisme, … Ce serait dans ce sens que, la quasi-totalité de partis politiques congolais, après la chute du mur de Berlin et le discours de La Baule, jusqu’à nos jours, quel que soit leur classification ou leur bord (du Pouvoir ou de l’Opposition), se comporteraient en partis néo-patrimoniaux.
Dans ce même registre, pour les mêmes motifs, le parlementarisme importé se transformerait aussi en business, en parlementarisme néo-patrimonial ! Pour s’en convaincre, et à titre illustratif, l’actualité politique récente nous révélerait bien de choses ! On postulerait aux sénatoriales et à la députation provinciale, notamment pour le business. Les élections décriées des Sénateurs et des Gouverneurs de Provinces, élus par des Députés provinciaux en diraient long.
On postulerait aussi à la députation nationale, notamment pour le goût du lucre, pour profiter des émoluments attrayants, pour faire du business, parfois en se rebellant par chantage et par manque de discipline de parti, contre les directives de son parti politique avant de voter telle ou telle loi, telle ou telle réforme, …voire-même avant d’investir le Gouvernement émanant de la majoritaire parlementaire ou de la Coalition majoritaire dont on appartient.
Pour les mêmes motifs, on se rebelle aussi parfois contre la Plateforme électorale dont on fait partie. La récente élection des membres du bureau effectif de l’Assemblée Nationale, en serait une bonne illustration. Les menaces de dissolution de l’Assemblée Nationale proférées récemment par le Président de la République, Félix Tshisekedi, à l’encontre de députés nationaux de sa propre Plateforme électorale, l’Union Sacrée de la Nation, justement suite à leur comportement, notamment à l’occasion du vote des membres du bureau définitif de l’Assemblée Nationale, seraient révélatrices et en diraient long.
Alors que la Constitution de la RD Congo est importée, occidentalisée, conçue et rédigée en Occident, qualifiée par d’aucuns de « Constitution des Belligérants » votée par référendum constitutionnel que le « Sphinx de Limete », « Héros National », Etienne Tshisekedi wa Mulumba , d’heureuse mémoire, avait demandé aux Congolais de boycotter afin de ne pas « cautionner cette trahison » ; et par d’autres, à l’instar de Delphine Pollet-Panoussis , de « Petite sœur africaine de la Constitution française », comme si la culture et l’identité françaises étaient similaires à celles de la RD Congo ; C’est-à-dire, les réalités, les problèmes et les besoins culturels, politologiques, sociologiques, économiques, juridictionnels, sociaux, … français étaient les mêmes que ceux de la RD Congo ; et de surcroît, comme s’il n’y avait pas de savants congolais capables de réfléchir sur la conception, l’élaboration, la rédaction et la mise en œuvre de la Constitution de leur propre pays, tout en prenant en compte, la dimension culturelle et l’identité congolaises.
Alors que, contrairement à l’idée reçue, à la croyance, et au discours largement véhiculés ou répandus, et aux usages ; dans un Régime Semi-Présidentiel comme celui de la RD Congo, la Constitution donne au Premier Ministre, et au Président de la République, la possibilité de proposer et de nommer aussi, dans l’équipe gouvernementale, des personnes n’appartenant ni à la Majorité parlementaire, ni à la Coalition majoritaire, ni aux partis politiques. Ils sont donc libres, ils ont un réel pouvoir et un choix réel car, aucune disposition constitutionnelle ou législative n’a régi l’appartenance des autres Membres du Gouvernement lors de leur nomination ; mais dans le fait, avant la publication du Gouvernement Judith Suminwa Tuluka, c’est-à-dire, avant que le Président de la République, Félix Tshisekedi, déplace le Centre de gravité gouvernemental en instaurant un Nouvel Ordre Politique, donc en nommant dans cette équipe gouvernementale, un ministre venant de l’Opposition et une ministre n’appartenant ni à la Coalition majoritaire ni aux Partis politiques, ainsi qu’en appliquant le Régime d’Inégalités Correctrices, c’est-à-dire, en corrigeant une inégalité qui a perduré, centrée sur le nombre insignifiant des Femmes dans des Gouvernements congolais successifs ; les partis politiques se seraient toujours comportés en prédateurs des portefeuilles ministériels, en bloquant cette possibilité, et en faisant croire aux non-initiés que la totalité des portefeuilles ministériels leur revenait de droit, et pour devenir ministre ou membre du Gouvernement en RD Congo, il faudrait être membre d’un parti politique de la Majorité parlementaire ou de la Coalition majoritaire ; comme si le salut du peuple congolais proviendrait seulement des Partis politiques, mais aussi, comme si toutes les compétences du pays se retrouveraient seulement dans les partis politiques !
Alors que l’instauration des modèles importés de Partis politiques en RD Congo, selon la rhétorique, était censée aider à résoudre les problèmes de la RD Congo en boostant son développement intégral ; antinomiquement, depuis que les partis politiques importés dominent la scène politique congolaise et l’exercice du pouvoir en RD Congo, ils auraient amplifié davantage les problèmes, alors qu’ils étaient censés les résoudre !
Tout compte fait, dorénavant, l’heure devra plutôt être centrée sur la prise de conscience des Congolais afin que son élite repense l’exercice démocratique du pouvoir en RD Congo, tout en prenant en compte, l’épaisseur de la constellation des réalités, des problèmes et des besoins culturels, politologiques, sociologiques, économiques, juridictionnels, sociaux, … congolais ; c’est-à-dire, l’épaisseur de la constellation de la dimension culturelle et de l’identité congolaises, remparts de l’exercice démocratique authentique et souverain du pouvoir en RD Congo ; mais aussi, de se souvenir que la démocratie n’est pas étrangère à la RD Congo. En effet, la RD Congo n’est pas une « jeune démocratie », elle est plutôt une « vieille démocratie », une « démocratie culturelle » car le Congo précolonial fut une terre culturelle de prédilection de l’exercice démocratique du pouvoir. J’y reviendrai. Cela dit, c’est pourquoi une analyse scientifique centrée sur la Neutralité Axiologique a été mobilisée et, est entrée en lice afin de tenter d’éclairer la lanterne des Congolais.
