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Comment organiser de bonnes élections au Congo-Kinshasa ?

Par La Prospérité
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(Par le Prof. Patience Kabamba)

*Du 20 au 21 Décembre 2023, le Congo venait de connaître deux journées folles dévolues aux élections présidentielles. Le moins que l’on puisse dire est que cette pratique qui revient tous les cinq ans depuis 2006 était cette année beaucoup moins préparée et mal organisée.  Marx disait que la différence entre une toile tissée par une abeille et celle d’un architecte est que l’architecte a le toile dans sa tête, avant de la construire.

Dans un monde de plus en plus complexe, la toile existe dans nos têtes avant que nous la déployions dans le monde. Le manque de préparation qui a caractérisé les élections au Congo ne peut être qualifié que d’incompétence.

La CENI, malgré ses milliards de dollars, s’est retrouvée face à un dilemme la semaine dernière.

La date des élections constitutionnelles du 20 décembre devrait être respectée, ou alors fallait-il se donner un peu plus de temps en la prolongeant de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour organiser une élection crédible. Entre les élections ratées a la date constitutionnelle du 20 Novembre et une petite prolongation pour mieux les préparer, la Centrale Electorale Nationale Indépendante  (CENI) a choisi de maintenir la légitimité du pouvoir en organisant des élections chaotiques.

MDW s’interroge aujourd’hui sur les conditions d’une tenue d’élections libres et transparentes au Congo-Kinshasa. La République Démocratique du Congo possède une organisation naturelle et universelle qui couvre l’ensemble du pays. C’est l’Église Catholique qui compte des diocèses, paroisses et communautés de base couvrant l’ensemble du territoire congolais. L’Eglise Catholique au Congo est composée de six archidiocèses et de 41 diocèses répartis à travers le pays.

En nous appuyant sur cette structure ecclésiale, nous serons en mesure d’atteindre une grande partie de la population à des fins de recensement et d’élections. Cette approche ne nécessitera pas des économies significatives en termes de coût d’organisation des élections. Je crois qu’avec quelques millions de dollars, nous pourrions organiser des élections libres et transparentes en donnant aux communautés les moyens de s’organiser. Cela ne sert à rien de centraliser l’organisation des élections.

Chaque province peut rendre compte des résultats en fonction de la structure ecclésiale existante dans son milieu. Encore une fois, je crois que l’infrastructure de l’Eglise Catholique peut résoudre bon nombre de problèmes liés à l’inscription des électeurs et à l’organisation du vote,  lui-même.

Les machines à voter ont grandement contribué à accélérer la proclamation des élections. Toutefois, ces machines présentent deux problèmes majeurs. Il est donc nécessaire d’évaluer si le gain de temps réalisé grâce à l’utilisation de la machine est supérieur aux difficultés posées par la machine.

Le premier problème des machines à voter au Congo est leur sécurité. On les trouve facilement parmi les privés qui envoient leurs résultats par voie électronique directement au serveur central de la CENI.  Le serveur central reconnaît les machines et prend en compte les résultats.

Cela signifie que toute personne influente qui possède une machine  à voter chez elle à la maison peut influencer les résultats.

Tant que les  machines à voter ne seront pas sécurisées, elles resteront un obstacle à notre désir d’avoir des élections fiables.

Le deuxième obstacle des machines  est à l’intérieur de la machine et cause plus de dégâts. Prenons un exemple concret. 

Le nombre  d’électeurs attendus dans chaque bureau de vote est de 680 personnes pendant la période de vote de 11 heures, de 6h00 à 17h00, ce qui équivaut à 660 minutes. Mais, si tout le monde passait au minimum 2 minutes devant la machine (une estimation prudente), 660: 2 = 330 votes seraient exprimés en 11 heures. Si la CENI accordait une heure de plus, nous aurions 60: 2 = 30 électeurs supplémentaires.

 Au total, 360 électeurs auront voté en 12 heures. Un calcul simple montre que le nombre d’électeurs qui n’ont pas eu le temps matériel pour voter est de (680-330) = 350. L’usage de la machine aura donc désaffranchi plus de la moitié des électeurs. Pour surmonter cet obstacle, il faut soit augmenter le nombre de machines à voter, soit augmenter le nombre de bureaux de vote. Sans cela, les machines priveraient plus de la moitié des électeurs du droit de vote.

Pris ensemble, ces deux obstacles signifient que l’utilisation de machines lors des  élections au Congo représente un pas en arrière et non un pas en avant.

En ce qui concerne les élections au Congo, il faut rappeler que les résultats de 2018 annoncés à l’époque par la CENI ont simplement détruit la source de légitimité de pouvoir en République démocratique du Congo pour plusieurs décennies. Les élections au Congo démontrent les défauts de toutes les démocraties représentatives. La démocratie se limite à voter tous les cinq ans. Ce n’est pas idéal.

La démocratie doit être procédurale, une démocratie  procédurale imprègne toutes les pratiques sociales. Les chefs de la chorale, les chefs de classe et les représentants des étudiants doivent être élus démocratiquement. En d’autres termes, la démocratie doit être vécue dans tous les domaines de la vie, et pas seulement lors des élections tous les cinq ans.

Fondamentalement, la démocratie signifie que le  pouvoir (kratos) est transféré au demos (peuple). Depuis les réformes des Grecs Solon et Clisthène, le demos  est associé à la valeurs d’échange. Autrement dit, ce sont les plus riches qui détiennent le pouvoir. Ce que nous vivons au Congo est une ploutocratie déguisée (le pouvoir des riches). La caution du candidat à la présidentielle est de 100000 USD, tandis que le PIB par habitant de Kinshasa est de 577,21 USD (2021). La somme de 100 000 dollars pour un candidat à la présidence de la république est tout simplement dissuasive pour tous les Congolais, sauf ceux qui ont pille le pays.

En résumé, la République démocratique du Congo doit se décider d’utiliser les infrastructures existantes de l’Eglise catholique pour réaliser un recensement national (le dernier remonte à 1984) et organiser des élections plus fiables.

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