Ma réflexion « La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n’est aux faits eux-mêmes, parce que pour elle, se soumettre, ce serait cesser d’être. »
Même si intuitivement à cause de la contagion mentale, de la dictature de la rhétorique et des théories prônant la magnificence des démocraties occidentales, on croit savoir ce que c’est la démocratie dans l’exercice du pouvoir ; la définir sans tenir compte de la dimension culturelle et de l’identité des Sociétés ou des États dans lesquels l’on se trouve ; c’est-à-dire, sans tenir compte de leur histoire, de leurs problèmes, de leurs expériences et réalités propres, de leurs besoins, …. ; est un sacré problème, une sacrée difficulté. Sous cet angle, parler des Sociétés ou des Etats démocratiques, ne devrait plus nous renvoyer seulement au binôme occidental dicté, imposé, et dit « sacré » et « incontournable », en l’occurrence, « le mode de désignation par des élections générales organisées, des acteurs ou animateurs politiques émanant ou pas des partis politiques » et « l’exercice quotidien, réel, et effectif du pouvoir pour l’intérêt général et le respect des droits et libertés individuels. »
Approcher la complexité de ce phénomène seulement sous cet angle, ce modèle occidental, ce binôme occidental, serait scientifiquement suicidaire car cette approche a été remise en cause et devrait l’être davantage. Même en Occident, ce binôme dit « sacré » n’est pas toujours respecté dans des pays qui se considèrent ou sont considérés comme des « Vieilles ou Grandes démocraties » car, certains de leurs acteurs politiques de premier plan, en l’occurrence, des Chefs d’Etat, arrivent au pouvoir sans se soumettre à la compétition, aux élections générales, au suffrage universel, mais, sont toutefois considérés comme des démocrates, de par leur exercice du pouvoir.
D’autres par contre, sont arrivés au pouvoir par des élections générales qu’ils ont remportées mais leur exercice du pouvoir fut autoritaire, dictatorial ! Pour s’en convaincre, et afin de détruire la thèse qui soutient l’incontournabilité de ce binôme, j’ai tenté de détruire le premier élément de ce binôme, en l’occurrence, « Le mode de désignation, par des élections générales organisées, des acteurs ou animateurs politiques émanant ou pas des partis politiques ». J’ai tenté de le faire, en mettant en relief deux illustrations centrales, tirées des expériences occidentales.
I. Tentatives de destruction de l’incontournabilité du premier élément du binôme
I.1. Première illustration :
Question 1 : En Occident, existe-t-il encore des Royaumes, des Monarchies ?
Réponse 1 : Bien sûr que oui ! Pour s’en convaincre : l’Angleterre, la Belgique, l’Espagne, la Hollande, la Norvège, la Suède, … sont des Royaumes, des Monarchies.
Question 2 : Quel est le mode de désignation d’un Roi, d’une Reine, en Occident « moderne » ?
Réponse 2 : On n’organise pas des élections générales pour élire un Roi ou une Reine. Ils les deviennent par Héritage. En clair, le Roi ou la Reine, ne sont pas élus par leur peuple au suffrage universel. C’est par Héritage qu’ils arrivent au pouvoir, parce qu’ils sont héritiers du trône et appartiennent au lignage régnant, à la Famille royale, comme cela fut aussi le cas, à titre illustratif, en Afrique Noire précoloniale.
Question 3 : On dit souvent que le Roi ou la Reine en Occident « moderne », ne gouvernent pas, ils règnent seulement, sans réels pouvoirs ! Est-ce vrai ?
Réponse 3 : En tant que Chefs d’Etat, même s’ils ne sont pas effectivement Chefs de Gouvernement selon leurs différents régimes politiques, entendus comme organisation et répartition de pouvoirs, donc, « Ce qui doit être » ; mais en réalité, constitutionnellement, ils détiennent des réels pouvoirs, et influent sur le fonctionnement de leurs pays à travers la gestion quotidienne de la chose publique, et cela, grâce à leurs Systèmes politiques, entendus comme, comment est-ce que le Pouvoir est réellement exercé, c’est-à-dire, « Ce qui est ».
Sous ces angles, ils jouent un rôle politique important et pesant ; un rôle politique qui n’est nullement symbolique, contrairement au discours, à la croyance et à l’idée largement véhiculés et répandus. Pour s’en convaincre, prenons le cas de la Belgique, et mettons en exergue certaines dispositions constitutionnelles de la Constitution belge du 17 février 1994, qui nous renseignent sur les pouvoirs constitutionnels du Roi des Belges :
– « Le Roi n’a d’autres pouvoirs que ceux qui lui attribuent formellement la Constitution et les lois particulières portées en vertu de la Constitution même.»
– « Les pouvoirs constitutionnels du Roi sont héréditaires dans la descendance directe, naturelle et légitime de S.M. Léopold, Georges, Chrétien, Frédéric de Saxe-Cobourg, par ordre de primogéniture. »
– « Le Roi ne peut être en même temps, chef d’un autre Etat, sans l’assentiment des deux chambres. »
– « La personne du Roi est inviolable ; ses Ministres sont responsables. »
– « Le Roi nomme et révoque ses ministres. »
– « Le Roi nomme et révoque les secrétaires d’Etat fédéraux. »
– « Le Roi détermine leurs attributions et les limites dans lesquelles ils peuvent recevoir le contreseing. »
– « Aucun acte du Roi ne peut avoir d’effet s’il n’est contresigné par un ministre, qui par, cela seul, s’en rend responsable. »
– « Le Roi confère les grades dans l’armée. »
– « Il nomme aux emplois d’administration générale et relation extérieure, sauf les exceptions établies par les lois. »
– « Il ne nomme à d’autres emplois qu’en vertu de la disposition expresse d’une loi. »
– « Le Roi fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, en dispenser de leur exécution. »
– « Le Roi sanctionne et promulgue les lois. »
– « Le Roi a le droit de remettre ou de réduire les peines prononcées par les juges, sauf ce qui est statué relativement aux ministres et aux membres des Gouvernements de Communauté et région. »
– « Le Roi a le droit de battre monnaie, en exécution de la loi. »
– « Le Roi a le droit de conférer les titres de noblesse, sans pouvoir jamais y attacher aucun privilège. »
– « Le Roi confère les ordres militaires en observant, à cet égard, ce que la loi prescrit. »
– « Le Pouvoir législatif fédéral s’exerce collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat. »
– « Au Roi appartient le pouvoir exécutif fédéral, tel qu’il est réglé par la Constitution. »
– « Le Pouvoir judiciaire est exercé par les cours et tribunaux. »
– « Les arrêts et jugements sont exécutés au nom du Roi. »
– « Le Roi peut ajourner les Chambres. Toutefois, l’ajournement ne peut excéder le terme d’un mois ni être renouvelé dans la même session sans l’assentiment des Chambres. »
– « Le Roi n’a le droit de dissoudre la Chambre des représentants que si celle-ci, à la majorité absolue de ses membres : […] »
– « En outre, le Roi peut, en cas de démission du Gouvernement fédéral, dissoudre la Chambre des représentants après avoir reçu son assentiment exprimé à la majorité absolue de ses membres. »
Par ailleurs, techniquement et dans le fait, le Système politique belge nous renseigne que :
– C’est le Roi qui choisit l’Informateur et lui confie la mission de dégager une Coalition majoritaire. Et, en cas de succès de sa mission, et cela, sans obligation aucune pour le Roi ; celui-ci, peut le nommer comme Formateur du Gouvernement (Premier Ministre) ;
– Même s’il devra tenir compte de la situation parlementaire, le Roi est libre de choisir, selon les critères, que j’ose croire, objectifs et afin d’éviter une crise politique, l’Informateur, mais aussi, de nommer, le Formateur du Gouvernement ;
– Il est aussi libre de refuser de nommer un (e) Ministrable qu’on lui propose.
– Tous les membres du Gouvernement, prêtent serment devant lui.
I.2. Analyses
Les dispositions constitutionnelles mises en relief, ainsi que le Système politique belge, nous montrent à suffisance l’étendue des pouvoirs du Roi des Belges. Incontestablement, il a des pouvoirs immenses. Et de surcroît, même sa personne, est inviolable. La Constitution belge et le Système politique belge ont ainsi octroyé d’énormes pouvoirs à un acteur politique majeur, en l’occurrence, le Chef de l’Etat belge, qui n’a pas été soumis aux élections générales, c’est-à-dire, qu’il n’a pas été élu au suffrage universel par son peuple, vu qu’il est arrivé au pouvoir par Héritage. Sa légitimité est donc, selon la théorie de domination de Max Weber, traditionnelle.
Toutefois, on sait dans le fait, si nous devons commencer par le Roi Léopold 1er jusqu’à l’actuel Roi, le Roi Philippe, que leur exercice du pouvoir était, et est, démocratique. Dans cet ordre d’idées, les Rois Léopold 1er, Baudouin et Albert 1 er furent incontestablement des vrais démocrates ; et le Roi Philippe, l’actuel Roi des Belges, l’est également.
En somme, loin de prôner l’accession au pouvoir sans se soumettre à la volonté populaire, mais, toutefois, seulement par souci de ressortir l’ambiguïté du discours occidental en Afrique, en général, et en RD Congo, en particulier, sur le mode de désignation des Chefs d’Etat en Afrique ou en RD Congo ; cette première illustration mise en relief, nous a aussi démontrés à suffisance que, même si un acteur ou un animateur politique n’est pas élu par son peuple, son exercice du pouvoir peut être démocratique !
Je viens donc de détruire la thèse soutenant l’incontournabilité de ce binôme.
I.3. Deuxième illustration
Question 1 : L’exercice quotidien du pouvoir politique en Allemagne, sous Adolf Hitler, était-il démocratique ?
Réponse 1 : La réponse ne peut même pas souffrir d’un doute. L’exercice quotidien du pouvoir en Allemagne, sous Adolf Hitler, était dictatorial, autoritaire car Adolf Hitler était un despote. La deuxième question que l’on ne peut s’empêcher de poser, et qui nous ouvre un angle d’approche, un créneau de recherche, est celle de savoir ;
Question 2 : Comment Adolf Hitler était-il arrivé au pouvoir pour appliquer son programme politique ?
Réponse 2 : Sans pour autant reprendre son parcours politique, il convient de noter et de retenir, que l’avènement d’Adolf Hitler au pouvoir ne s’est pas fait du jour au lendemain, il fut en réalité, une construction. Rappelons en passant que la date du 28 février 1925 fut charnière pour l’avenir politique d’Adolf Hitler, car c’est en cette date qu’on décida de lever la mesure de l’interdiction de son parti politique, le National-Socialiste, le parti Nazi que le Gouvernement allemand ne jugeait plus comme étant dangereux.
Après les élections du 14 septembre 1930, le parti Nazi d’Adolf Hitler, devint la deuxième force politique du pays. Hitler revigoré par cette victoire et cette percée ; postula pour les élections présidentielles du 10 avril 1932 mais fut battu par le Président sortant, le maréchal Hindenburg, qui fut donc réélu.
Hitler obtint quand même un score important car plus du tiers de l’électorat vota pour lui. Après les élections législatives de juillet 1932, le parti Nazi devint la première force politique du pays, cependant le Président Hindenburg refusa de nommer Adolf Hitler comme Chancelier (Chef de Gouvernement). Dans l’impossibilité de dégager une Majorité au Reichstag (le siège du Parlement allemand), des nouvelles élections furent organisées en novembre 1932, mais Hitler avait reçu une claque car son parti avait perdu deux millions d’électeurs et 40 Députés, toutefois, il resta en bonne posture.
Le 30 janvier 1933, le Président Hindenburg, toujours dans l’impossibilité de dégager une Majorité, nomma finalement, Adolf Hitler, Chancelier de l’Allemagne. La première décision phare prise par Adolf Hitler, fut celle de dissoudre l’Assemblée Nationale. Ce fut ainsi que les nouvelles élections furent organisées en mars 1933.
Et, le 5 mars 1933, à la Proclamation des résultats, le parti Nazi, le National-Socialisme, triompha, ce fut ainsi qu’Adolf Hitler devint L’Homme fort de l’Allemagne, une occasion rêvée pour lui afin d’appliquer son programme politique, son projet de société, et il l’appliqua. Je viens donc de démontrer qu’Adolf Hitler est devenu Chancelier de l’Allemagne grâce à la performance de son parti politique lors des élections, il est bien réel que cela fut un processus. C’est donc par des élections « moyens démocratiques (selon le binôme) », qu’Adolf Hitler est devenu Chancelier de l’Allemagne. Cette deuxième illustration mise en exergue, nous a démontrés, au contraire que, même si un acteur ou animateur politique est élu, c’est-à-dire, qu’il accède au pouvoir par des moyens « démocratiques » (selon le binôme), son exercice du pouvoir peut être non démocratique, autoritaire, dictatorial, despotique, ….
Cela dit, compte tenu de ces deux angles, tels que mis en relief, on est en droit de se poser une question majeure et centrale qui traverse notre esprit : Question : Quel est l’élément de ce binôme que l’on préfère : La démocratie comme mode de désignation par des élections générales organisées, des acteurs ou animateurs politiques émanant ou pas des partis politiques ; Ou, la démocratie comme l’exercice quotidien, réel, et effectif du pouvoir pour l’intérêt général et le respect des droits et libertés individuels ?
II. Tentative de destruction de la thèse selon laquelle l’Afrique noire, en général, et la RD. Congo, en particulier, « sont des jeunes démocraties » : thèse qui a servi à l’importation et à l’imposition de la démocratie à l’occidentale
Nombre d’auteurs, pas les moindres, dont je reconnais la qualité scientifique ; sont tous tombés sous le charme de cette thèse. Thèse qui a servi notamment à justifier l’institutionnalisation de la CENI, qui pour des Occidentaux et leurs relais, consolide la démocratie, en réalité, importée, dans les « Etats nouveaux d’Afrique noire », ces « Jeunes démocraties », « sorties » des dictatures. Des dictatures qu’ils ont d’ailleurs soutenues.
Des théoriciens occidentaux, spécialistes de l’exercice du pouvoir en Afrique noire, en se référant aux traditions politiques et culturelles africaines précoloniales ont justifié, indirectement des supports de la dictature dans des États nouveaux d’Afrique noire : « La population africaine marquée traditionnellement considère bien son élu comme représentant, mais aussi comme un chef à qui elle doit obéissance et confiance à cause de son rôle particulier et de son habitude aux affaires publiques. ‘ » » La tendance au monisme politique ne repose pas seulement, en Afrique Noire, sur des raisons techniques, mais aussi sur des ressorts psychologiques profonds ancrés dans la vie sociale traditionnelle. » » […] Enfin, cette prééminence [du Chef de l’Etat] résulte, sans doute, de la tradition historique caractérisée par le fait que même avant la conquête coloniale, le pouvoir était monocratique. » ⁵⁸ » Le Chef n’est plus seul leader, il est devenu un « ruler », un gouvernant. […] Le principe de la séparation des pouvoirs, cher à Montesquieu était inconnu en Afrique. Le Chef ou le monarque était investi, d’un point de vue juridico-politique des trois fonctions classiques : législative, exécutive et juridictionnelle. De même, en raison de la prédominance du sacré, la séparation du sacré et du profane, du religieux et du politique n’existait pas. » Dans cette même lignée, nombre de théoriciens noirs africains spécialisés dans la propagande des » formes nouvelles » de la Sacralisation du pouvoir en Afrique noire, ont fait beaucoup d’amalgames en soutenant que des chefs d’Etat noirs africains, ont fait recours aux pratiques politiques et culturelles des sociétés traditionnelles noires africaines ; en trouvant par exemple des similitudes entre : le caractère sacralisé de la personne du Chef d’État moderne par rapport à celui du Chef traditionnel, le caractère incontestable de l’autorité du Chef de l’Etat moderne par rapport à celui du Chef traditionnel, le caractère unique du Chef de l’Etat moderne par rapport à celui du Chef traditionnel …
Pour s’en convaincre, prenons l’exemple de Bokonga Ekanga Batombele qui, en se référant aux pratiques politiques des chefferies traditionnelles africaines » sacrées « , prétendit : » Les solutions aux problèmes zaïrois doivent s’inspirer des traditions culturelles zaïroises.
A ce propos, une observation doit être faite sur la philosophie du chef dans les sociétés traditionnelles en Afrique. Chaque village africain a un chef. Jamais deux dont l’un de la majorité à un bout du village et l’autre de l’opposition à un autre bout du village. L’autorité du chef n’est jamais sujette à contestation. Toutefois, le chef prend conseil auprès des sages. Il doit s’informer, mais après avoir pris avis et s’être informé, il doit décider et trancher seul, en pleine connaissance de cause […]. La primauté du chef, d’un seul chef, d’un seul guide pour un seul peuple, un peuple uni, voilà la clé de voûte de l’édifice politique au Zaïre. «
Ces lectures biaisées, ont négligé dans leurs analyses, la vraie dimension culturelle noire africaine. Elles déroutent et désorientent dès lors l’homme ordinaire ou le lecteur non avisé et les poussent à l’assimilation, à la confusion, à l’imprécision, …. en les laissant prisonniers des modèles d’analyse contestés. En réalité , l’Afrique noire, est une « vieille démocratie », mieux, une « démocratie culturelle » ; car dans l’Afrique noire précoloniale, le « sacré » définissait le pouvoir politique et délimitait aussi les modalités de son contrôle. Il était donc, sa propre source de contestation !
Pour rappel, la plupart des sociétés traditionnelles noires africaines mais aussi congolaises, étaient caractérisées par » la sacralité « . C’est ainsi que la conception même du pouvoir politique était imprégnée de « sacré. » La sacralité du pouvoir ressortait ainsi plusieurs facettes :
– elle montrait la distance qui sépare le pouvoir avec la société, – elle présentait le pouvoir comme une puissance de domination,
– elle essayait d’associer l’ordre du monde que les dieux ont imposé et ont renforcé par le rituel, et l’ordre de la société défini par les ancêtres du commencement ou les fondateurs de l’Etat.
Ces considérations auraient ainsi, faussé l’approche que certains observateurs occidentaux, habitués au mode d’analyse occidental de l’exercice du pouvoir, avaient fait de l’exercice du pouvoir traditionnel centré sur la sacralité du pouvoir, mais aussi sur sa concentration dans les mains d’une personne. C’est ce qu’a d’ailleurs souligné avec force Kiflé Selassié Beseat : « Ce qui, dans les traditions politiques et culturelles africaines apparaît souvent à l’observateur mal informé, comme l’acceptation absolue et inconditionnelle de l’autorité n’est jamais si absolue ni si inconditionnelle. »
Dans ce même ordre d’idées, Jean Poirier pense que des formes vraiment autocratiques du pouvoir en Afrique Noire, étaient peut-être inexistantes dans les civilisations précoloniales, et seraient constituées, selon lui, à partir de ce qu’il a appelé » accidents récents » comme par exemple la conquête d’un aventurier, la pénétration ou les invasions par des » groupes musulmans » ou la » reprise en main autoritaire » , mais aussi au fait de colonisation.⁶⁵ C’est pourquoi M. Alliot a insisté, dans sa contribution sur » L’Acculturation juridique » , sur le fait que dans des sociétés à chefferie, le pouvoir du roi ou du souverain ne pouvait exister, ni s’exercer sans tenir compte de plusieurs autorités : religieuses, maîtres de la terre, chefs et groupes militaires, oracles, sociétés secrètes, assemblées populaires, classes d’âges, lignages, associations connues, … Ces autorités constituent de par » les volontés multiples « , selon lui, des freins pour empêcher l’arbitraire royal.
M. Alliot pense aussi que dans les sociétés primitives à pouvoir central, les autorités sont en réalité des » contrepoids au pouvoir. «
II.1. La RD Congo est une « vieille démocratie », mieux, « une démocratie culturelle »
Dans sa contribution sur » La Royauté » : « La Royauté et le sacré », » La Royauté et la structure politique » dans le Royaume Kuba, Jan Vansina conforte notre position car il soutient : » [Sa] personne […] n’est pas sacrée, le roi ne possède d’autres pouvoirs extranaturels que ceux qu’il acquiert en se servant de charmes ou en pratiquant la sorcellerie. » » […] L’exercice du pouvoir royal est sujet à une série de contrôles. En pratique, il est même contrôlé d’une façon […] effective […].
Les institutions qui limitent le pouvoir royal sont surtout les conseils ishyaaml et ibaam, ainsi que le muyum. Le conseil ishyaaml traite les affaires courantes et, après chacune de ses séances, il fait part au roi de son opinion. Si ce dernier passe outre aux désirs de l’ishyaaml, le conseil peut se réunir en séance secrète nkaam, en dehors de la capitale, et lui reprocher son attitude. » » Le conseil de couronnement, ibaam, n’intervient qu’en cas de crises graves. Il peut convoquer le roi, lui dicter une ligne de conduite et, si celle-ci n’est pas suivie, on pense que le conseil peut ordonner le meurtre du roi « .
» Mais la dernière garantie du peuple contre la tyrannie réside dans les charmes nationaux. Ceux-ci sont gardés par le muyum, un dignitaire égal au roi, qui tient sa cour et règne sur un seul village. Le roi ne peut le voir qu’une seule fois pendant sa vie, lors de son intronisation. S’il règne en tyran, les charmes le tueront automatiquement, sans l’intervention du muyum lui-même. Aucun roi ne peut ignorer les limites de son pouvoir. D’ailleurs, lors de son investure, on lui rappelle par trois fois que la tyrannie mène à la mort. «
Cela dit, l’apport de l’illustration sur le » Royaume Kuba » vient de détruire des théories soutenues par nombre de théoriciens dont je reconnais la qualité scientifique mais qui sont tombés sous le charme de la thèse selon laquelle, la » démocratie » était étrangère de l’Afrique noire précoloniale, en général, et en RD Congo, en particulier. Cette illustration sur le » Royaume Kuba », nous démontre par ailleurs, et cela sans ambiguïté, que le recours que faisaient sans cesse, nombre de Chefs d’Etat nouveaux d’Afrique noire, et particulièrement le Président Mobutu dans le cas du Congo – Zaïre, de la tradition et de la participation mythique des ancêtres au processus politique, était sans doute exploité à d’autres fins : légitimer un pouvoir autocratique et régner en » tyran « .
Dans le Royaume Kuba, on vient de le voir, nonobstant le fait que le roi concentrait beaucoup des pouvoirs entre ses mains, cela n’était pas synonyme d’absolutisme du pouvoir. Le roi ne détenait donc que des pouvoirs que lui conférait » la Constitution » et s’il devait les outrepasser pour » rehausser » le prestige royal, il devait le faire en cachette. En ce sens, son pouvoir était donc contrôlé par les conseils, tels qu’illustrés ci-avant. Par ailleurs, on pouvait aussi reprocher au roi de ne pas avoir suivi l’opinion du conseil ishyaaml lors des affaires courantes ; il était même prévu qu’on lui dicte sa conduite lors des crises graves. On pouvait même ordonner son meurtre s’il ne s’alignait pas lors de ces crises graves, à la ligne de conduite que lui imposait le conseil ibaam.
Ces illustrations nous révèlent en outre que le roi était justiciable, il n’était pas lui-même Dieu, mais le représentait. Il n’était pas donc au-dessus de la loi. S’il se conduisait en » tyran », » les charmes » devaient le tuer sans l’avis du muyum. Donc, son élimination physique était aussi prévue. A la lumière de ce qui précède ; le Scientifique vient ainsi de détruire la thèse selon laquelle l’Afrique noire et la RD Congo sont des » jeunes démocraties « , thèse qui a servi à la vente, à la commercialisation, à la consommation, à l’imposition, de la démocratie américaine à l’occidentale en Afrique Noire, en général, et en RD Congo, en particulier, mais aussi, de cette recette appelée, la CENI.
En somme, c’est donc à travers ces illustrations que nous pouvions saisir où nous en sommes aujourd’hui ; c’est-à-dire que la pénétration européenne et l’implantation du pouvoir colonial en Afrique noire en général et, en RD Congo en particulier, a eu une conséquence importante au niveau de la conception et de l’exercice du pouvoir traditionnel, car ce dernier, fondé sur » le Sacré « , fut contesté et remis en cause par le colonisateur et le missionnaire, et ainsi, le Chef traditionnel ou Coutumier fut, lui aussi , démystifié. C’est ainsi qu’un autre type de pouvoir fut imposé. Celui-ci fut méconnu, nouveau, » moderne » et européen.
Par ailleurs, lors de l’indépendance de la RD Congo, donc à la fin de l’époque coloniale, le colonisateur a voulu que les futurs dirigeants congolais puissent fonctionner sur base de la démocratie libérale du type occidental. Et ont réussi à l’imposer. En ce sens, la conception même du pouvoir et de son exercice devait être tracée, définie par la volonté générale, donc les hommes vivants, et non plus par Dieu ou les ancêtres. Et le Chef nouveau devait désormais être désigné par le peuple à l’issue d’une compétition. C’est-à-dire que le Chef nouveau ne devait plus provenir de la branche de l’ » ancêtre-fondateur » et, son mandat était aussi limité dans le temps et pouvait être renouvelé par son peuple. C’est ainsi que naquit, en Afrique Noire, en général, et en RD Congo, en particulier, le parlementarisme importé, dit « classique. »
III. La Constitution importée et imposée de 2006 : une histoire aux fins de la balkanisation de la RD Congo et une épine à la survie de la nation congolaise. Il faudrait donc la changer
En analysant avec les jumelles du scientifique, la guerre que le Rwanda, ses mentors, et ses supplétifs terroristes du M23, imposent à la RD Congo, dans la partie-Est de son territoire national ; et en analysant en outre, avec les mêmes jumelles, le déplacement du centre de gravité du discours du président Paul Kagame, qui soutient désormais, lors de ses déplacements à l’étranger, et cela, devant le monde entier, une thèse biaisée selon laquelle, le Rwanda aurait des terres à récupérer en RD Congo, une thèse que les scientifiques congolais initiés et chevronnés peuvent détruire sans difficultés car ce genre de Scientifiques incarnent la connaissance scientifique, le savoir scientifique et la vérité scientifique non trafiqués.
Dans ce même ordre d’idées, comme le président Paul Kagame croit avoir ouvert un nouveau front, en s’hasardant sur le terrain scientifique ; il serait légitime et plus que temps, me semble-t-il, que le Gouvernement congolais mobilise et soutienne ses Scientifiques afin qu’ils entrent en lice dans la perspective d’aller en croisade à l’instar du président Paul Kagame, aux fins de détruire sa thèse biaisée qu’il soutient devant la face du monde.
Cette contre-attaque scientifique devra être centrée sur deux missions principales : éclairer la lanterne des consciences collectives autochtones que le président Paul Kagame, a tenté de séduire, a séduites et séduit lors de ses déplacements à l’étranger, et les récupérer pour la cause congolaise ; car, dans cette guerre, outre les succès engrangés par la RD Congo sur les plans militaire, politique, diplomatique et médiatique ; la RD Congo devra aussi gagner cette guerre sur le plan scientifique. Ce déplacement du centre de gravité du discours du président Paul Kagame, nous révèle ou nous aide à comprendre bien de choses :
1. Ce que nombre de scientifiques, de chercheurs, d’acteurs politiques, de spécialistes, et de témoins, de l’histoire politique et de la vie politique de la RD Congo, ont toujours soutenu ; c’est-à-dire, l’existence d’un plan de la balkanisation de la RD Congo ;
2. Il nous aide à comprendre aussi pourquoi les FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) sont infiltrées par des éléments étrangers ennemis qui les affaiblissent de l’intérieur et entravent l’accomplissement de leur mission sacrée, qui est aussi celle de restaurer la paix et la sécurité dans la partie-Est de la RD Congo ;
3. Il nous aide en outre, à comprendre qu’outre le Rwanda, il est bien réel que cette infiltration de l’Armée congolaise par des éléments étrangers, est soutenue par nombre de pays tireurs de ficelles. Pour preuves :
– l’invasion des territoires de l’Est de la RD Congo par des armées étrangères ennemies ;
– plusieurs rébellions ou agressions menées dans l’Est de la RD Congo, soutenues par des pays étrangers. ;
– les massacres des populations congolaises, les exactions commises contre elles, ainsi que le pillage des ressources minières et autres de la RD Congo, commis par des armées étrangères, et des groupes armés soutenus par ces pays.
C’est pourquoi, une question s’avère importante et doit être posée : Question : Pourquoi c’est principalement dans la partie Est de la RD Congo que sévissent ces atrocités ? Réponse: Comme la balkanisation de la RD Congo, me semble-t-il, est leur objectif ultime ; et comme militairement ils n’ont pas réussi, depuis bien d’années, à l’atteindre ; tout porte croire qu’ils tentent en tant que soutiens des terroristes du M23, des milices, des groupes rebelles, des groupes armés, … de l’atteindre autrement, en influant sur l’organisation administrative territoriale de la RD Congo convenue lors de l’Accord de Sun city, de l’élaboration et de la rédaction de la Constitution importée et imposée de 2006.
C’est pourquoi, à mon sens, il faudrait repenser l’organisation administrative territoriale de la RD Congo et changer en profondeur la Constitution de 2006. Des gymnastiques intellectuelles nous amènent à nous poser une autre question qui pourrait nous aider à ressortir des dimensions insoupçonnées. Question : Quelle est la plus-value du saucissonnage des Provinces de la RD Congo d’avant la Constitution de 2006 ? Réponse : Ce saucissonnage des Provinces de la RD Congo semble causer bien de problèmes alors qu’il était censé les résoudre ! Effectivement, ce saucissonnage, est bien réel. Il est même stipulé et défini dans l’article 2 de la Constitution de 2006 ; Constitution que d’aucuns appellent, » la Constitution des Belligérants « .
Pour s’en convaincre de ce saucissonnage, prenons quelques illustrations :
– la province du Bandundu est saucissonnée en trois tranches : – Kwango – Kwilu – et, Maï-Ndombe
– la province de l’Equateur, saucissonnée en 5 tranches : – Équateur – Mongala – Nord – Ubangui – Sud – Ubangui – Tshuapa
– la province de Katanga est saucissonnée en 4 tranches : – Haut – Katanga – Haut – Lomami – Lualaba – Tanganyika
Sous cette acception, l’actuelle organisation administrative territoriale caractérisée par l’instauration des gouvernements provinciaux et des assemblées provinciales, apparaît ainsi comme une revendication des Belligérants faite dans le but de se partager le pouvoir pour que chacun ou chaque belligérant s’assure de sa part du gâteau dans le sens où qu’il se retrouve dans son espace géographique afin de participer à la gestion du pays et d’oublier le Grand Kivu convoité et visé comme pivot, comme une expérience pilote dans le plan de balkanisation de la RD Congo. Sous cet angle, le saucissonnage des Provinces de la RD Congo a comme corollaire, le repli provincial. Ce dernier affecte ainsi l’unité et la cohésion nationales.
Comment s’étonner que ce repli provincial ait à son tour, la montée du tribalisme, de l’ethnisme, du clanisme, du provincialisme, du clientélisme…. comme corollaires ! Actuellement, même si la Constitution ne l’interdit pas, il est devenu quasiment impossible, suite à l’actuelle organisation administrative des provinces de la RD Congo, qu’un originaire d’une province quelconque dirige ou gouverne une province autre que celle dont il est originaire. C’est bien cela, le propre du repli provincial. Pour s’en convaincre, prenons l’exemple des Gouverneurs de provinces :
– hormis la Ville-Province de Kinshasa ; tous les Gouverneurs de provinces sont originaires de leurs provinces, ce sont donc des originaires, des autochtones, Il est donc devenu pratiquement impossible, même si la Constitution ne l’interdit pas, qu’:
– un (e) Mungala dirige la province du Kongo Central ;
– un (e) Muluba dirige la province du Kwilu – un (e) Mukongo dirige la province de Lualaba – un (e) Mushwahili dirige la province de Mongala. Ce repli provincial, ce modèle d’organisation administrative territoriale, joue et continuera de jouer, si on laisse faire , sur le mental, sur la culture et sur le comportement des originaires, des autochtones, en réveillant le » vieux démon » des tendances séparatiste et sécessionniste des années 60 qui avait secoué la RD Congo par des rébellions et des sécessions .
Si on laisse faire, les originaires d’une quelconque province, les autochtones, pourraient aller plus loin en considérant un jour, qu’il est anormal qu’un originaire d’une autre province soit par exemple, le commandant de la police de leur province ; Qu’un originaire d’une autre province soit le représentant d’un service public ou d’un établissement public dans leur province, …. Ce repli provincial semble avoir plusieurs variantes :
– il apparaît à l’heure actuelle comme une poutre qui est déjà rongée par des termites et n’attend qu’un fait anodin ou incompris pour s’effondrer. Pour s’en convaincre, l’actualité nous révèle cette facette : il suffit qu’une tribu ou ethnie soit bien représentée dans une administration, une institution, un établissement public, un service public, une juridiction, …. quelconque, pour qu’on crie au tribalisme, à l’ethnisme, à l’injustice , …. sans pour autant faire au préalable un diagnostic, une analyse de fond pour comprendre le pourquoi ! C’est très inquiétant que cela soit devenu un réflexe ! Il convient aussi par ailleurs, que les décideurs politiques prennent en compte la dimension de cette réalité lors des nominations ou des promotions pour ne pas donner l’occasion aux détracteurs de jouer sur la fibre tribale, ethnique, clanique, clientéliste, … Cela dit, ceci prouve à suffisance que le repli provincial est bien réel et endommage ou affecte la cohésion ou l’unité nationales très chèrement acquises.
Une autre variante de ce repli provincial est l’illusion de l’autosuffisance provinciale. Comment s’étonner qu’un jour qu’une province se considère comme étant très bien organisée et réclame son « autodétermination » car elle s’était déjà repliée sur elle-même de par sa gestion telle que réalisée par ses originaires, les autochtones. C’est pourquoi, il faudrait, me semble-t-il, repenser l’organisation administrative territoriale de l’État Congolais, c’est- à-dire repenser donc la Constitution.
Pour éviter, freiner ou arrêter l’apparition ou la résurgence des forces centrifuges, le travail devra se faire ou continuer de se faire sur tous les plans. Il est donc plus que temps :
– de rétablir l’autorité de l’Etat partout, sur tout le territoire national ;
– que l’Etat redevienne sous toutes ses formes, cette Puissance publique, détentrice de la contrainte physique légitime
– que l’Etat remplisse comme il se doit, ses trois missions traditionnelles : sociologique, organisationnelle et juridique
– que l’Etat devienne fort c’est-à-dire, cet Etat :
– de droit
– qui remplit et poursuit une mission d’intérêt général
– qui a une armée moderne, professionnelle et équipée
– capable d’assurer la sécurité de ses concitoyens
– qui assure l’éducation et l’instruction de ses concitoyens – qui organise les soins de santé de ses concitoyens
– qui assure la recherche Scientifique
– qui crée des richesses
– qui encourage et soutient l’entrepreneuriat congolais
– qui rémunère équitablement et honorablement ses agents publics
– qui s’occupe de la redistribution équitable des richesses et des fruits de la croissance – qui assure le social de ses concitoyens – qui s’occupe de la sécurité sociale de ses concitoyens ; … » Scientia Vincere Tenebras » (« La Science Vaincra les Ténèbres «)
Professeur Jean-Denis Kasese
Professeur à l’Université Pédagogique Nationale (UPN)
Professeur Associé, Chercheur et Collaborateur Scientifique à l’Université Libre de Bruxelles (ULB)
Membre de la Faculté de Philosophie et des Sciences Sociales (ex – Faculté des Sciences Sociales et Politiques / Solvay Brussels School of Economics and Management) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB)
Membre de l’Institut de Sociologie (IS) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB)
Membre du Centre d’Etude de la Coopération Internationale et du Développement (CECID) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB)
NOTES ET RÉFÉRENCES
- La chute du mur de Berlin a eu comme conséquences :
- L’effondrement de l’empire soviétique
- L’unification de l’Allemagne
- Le bouleversent des équilibrés géopolitiques
- Et la volonté de l’Europe Centrale et orientale de faire « retour » à l’Europe. Cela a permis sa réunification.
2 Le discours de La Baule est celui prononcé par le Président français, François Mitterrand, le 20 juin 1990 dans la commune française de La Baule – Escoublac, à l’occasion de la 16 ème Conférence de Chefs d’État d’Afrique et de France.
C’est alors, après l’effondrement de l’Empire soviétique, que le Président Mitterrand avait invité les États africains à lancer le processus de démocratisation de leurs pays, sous peine d’être privés du soutien de l’Occident.
3.Dans sa contribution sur l’État Néo-patrimonial, Jean François Médard s’est inspiré de l’approche wébérienne sur le Patrimonialisme et l’a adapté. Pour lui, dans l’État Néo-patrimonial, les leaders gèrent les affaires publiques comme s’ils géraient les affaires privées ou familiales, et confondent les caisses de l’État à leurs poches ! L’Accès au pouvoir est pour eux, synonyme d’enrichissement personnel, c’est-à-dire, ils accèdent au pouvoir pour contrôler les ressources économiques et financières afin de s’enrichir.
En ce qui nous concerne, je considère que la quasi-totalité de partis politiques congolais, serviraient de tremplins, ascenseurs, passerelles ou escaliers pour atteindre les mêmes objectifs
4. Dans le cadre de ma Réflexion, je considère que, la quasi-totalité de partis politiques seraient créés pour les mêmes motivations t
5. Même des Parlementaires se compromettraient en se servant de leur posture pour faire notamment du business lors des grands rendez-vous politiques et parlementaires
6. On a indexé la corruption lors de ces grands rendez-vous parlementaires
7.Les émoluments que touchent les députés nationaux et les Sénateurs, seraient exorbitants, et ont fait couler beaucoup d’encre et de salive
8. RADIO OKAPI, « Congo nouveau : Union Sacrée, des Députés tentés de bloquer l’investiture du Gouvernement », 31 mai 2024
9. ACTUALITÉ. CD, « RDC : Tshisekedi menace de dissoudre l’Assemblée nationale face aux pratiques de monnayage des décisions parlementaires », 17 mai 2024
10. Ibidem
11. La Constitution de la RD Congo de 2006, est aussi appelée par ses détracteurs, « La Constitution des Belligérants », elle serait conçue aux fins de la Balkanisation de la RD Congo, et serait une épine à la survie de la Nation congolaise.
12. LE POTENTIEL , « Référendum : Étienne Tshisekedi appelle au boycott », 15/12/2005 in CONGO FORUM.
13. POLLET – PANOUSSI, Delphine, » La Constitution congolaise de 2006 : petite sœur africaine de la Constitution française « , in REVUE FRANÇAISE DE DROIT CONSTITUTIONNEL, 2008/3 ( n° 75 ), pp. 461-498
14. KASESE, OTUNG ABIENDA, Jean-Denis, « Contrairement à l’idée reçue, à la croyance ,et au discours largement véhiculés ou répandus, et aux usages ; dans un Régime Semi-Présidentiel comme celui de la RD Congo, la Constitution donne au Premier Ministre et au Président de la République, la possibilité de proposer et de nommer, aussi, dans l’équipe gouvernementale, des personnes n’appartenant ni à la Majorité parlementaire, ni à la Coalition majoritaire, ni aux Partis politiques. Ils sont donc libres, ils ont un réel pouvoir et un choix réel », 26 ème Réflexion, in LAPROSPÉRITÉ.NET,
15. Ibidem
16. Ibidem
17. Pour reprendre l’expression utilisée par Damola Adejumo – Ayibiowu / ADEJUMO-AYIBIOWU, Damola , » La » démocratie » à l’occidentale en Afrique est juste une manière de renforcer l’idéologie néolibérale, in OPEN DEMOCRACY – RITIMO , le 15 avril 2020
18. POINCARÉ, Henri, « Discours lors du 75 ème anniversaire de l’Université Libre de Bruxelles », ULB, Bruxelles, le 21 novembre 1909
19. CONSTITUTION DE LA BELGIQUE du 17 février 1994, Article 105
20. Ibid., Alinéa 1 Art. 85
21. Ibid., Alinéa 1 Art. 87
22. Ibid., Art. 88
23. Ibid., Alinéa 1 Art. 96
24. Ibid., Alinéa 1 Art. 104
25. Ibid., Alinéa 3 Art. 104
26. Ibid., Art. 106
27. Ibid., Alinéa 1 Art..107
28.Ibid., Alinéa 2 Art. 107
29. Ibid., Alinéa 3 Art. 107
30. Ibid., Art. 108
31. Ibid., Art. 109
32.Ibid., Art. 110
33. Ibid., Art. 112
34.Ibid., Art. 113
35. Ibid., Art. 114
36. Ibid., Art. 36
37. Ibid., Art. 37
38. Ibid., Alinéa 1 Art. 40
39. Ibid., Alinéa 2 Art. 40
40. Ibid., Art..45
41. Ibid., Art. 46
42. Ibid., Alinéa 2 Art. 46
43. WEBER, Max, Économie et Société, Tom 1, Paris, Pocket, 2003, 410 p.
44. CLARKE, Isabelle, COSTELLE, Daniel, Apocalypse – Hitler, Acropole, 2011
45. Idem
46. Idem
47. Idem
48. Idem
49. Idem
50. Idem
51. Idem
52. Idem
53. Idem
54. Idem
55. FALL , Ismalia Madior, HOUNKPE , Mathias , Les Commissions électorales en Afrique de l’Ouest . Analyse comparée, Abudja
56. BUCHMANN, Jean, L’ Afrique noire indépendante, Paris, LGDJ, 1962, p. 354.
57. Ibid. , p.346.
58. GONIDEC, Pierre-François, Les systèmes politiques africains, Deuxième édition, Paris, LGDJ, 1978, p. 221.
59. GONIDEC, Pierre-François, Les Systèmes politiques africains. Les Nouvelles Démocraties, 3ème édition, Paris, LGDJ, 1997, p.17.
60. BOKONGA EKANGA BOTOMBELE , » Dans l’esprit des ancêtres » in REVUE ZAÏROISE DES SCIENCES DE L’ HOMME-O.N.R.D. , n° 1 , Culture au Zaïre et en Afrique, Kinshasa, 1973, p.269.
61. Pour reprendre l’expression utilisée par Damola Adejumo – Ayibiowu / ADEJUMO-AYIBIOWU, Damola , » La » démocratie » à l’occidentale en Afrique est juste une manière de renforcer l’idéologie néolibérale, Op. Cit.
62. KAMTO , Maurice , Pouvoir et Droit en Afrique noire. Essai sur les fondements du Constitutionnalisme dans des États d’Afrique noire francophone , Paris, LGDJ 1987 , 545 p.
63. BALANDIER, Georges, Anthropologie politique, Paris, PUF, 1967, pp. 125-126
64. BESEAT, Kiflé Selassié, » Convaincre, Contrôler, ou Contraindre ? Systèmes et mécanismes de contrôle du pouvoir en Afrique » , in La problématique de l’État en Afrique Noire , Dakar, 30 novembre au 6 décembre, p.1.
65. POIRIER, Jean, » Les formes monocratiques du Pouvoir africain » in ANNALES AFRICAINES, 1966 , p.186.
66. ALLIOT, M., » L’Acculturation juridique » , in POIRIER , Jean, Ethnologie Générale, Paris, » Cujos », 1968, p.1208.
67. Ibidem.
68. VANSINA, Jan , Le Royaume Kuba , Tervuren , Annales du musée Royal de l’Afrique Centrale , sér. In 80 , Sciences humaines, 49 , 1964.
69. Ibid., p. 98.
70. Ibid., 105.
71. Ibidem.
72. Ibidem.
73. Ibidem.
74. ACTUALITÉ.CD, « Selon Paul Kagame, les terres appartenant au Rwanda auraient été données à la RDC, d’où la crise actuelle », le 16 avril 2023, 11 :21 AM
75. RADIO OKAPI, « L’échec de la balkanisation de la RD Congo passe par la prise de responsabilité de chaque Congolais, conseille Mgr Sikuli », publié le dimanche 4/12/2022 à 20:33, modifié le lundi 5/12/2022 à 07 :39
76. – TV5 MONDE, AFP, « RD Congo : Kinshasa ne veut plus intégrer d’anciens rebelles dans son armée », le 24 / novembre / 2022 à 11h31 ( TU ), mis à jour le 24 /novembre / 2022 à 13h02 ( TU )
- POLITICO.CD, « Infiltration des Rwandais dans l’armée congolaise : la RDC accuse la Communauté internationale de jouer double jeu », Kinshasa, 30 juin 2022 à 15:05
77. BUSSELEN, Tony, « Pourquoi l’Occident ferme les yeux sur la déstabilisation orchestrée par le Rwanda ? », in SOLIDAIRE.ORG, 16 février 2016
78. RDC-MINISTÈRE DES DROITS HUMAINS, « La guerre d’agression en RD Congo : Trois ans de massacres et de génocide « à huis clos » », in Livre blanc-Numéro spécial, Kinshasa, Octobre 2001, 89 p.
79. Ibidem
80. Ibidem
- Article 2 de la Constitution de la RD Congo du 16 février 2006.